« Je doute de mon orientation pro » : et si vous en parliez à votre tuteur de stage ?
14. 12. 2022
5 min.
Le jour J est arrivé. Pendant quelques mois, vous quittez les murs de l’école pour une terre inconnue : l’entreprise. Un nouvel univers s’offre à vous avec une pléthore de nouveaux métiers et des personnes qui les exercent. Mais, malgré vos bonnes intentions, rien ne se passe comme prévu et la déception pointe le bout de son nez. Et face aux doutes sur votre orientation, vous vous demandez s’il est judicieux d’évoquer le sujet avec votre maître de stage. Juliette Maillard Sobieski, coach spécialisée dans l’orientation et la réorientation, nous vient en aide.
Pendant son parcours universitaire, il est tout à fait normal de douter. Et plus encore lorsque la période de stages débute : « Pour la première fois de sa vie, on quitte la théorie du monde académique et on se confronte à la réalité du travail, analyse Juliette Maillard Sobieski, coach spécialisée dans l’orientation. Or, n’importe quel secteur comporte de multiples facettes que l’on n’apprend ni en amphi, ni dans les livres. » Il n’est donc pas rare que l’idée qu’on se fasse d’un métier au moment des études diffère grandement de la réalité. « Ce n’est pas grave du tout ! », affirme la spécialiste. C’est même le but premier des stages : vérifier que la voie que l’on a choisie nous plaît vraiment avant de nous lancer dans la vie active. « Alors, plutôt que de paniquer, voyez ce moment de questionnement comme une chance : vous avez la possibilité de tester la réalité du terrain avant de l’intégrer. C’est l’occasion de découvrir un milieu dont on ignorait les subtilités, d’envisager des métiers et en déduire si cela est concluant ou non. »
Pour autant, il ne faut pas se perdre dans des questions existentielles au risque de s’étourdir. Voilà pourquoi plusieurs niveaux de réflexion existent. « Vos doutes concernent-ils vos capacités ? L’interprétation que vous faites de vos capacités ? Le métier ? L’environnement ? Remettez-vous en cause votre choix de stage, de formation, d’orientation ? », pose Juliette Maillard Sobieski. C’est important de comprendre d’où vient la déception avant de prendre de grandes décisions. « Parmi toutes ces interrogations, une chose est sûre : toute expérience est bonne à prendre. C’est même souvent celles qui ne se passent pas aussi facilement que prévu qui nous apprennent le plus dans la mesure où l’on ne se met en danger ni psychologiquement, ni physiquement. » Dans le cas où le doute est justifié, il faut pouvoir l’exprimer auprès de ceux qui vous accompagnent pendant ces quelques mois.
Exprimer ses doutes : une bonne chose pour votre orientation
Parler de ses doutes dépend de plusieurs facteurs, à commencer par la relation que l’on entretient avec son maître de stage. « Certains tuteurs ne sont absolument pas formés pour accompagner des stagiaires », révèle Juliette Maillard Sobieski. Cela peut jouer dans les questions que vous vous posez. Dans le cas où la relation est correcte (on ne va pas dire formidable car un stage qui pose problème est souvent lié à la dégradation de ce rapport, ndlr), la coach estime qu’aborder la question ne sera que positif.
En effet, formuler ses interrogations à voix haute permet d‘échanger sur la situation vécue, et donc de dire franchement ce que l’on ressent. Et qui de mieux que la personne chargée de vous accompagner pendant cet apprentissage pour l’évoquer ? D’abord, cela vous permettra d’obtenir un feedback de sa part. « Trop souvent, les maîtres de stage manquent de temps pour en faire, regrette Juliette Maillard Sobieski. Et cette absence de retour vient nourrir le manque de confiance en soi. » D’autant, qu’il n’est pas rare qu’une mauvaise interprétation vienne nourrir des doutes. Parler honnêtement avec son tuteur peut aider à clarifier une situation et votre esprit. « Il pourra alors vous dire ce qu’il en pense, si ce métier lui semble adapté à votre personnalité et à vos compétences. » Non pas du point de vue de vos capacités (puisque vous êtes encore dans une phase d’apprentissage), que votre potentiel, votre capacité d’apprentissage, ou votre caractère. « Après libre à vous d’écouter ou non son avis car il s’agit d’un seul et unique regard subjectif », conclut l’experte.
