Salaire, paysages, chocolats : travailler en Suisse un investissement à long terme ?
17. 1. 2024
7 min.
Vous envisagez de travailler en Suisse ? Vous n’êtes bien sûr pas le premier. En matière de stabilité économique, de qualité de vie et de salaires attractifs, difficile de faire mieux que les voisins helvétiques. Et cette situation attise forcément les convoitises. Mais que révèle vraiment le contexte économique suisse ? Comment saisir les opportunités qu'il offre, que vous soyez un expatrié ou un travailleur frontalier ? Découvrez comment comprendre le marché de l'emploi suisse et suivez nos conseils pour décrocher un travail dans l'un des pays les plus prospères du monde.
Travailler en Suisse : Les chiffres qui séduisent
Le PIB par habitant fait partie de ces critères qui démontrent la richesse et le dynamisme économique d’un pays. Et en Suisse, il crève les plafonds. Selon le FMI, le pays se classe 9e de la hiérarchie internationale sur cette statistique, certes battu par le Qatar (1er) ou le Luxembourg (3e), mais bien devant la France (23e) et même les États-Unis (12e). Le taux de chômage suisse est aussi une référence mondiale. Au 3e trimestre 2023, il s’établissait à 4,2% selon les données officielles.
De quoi faire rêver les responsables politiques en France, pays dont le taux de chômage se situe à 7,4% de la population active. La Suisse, c’est aussi l’un des états qui compte la plus forte proportion d’étrangers 24,9% en 2016 sur son territoire. Le nombre de travailleurs frontaliers, comprenez ces personnes qui travaillent en Suisse et vivent dans un autre pays, y est également important. 380 000 personnes ont une activité professionnelle dans le pays tout en résidant à l’étranger, soit 7,3% de la population active. Et devinez quoi, fin 2022, plus de la moitié de ces frontaliers venaient de… France. C’est dire les relations qui lie l’Hexagone à son riche voisin et donc les opportunités professionnelles qui peuvent s’ouvrir si vous décidez de passer la frontière.
Démarches administratives pour travailler en Suisse
En tant que Français, travailler en Suisse est relativement simple, du moins d’un point de vue administratif : il vous « suffit » de trouver un employeur. Vous obtiendrez alors un permis de séjour ou de travail, selon que vous choisissiez de vous expatrier ou de devenir un travailleur frontalier. Cette distinction est importante. Voici ce que chaque statut implique.
Expatriés :
Lieu de résidence : vous résidez en Suisse. Vous quittez donc la France pour vivre dans le pays, souvent pour une durée déterminée, qui peut être prolongée.
Permis de séjour : en tant que Français, vous bénéficiez d’un permis de séjour et de travail spécifique à la Suisse. Initialement, vous recevrez le permis B de résident temporaire, valable pour une année et renouvelable. Par la suite, vous pourrez obtenir le permis C de résident permanent, accessible après cinq ans de résidence en Suisse. Ce permis vous octroie une liberté de mouvement et de travail similaire à celle des citoyens suisses.
Frontaliers :
Lieu de résidence : vous résidez en France mais vous traversez la frontière pour aller travailler en Suisse.
Permis de travail : vous pouvez obtenir un permis G, c’est-à-dire un permis de travail frontalier en Suisse, si vous résidez près de la frontière suisse. Vous devrez alors démontrer que votre domicile est suffisamment proche pour permettre un trajet quotidien raisonnable. Pour un Français, l’obtention d’un permis G est un processus administrativement simple, à condition d’avoir une offre d’emploi valide en Suisse. Ce permis, valable un an, est renouvelable aussi longtemps que vous respectez les conditions d’emploi et de résidence.
Alors, quelle casquette choisir pour votre aventure suisse : celle de l’expatrié ou du frontalier ? C’est un peu comme choisir entre skier dans les Alpes ou se promener au bord du Lac Léman - les deux ont leur propre magie, et la décision peut avoir un impact significatif sur votre portefeuille. Voici les principaux avantages de chaque option.
Les avantages du statut d’expatrié
Intégration complète : vous vous immergez à 100% dans la culture et les langues suisses. Vous vous intégrez donc plus facilement socialement et professionnellement.
