Entretien d'embauche : 6 pièges à éviter lors de la négociation salariale

Jun 11, 2024

6 mins

Entretien d'embauche : 6 pièges à éviter lors de la négociation salariale
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Sarah Torné

Rédactrice & Copywriter B2B

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Lors de l’entretien d'embauche, les échanges liés au salaire comptent parmi les moments les plus redoutés par les candidats. Tabou français par excellence, un faux pas est si vite arrivé lorsqu'il s'agit de parler « argent ». Mais quelles sont ces fameuses erreurs à éviter quand on négocie sa rémunération ? Et y a-t-il ou non un guide de bonnes pratiques à suivre pour se tirer avec brio de ce moment clé ?

Selon une étude de l’Apec publiée en octobre 2023, 6 cadres sur 10 cherchent à négocier leur salaire lorsqu’ils changent d’entreprise. Cependant, les femmes cadres saisissent cette opportunité moins souvent que leurs homologues masculins (55 % contre 61 %). De plus, de nombreux cadres hésitent à négocier, car ils pensent que leur profil ne présente pas les atouts suffisants : 20 % des femmes et 7 % des hommes partagent ce sentiment. Une réticence qui est en partie due à un manque de confiance en soi. Heureusement, la négociation salariale est une compétence comme une autre : elle s’apprend. Voici les conseils de Léo Bernard et Virgile Raingeard pour vous préparer au mieux, afin d’éviter les pièges classiques et vaincre les idées reçues.

Faux pas n°1 : ne pas connaître sa valeur sur le marché

Parmi les erreurs les plus fréquentes en entretien d’embauche, le manque de préparation est de loin la plus courante. « Trop souvent, les candidats débarquent en entretien sans avoir la moindre idée des salaires pratiqués dans leur secteur. C’est presque impardonnable de ne pas arriver sans avoir tenté de chercher au préalable ! », considère Virgile Raingeard, CEO du logiciel de gestion des rémunérations Figures. Camille, 28 ans, responsable marketing, l’a vécu pour son tout premier job : « Je me suis retrouvée à bégayer quand on m’a demandé mes prétentions salariales en premier entretien. Je ne pensais pas qu’on en parlerait aussi tôt, je n’avais aucune idée des standards de l’industrie… Alors, j’ai dit un chiffre au hasard. » Un moment gênant qui aurait pu être évité avec un minimum de préparation. « Le pire, c’est lorsque je suis arrivée en fin de processus. On m’a fait une proposition avec un salaire supérieur à ma prétention. J’ai su que je m’étais plantée, et que j’aurais pu demander plus. »

Le conseil de l’expert : pour Virgile Raingeard, la clé est de bien se renseigner avant l’entretien. « On peut partir de son salaire actuel et dire “J’aimerais gagner plus par rapport à ça”. Mais je trouve plus rationnel de se baser sur des données de marché, comme les études de cabinets de recrutement ou d’autres offres d’emploi. Ces informations peuvent aider à définir une fourchette salariale réaliste et justifiée, tout en rendant la discussion plus objective et professionnelle. » Léo Bernard recommande, quant à lui, de faire des entretiens régulièrement pour rester informé et mieux connaître les attentes du marché. « Passer des entretiens même sans être en recherche active vous aide à vous familiariser avec les tendances salariales et à affiner vos arguments. Vous serez ainsi mieux préparé lorsque vous déciderez de changer de poste », pose-t-il.

Faux pas n°2 : ne pas oser négocier

Il existe une idée reçue persistante selon laquelle négocier son salaire serait mal perçu. Cette croyance conduit souvent les candidats à hésiter ou à donner des réponses floues lorsqu’ils abordent le sujet de la rémunération. En réalité, cette hésitation peut (littéralement) coûter très cher. Aux yeux de Léo Bernard, cette réticence est en grande partie culturelle : « En France, l’argent fait partie des grands tabous, au même titre que la politique ou la religion. Cela rend les gens mal à l’aise lorsqu’il s’agit de parler de leur salaire. » Même son de cloche du côté de Virgile Raingeard : « La négociation, c’est une compétence. Or certains la voient comme une forme de conflit qui les met mal à l’aise. Tout le monde réalise que c’est important, mais n’a pas pour autant envie de le faire. »

Le conseil de l’expert : pour dépasser ce tabou français et surmonter cette appréhension, Léo Bernard conseille de s’entraîner à négocier avec assurance : « La clé est de se préparer et de s’exercer. Vous devez savoir ce que vous valez et être prêt à le défendre. » Et une fois face au recruteur, notre expert vous encourage à être honnête dès le premier entretien, avec une affirmation du type : « Si on ne peut pas me garantir minimum X, alors autant ne pas perdre de temps. »

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Faux pas n°3 : ne pas parler « la même langue » que le recruteur