Si les doutes concernent davantage le métier ou votre secteur, en parler vous permettra de faire des ponts avec de nouvelles branches, de vous renseigner sur des pistes en lien avec la formation en cours. « Votre maître de stage peut aussi vous donner des idées de métiers dans le même secteur qui peuvent correspondre davantage à votre profil selon son expérience », poursuit la coach. Il peut aussi être intéressant de demander plusieurs avis en allant vers d’autres collègues en qui vous avez confiance. Pour non seulement multiplier les retours, mais aussi enrichir vos recherches. « Douter, c’est l’occasion rêvée pour interroger les gens qui vous entourent et poser le plus de questions possible pour vous faire votre avis. Car les feedbacks permettent presque toujours de s’ajuster, que ce soit dans la relation avec le maître de stage ou dans sa propre orientation. »
La bonne attitude à adopter
Comment aborder ce sujet sans être maladroit ? Il peut sembler parfois délicat d’admettre que l’on n’est pas certain de notre choix ou pas au bon endroit. « Rappelons qu’il ne s’agit pas ici de remettre en question le métier de votre maître de stage, précise Juliette Maillard Sobieski. Mais de poursuivre les recherches pour affiner votre orientation. »
1. Se poser les bonnes questions
Avant de parler de ses doutes et d’exprimer son besoin de feedback, il faut être honnête avec soi-même sur les raisons qui conduisent à la déception. Comment pourrais-je décrire cette expérience ? Pourquoi a-t-elle été négative ? Est-ce-que c’est l’environnement, le lieu, le tuteur, les missions qui ont péché ? « Une fois que vous avez trouvé le point de départ de votre introspection, vous allez pouvoir vous renseigner de manière claire et concrète », confirme l’experte. Et ainsi obtenir des réponses qui pourront véritablement vous aider dans votre cheminement.
2. Utilisez la communication non-violente
Encore une fois, pas question de rejeter l’activité de votre tuteur, de critiquer ses manières de travailler ou de vous former… Vous parlez de vous, de vos doutes vis-à-vis des missions, du secteur d’activité. « La pratique de la communication non violente (une méthode de communication basée sur l’empathie et la bienveillance créée aux États-Unis dans les années 70, ndlr) est essentielle, car c’est en parlant de votre ressenti personnel que vous allez exclure toute forme de jugement. Vous allez ainsi créer une discussion apaisée qui pourra déboucher sur une véritable aide de sa part. » Et n’oubliez pas aussi d’en profiter pour remercier ce dernier pour le temps qu’il vous consacre !
3. Poser des questions
L’idée, c’est de tirer profit de cette période de découverte pour vous renseigner au maximum. Vous ignorez si le travail que vous faites s’effectue de la même manière dans tous les environnements, si d’autres métiers dans ce même secteur seraient plus en phase avec votre personnalité ? Profitez-en pour poser ces questions aux collègues qui vous entourent ! « De manière générale mais aussi sur leurs propres expériences, leurs formations, ajoute Juliette Maillard Sobieski. Ils auront sûrement des conseils à vous donner et pourront peut-être vous inspirer. » Tout en gardant en tête, bien sûr, que le choix de votre orientation vous revient : personne ne peut décider à votre place.
4. Ne pas avoir peur
Si après votre petite enquête, vous réalisez que vous vous êtes décidément trompé de voie, n’ayez pas peur de vous réorienter. Parfois, on aime étudier un sujet sans pour autant vouloir exercer le métier pour lequel on se forme derrière : « L’important est surtout de s’autoriser à se poser ces questions pour gagner du temps. » Vous pouvez alors vous adresser à votre tuteur universitaire ou à la personne responsable de l’orientation dans votre école pour connaître la marche à suivre.
Il faut tirer profit de cette expérience et profiter de ce temps d’incertitude pour aller au bout de votre réflexion. Ce serait tout de même dommage de condamner son parcours avec fatalité lorsqu’on peut faire (à peu près) tout ce qu’on veut. Pas vrai ?
Article édité par Romane Ganneval ; photo de Thomas Decamps
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