8 histoires croustillantes de jobs d'été qui ont viré au fiasco

Canicule en chambre froide

À dix-huit ans, j’ai travaillé un mois dans un supermarché dans mon Jura natal, pour faire du rangement et l’inventaire dans une chambre (très) froide où il faisait -18°C, alors que le thermomètre frôlait les 30°C à l’extérieur. Deux salles, deux ambiances. Avant que le soleil ne se lève, je prenais mon vélo pour commencer à 4h30. Un jour sur deux j’étais dehors à 11h, épuisé par mes journées décalées, mais parfois il fallait que j’embraye sur deux heures supplémentaires l’après-midi. Résultat, j’ai passé mon mois de juillet à mettre et enlever mes pulls, gants, bonnets et manteau.

Thomas, social media manager, 33 ans

Récurage d’épaves

L’été de mon bac, je suis descendue au mois de juillet travailler sur la côte niçoise pour me faire un peu de sous et payer le reste de mes vacances. Sur le papier, j’avais trouvé une place en or : je travaillais pour une entreprise qui louait des yachts à la journée pour une clientèle fortunée. Je répondais aux appels, je m’occupais des réservations et j’accueillais les clients avec un large sourire. Rien de trop compliqué. Sauf que je n’avais pas prévu que… je devais aussi m’occuper du nettoyage des bateaux avec mon boss et disons qu’il y avait des personnes plus ou moins respectueuses et à cheval sur la propreté. Mon pire souvenir : lorsque le plus gros bateau de notre flotte est rentré d’un week-end à Saint-Tropez avec le ministre de la Défense russe à son bord. Selon le skipper, l’homme en question avait fait monter quelques potes et une dizaine de prostituées. Avec mon boss, on a décidé de tirer à pile ou face pour savoir lequel d’entre nous ferait la salle de bain ou la chambre. J’ai passé ma journée à retirer des poils et des cheveux coincés dans le système d’évacuation de la douche… Pas très ragoutant.

Roxanne, éditrice, 30 ans

Les haricots pas magiques

Ma mère avait entendu dire que des agriculteurs de la région cherchaient des personnes pour ramasser des haricots de Paimpol. Comme j’avais à peine seize ans et que je n’avais pas trouvé autre chose, avec ma sœur, on s’est dit que ça serait une bonne idée pour se faire un peu d’argent de poche. On s’est donc portés volontaire pour faire la saison. Si on travaillait le nombre d’heures qu’on voulait, on était payé à hauteur de 0,40 euros le kilo ramassé. Au final, rester toute la journée plié en deux sous le crachin breton pour gagner 500 euros à la fin de la récolte, ce n’était vraiment pas terrible. Heureusement, l’année suivante ma mère s’est rattrapée en me trouvant une place au service événementiel de ma ville : je devais livrer des chaises et des tables aux associations et aux particuliers pour des soirées. Certains jours on avait qu’une seule commande, alors on passait notre temps à faire des tours en camion sur la côte pour voir la mer. Entre les mecs du garage qui avaient placardé leurs murs d’affiches porno et qui tournaient à la bière dès 9h du mat et les intérimaires qui ressemblaient à des personnages de BD, c’était lunaire.

Matthieu, développeur, 31 ans

100 euros et des cloquinettes

Dans la famille où j’ai grandi, si je voulais un jean à la mode, il fallait que je me le paye tout seul. J’ai donc commencé à travailler très jeune. L’été de mes quatorze ans, mes parents m’ont dit qu’un pépiniériste cherchait des bras pour le mois d’août et je me suis porté volontaire. Tous les matins, j’enfourchais mon vélo à 6 heures pour suivre la nationale jusqu’à Pontault-Combault, à une dizaine de kilomètres de chez moi. Miraculeusement arrivé entier sur l’exploitation, le propriétaire des terres m’a expliqué que mon travail consistait à biner du buis pour aérer les allées et casser la terre dure comme la pierre. Je me souviens encore des cloques sur mon dos à cause des coups de soleil. En un mois, je n’ai croisé personne et à la pause-déjeuner je mangeais le tupperware que ma maman m’avait préparé seul assis dans le champ. Le dernier jour de mon labeur, le patron n’était pas là et j’ai vu qu’il avait déposé une enveloppe sur la selle de mon vélo, avec l’équivalent de 100 euros dedans. Sans contrat de travail, je n’avais aucun moyen de me plaindre. Mais cette expérience m’a tout de même appris à tailler des haies : j’en ai construit une avec les buissons que j’avais retirés dans le pavillon de mes parents.

Frédéric, chef d’entreprise, 57 ans

Cauchemar en boucherie

L’été de mes seize ans, je suis parti au Canada, sans argent en poche. Quand j’ai trouvé un poste dans un rayon boucherie dans une épicerie, j’étais ravi. Sauf que le job en question ne consistait pas à simplement faire la casse mais plutôt à fabriquer des brochettes de poulet à la chaîne, à récurer la chambre de découpe ou encore nettoyer les poubelles de la semaine pour retirer les morceaux de graisse, d’os et composés organiques restés collés. J’ai ainsi appris que ces poubelles de boucherie étaient généralement récupérées par l’industrie pour être transformées en maquillage. Cette expérience m’a tellement marqué qu’aujourd’hui je suis antispéciste !