Accès à l’éducation et aux services de santé de qualité suisse : vous bénéficiez des systèmes éducatifs et de santé helvétiques, qui sont parmi les meilleurs au monde. La Suisse se classe par exemple à la première place mondiale du World Economic Forum en matière d’éducation. Pour la santé, la Suisse se situe également à la première place du classement international healthpowerhouse, qui évalue la qualité des systèmes de santé dans le monde.
-Stabilité et sécurité : vous profitez de la stabilité économique de la Suisse, ainsi que de sa sécurité. La Suisse figure dans le Top 10 des pays les plus sûrs du monde, selon le GPI score (comprenez l’indice global de paix) établi chaque année par l’organisation internationale Vision of humanity. Un classement reconnu mondialement et dans lequel la France se classe… 63e.
Les avantages du statut de frontalier
Coût de la vie moins élevé : vivre en France et travailler en Suisse est moins coûteux en termes de logement et de dépenses quotidiennes. Vous bénéficiez donc d’un double effet kiss cool, puisque vous profitez des salaires ultra compétitifs de vos voisins. D’après l’Insee, 60% des 115 000 travailleurs frontaliers de la région Auvergne-Rhône-Alpes sont employés à Genève et résident dans le département français 74. Le coût de la vie est en moyenne 30 à 60% plus élevé en Suisse qu’en France. En termes d’immobilier par exemple, le prix moyen au m2 est d’environ 5 000€ dans la région Haute-Savoie. Il dépasse 15 000€ à Genève.
Équilibre travail et vie personnelle : vous avez la possibilité de travailler dans un environnement économiquement robuste tout en préservant un mode de vie familial et culturel en France.
Sécurité sociale : vous pouvez choisir entre le système de sécurité sociale français (CMU) ou le système suisse (LAMal). Vous pouvez vous faire une idée de ce que vous coûterait chacun des systèmes selon votre situation personnelle en utilisant ce calculateur.
Les salaires et les secteurs qui recrutent en Suisse
En Suisse, le salaire moyen mensuel atteint 5 720€, un montant à comparer aux 2 520€ mensuels net en moyenne en France. À Genève, en 2024, le salaire minimum est établi à 4 215 francs suisses bruts par mois, soit environ 4 528€. Un travailleur frontalier à Genève peut ainsi espérer gagner près de trois fois le salaire minimum français pour un niveau d’études similaire. Cependant, il est important de considérer que le coût de la vie est plus élevé en Suisse, notamment à Genève, classée troisième ville la plus chère du monde. De manière générale, les salaires en Suisse varient largement selon les secteurs. Voici les 6 secteurs avec les salaires brut les plus élevés.
Salaires brut moyen en Suisse par secteurs d’activité (Source : OFS)
- Secteur bancaire et financier : 9 240€/mois
- Industrie pharmaceutique : 8 941€/mois
- Télécommunication : 8 527€/mois
- Activités informatiques : 8 476€/mois
- Recherche et développement scientifique : 8 453€/mois
- Industrie du tabac : 8 342€/mois
10 métiers recherchés en Suisse pour les étrangers
Dans le paysage dynamique et diversifié du marché du travail suisse, certaines professions se démarquent. Voici dix des métiers les plus recherchés en Suisse.
Spécialistes en technologies de l’information : les compétences en IT, comme le développement de logiciels, la cybersécurité, et l’analyse de données, sont très demandées.
Ingénieurs : particulièrement dans les domaines de la mécanique, de l’électronique, et du génie civil, en raison de l’industrie manufacturière avancée et de la construction.
Professionnels de la santé : médecins, infirmiers et autres professionnels de santé sont constamment recherchés, surtout dans un contexte de vieillissement de la population.
Spécialistes en finance et banque : la Suisse, étant un centre financier mondial, a une forte demande pour les professionnels de la finance, de la banque et de la comptabilité.
Experts en pharma et biotechnologie : la Suisse abrite de nombreuses entreprises pharmaceutiques et biotechnologiques de renom, générant une demande pour les chercheurs et les techniciens spécialisés.
Personnel hôtelier et restauration : avec son industrie touristique florissante, la Suisse recherche régulièrement des professionnels qualifiés dans l’hôtellerie et la restauration.