Cédric, développeur, 34 ans

Pas d’escale pour les vaillants

Pendant mes études d’ingénieur, je me suis dit que ça serait une bonne idée de cumuler un stage dans une entreprise de maintenance informatique et un poste d’agent d’escale dans une compagnie maritime où j’avais un rythme un peu particulier : trois jours de travail, trois jours repos, puis j’enchaînais avec trois nuits et quatre jours repos. Le hasard du calendrier a fait que j’ai seulement eu deux jours off en trois mois parce que j’étais en stage le reste du temps. Bien sûr, il y a quelques situations un peu cocasses comme lorsque j’ai découvert que l’un des plus gros clients de l’entreprise qui m’avait pris en stage était… l’endroit où je travaillais comme agent d’escale. À la fin de l’été, complètement épuisé par ce rythme, j’étais soulagé de reprendre le chemin de l’école.

Maxime, ingénieur informatique, 34 ans

La fresque de la solitude

Grâce à mon oncle qui bossait dans une usine, j’ai trouvé un petit job de maintenance de trois semaines dans le coin de Bergerac. Pendant les deux premières semaines avec un petit ouvrier vif et rusé, j’ai dévissé des boulons, démonté des machines et j’ai tout nettoyé. En une semaine, c’était plié, mais mon coéquipier ne voulait pas qu’on en informe la direction. J’ai donc passé une deuxième semaine à brasser de l’air, me balader dans les allées avec un seau et quelques outils, à saluer les autres équipes, à prendre des pauses café à rallonge et bien entendu parler des projets de retraite de Régis, mon binôme dont la roublardise s’était perfectionnée au fil des années. Bien entendu, la chef a fini par comprendre qu’on n’avait plus rien à faire. J’ai alors été convoqué au magasin général où l’on m’a attifé d’une salopette parce qu’il n’y avait plus de pantalon à ma taille. On m’a donné un pinceau et un pot de peinture de cinq litres, de quoi peindre un éléphant. Avec cet attirail, je devais donner un coup de frais à un bâtiment éloigné où personne ne semblait avoir mis les pieds depuis vingt ans. La particularité de cette structure, c’est qu’elle était complètement vide mis à part des tuyaux qui suivaient la cloison des murs du sol au plafond. Je me suis appliqué, même si le résultat n’était pas très joli. Personne ne venait me voir et je restais toute la journée assis en tailleur à agiter mon pinceau, démotivé par l’inutilité de ma mission. Après mon passage, d’autres êtres humains viendraient-ils admirer mes dessins comme dans la grotte de Lascaux ? Pas si sûr. Quelques jours après la fin de mon contrat, mon oncle m’a annoncé qu’un incendie s’était déclaré dans le bâtiment où résidait la fresque de ma solitude et que tout avait été détruit.

Manuel, journaliste, 30 ans

Par ici la sortie

L’été de mes dix-neuf ans, je cherchais des petits boulots dans les petites annonces et je suis tombé sur une offre qui proposait de vendre des encyclopédies juridiques en porte-à-porte. Le jour de la formation, le manager nous a fait un speech extraordinaire et nous a dit que grâce à ce travail, on allait pouvoir aider des personnes dans le besoin. J’étais vraiment heureux de faire quelque chose qui avait du sens. On nous a donné rendez-vous le soir suivant dans le 18e arrondissement et des voitures nous ont dispatché dans des cités de la région parisienne. Avec un plan des bâtiments, j’ai commencé par le Bloc A de la cité de Melun. Première porte, un homme en slip m’a dit que j’avais intérêt à déguerpir au plus vite sinon il lâchait son Pitbull. J’ai continué jusqu’à tomber sur une jeune femme en nuisette qui m’a dit qu’elle se fichait des encyclopédies, mais qu’elle se sentait un peu seule et m’a proposé de boire un verre avec elle. En invoquant ma « conscience professionnelle », j’ai réussi à me sortir de ce traquenard. Tout en haut de l’immeuble, un jeune couple a accepté de me faire entrer. Je voyais bien qu’ils venaient de se lancer dans la vie, qu’ils n’avaient pas beaucoup d’argent, mais ils étaient très réceptifs à mon argumentaire. Ils ont ensuite rempli le dossier pour faire un prêt afin d’acquérir les vingt volumes de l’encyclopédie que je vendais à 3000 francs. Quand je suis sorti de l’appartement, j’étais heureux d’avoir fait une première vente et en même temps j’avais compris que c’était une magouille. Alors après deux secondes d’hésitation, j’ai déchiré le contrat. C’était trop louche de vendre des outils juridiques sans contrat de travail et au black. J’ai démissionné quelques heures plus tard.

Christophe, consultant, 59 ans