Enseignants et formateurs : les enseignants, en particulier dans les écoles internationales et les centres de formation professionnelle, sont en demande.
Business analyst : les consultants qui peuvent aider à optimiser les opérations et stratégies d’entreprise sont très recherchés.
Professionnels du marketing et de la communication : avec l’évolution du marché numérique, les spécialistes du marketing numérique, les communicateurs et les créateurs de contenu ont des opportunités croissantes.
Personnel qualifié dans les métiers spécialisés : comme les électriciens, les plombiers et les mécaniciens, en raison d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans certains métiers techniques.
5 conseils pour rechercher efficacement un emploi en Suisse
1. Rédigez un CV à la Suisse
En Suisse comme en France, rédiger un CV est un exercice de précision et de concision. Pas plus de deux pages. N’oubliez pas d’inclure une photo professionnelle, une pratique courante en Suisse. Mettez en avant vos compétences linguistiques, surtout si vous parlez français, allemand, italien ou romanche. Vous postulez dans un pays multilingue, alors savoir parler plusieurs langues est un atout plus déterminant encore qu’en France.
2. Ciblez les bonnes régions
Ciblez des emplois où votre maîtrise du français est un atout. C’est particulièrement le cas dans les cantons francophones comme Genève, Vaud, ou Neuchâtel. Dans les régions de Bâle ou de Zürich, vous êtes en Suisse alémanique. Forcément, votre maîtrise du français y sera (beaucoup) moins recherchée. Les sites d’emploi suisses les plus connus sont JobUp.ch, Jobs.ch, et indeed.ch.
3. N’arrivez pas en retard !
Ce n’est pas forcément une bonne pratique non plus d’arriver en retard pour un entretien d’embauche en France, mais en Suisse un tel écart est tout simplement éliminatoire. Les entreprises helvétiques valorisent la ponctualité, la fiabilité et la discrétion. Dans votre recherche d’emploi et vos entretiens, montrez que vous partagez ces valeurs.
4. Soyez patient dans le processus de recrutement
En Suisse, les processus de recrutement peuvent être long, en tout cas plus qu’en France. Les employeurs ont tendance à adopter une approche méticuleuse et détaillée. Cela inclut des vérifications approfondies des références, des diplômes et des antécédents professionnels. Il n’est pas rare non plus en Suisse d’avoir plusieurs tours d’entretiens, y compris avec différents niveaux hiérarchiques. Les entreprises suisses sont prudentes en ce qui concerne le respect des lois et réglementations, ce qui peut nécessiter un temps supplémentaire pour les vérifications légales et administratives, surtout pour les candidats étrangers. Ne vous découragez pas pour autant, le jeu en vaut la chandelle !
5. Soyez prêt à travailler plus !
En Suisse, la législation fixe une limite à la durée de travail hebdomadaire, oscillant entre 45 et 50 heures. Cependant, grâce aux accords établis par les conventions collectives, la durée moyenne de travail effectivement observée en Suisse se situe autour de 42 heures par semaine. On est quand même largement au-dessus des 35 heures en France. Les Suisses disposent également d’une semaine de congés payés en moins qu’en France (4 semaines minimum pour les plus de 20 ans en Suisse soit 20 jours ouvrables contre 5 semaines soit 25 jours ouvrables en France). Mais certains employeurs peuvent offrir plus que le minimum légal, en particulier pour les employés de longue date ou à des postes supérieurs.
Travailler en Suisse en tant qu’étranger, c’est la promesse de salaires attractifs et d’une qualité de vie élevée. Que vous choisissiez de devenir expatrié ou frontalier, les opportunités pour les Français sont nombreuses, surtout si vous êtes un employé qualifié. Pour trouver votre voix sur le marché de l’emploi helvétique, il est néanmoins nécessaire de comprendre ses codes et ses normes. Alors, êtes-vous prêt à franchir le pas et à explorer ce que la Suisse a à offrir ? Ou peut-être envisagez-vous d’autres destinations pour votre carrière internationale comme Montréal ou Bruxelles ?
Article édité par Manuel Avenel, photo Thomas Decamps pour WTTJ
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