Léo Bernard pointe également du doigt ce piège courant lors des discussions salariales. « Les candidats pensent souvent en net mensuel, tandis que les entreprises parlent en brut annuel », complète l’expert. Une différence de terminologie qui peut créer de fâcheux malentendus. Mais ce n’est pas tout, d’autres différences de langage peuvent également semer la confusion. Par exemple, certains candidats mentionnent leur salaire sans inclure les primes ou les avantages en nature, tandis que les employeurs incluent tout dans leur calcul. De même, parler de salaire fixe sans prendre en compte les bonus potentiels peut induire en erreur. Marie, 30 ans, juriste, se souvient d’un entretien particulièrement délicat : « Lors de la troisième phase de l’entretien, on m’a demandé quel était mon salaire actuel. J’ai répondu en donnant mon salaire fixe, sans mentionner mes primes annuelles. L’employeur a donc sous-estimé ma rémunération globale et m’a fait une proposition bien inférieure à ce que je gagnais. »

Le conseil de l’expert : pour éviter ce genre de désagrément, Léo Bernard suggère : « Soyez clair et précis sur vos attentes. Convertissez toujours vos chiffres en brut annuel. Incluez également toutes les composantes de votre rémunération, comme les primes et les avantages. » En vous assurant de parler le même langage que votre interlocuteur, vous éviterez les quiproquos et faciliterez la négociation.

Faux pas n°4 : dévoiler sa rémunération actuelle

Virgile Raingeard est catégorique : « Il n’y a aucune raison valable de demander à un candidat combien il gagne dans son poste actuel. Répondre à cette question ne peut que servir l’employeur » Et pour cause, si les entreprises demandent souvent le salaire actuel, c’est pour mieux ancrer la négociation. « Le premier chiffre mentionné sera celui autour duquel on va graviter pendant toute la négociation », illustre ainsi le CEO de Figures. Une pratique qui pourrait, néanmoins, être bientôt interdite grâce à la directive européenne sur la transparence des rémunérations.

Le conseil de l’expert : d’ici là, comment vous en sortir dans un tel contexte ? À cette fameuse question, l’expert conseille de reporter la responsabilité de la négociation sur le recruteur. « J’ai vu des postes similaires rémunérés entre “X” et “Y”. Cela me semble donc être une bonne fourchette. Mais je suis curieux de voir comment vous vous positionnez et comment vous vous assurez que les personnes soient rémunérées de manière équitable. », propose notamment comme réponse Virgile Raingeard.

Faux pas n°5 : oublier les « à-côtés »

Se focaliser uniquement sur le salaire et oublier de négocier les avantages périphériques peut être une erreur stratégique. « De nombreux candidats se concentrent exclusivement sur le salaire de base, oubliant qu’il existe une multitude d’avantages supplémentaires à négocier », souligne à ce propos Léo Bernard. Or, ces fameux avantages peuvent être l’objet de concession face à une proposition de rémunération un peu plus faible que ce que vous espériez. «Il faut savoir flairer ces opportunités », ajoute notre expert. Ces autres avantages à considérer incluent notamment les primes d’intéressement et de participation, les actions ou stock-options, une mutuelle de qualité, ou encore des plans d’épargne entreprise (PEE) et des plans d’épargne pour la retraite collectif (PERCO). N’oubliez pas les avantages en nature comme une voiture de fonction, le remboursement des frais de transport, les tickets restaurant, ou un environnement de travail agréable avec des installations, comme des salles de sport ou des services de garde d’enfants.

Le conseil de l’expert : «Si en phase de négociation vous savez que vous êtes coincé sur le salaire (parce que vous ne pouvez pas demander plus), pensez à demander d’autres avantages. Parfois, des modifications contractuelles peuvent compenser une rémunération plus basse », propose notre expert. Par exemple, négocier des jours de télétravail, des formations professionnelles, des jours de congé supplémentaires ou des horaires flexibles peut ajouter une valeur significative à votre package global.

Faux pas n°6 : se braquer face à une proposition inférieure

Recevoir une proposition salariale inférieure à ses attentes peut être décevant, mais savoir y répondre de manière appropriée est crucial pour ne pas compromettre ses chances d’obtenir le poste. Il s’agit de trouver un équilibre entre exprimer ses besoins et rester ouvert à la négociation. Une attitude adoptée par Marie, après s’être emmêlée les pinceaux sur son package salarial à date. « J’ai dû expliquer la situation et montrer que ma rémunération incluait des primes substantielles. Ils ont compris et ajusté leur offre, mais cela a créé un moment de flottement qui aurait pu être évité. » Un seul mot d’ordre : pas question de vous « brader ». « Si vous savez que votre profil est recherché, n’hésitez pas à demander ce que vous valez vraiment - y compris si c’est bien supérieur à votre rémunération actuelle », insiste Léo Bernard.

Le conseil de l’expert : là encore, les données marché seront vos alliées. « Expliquez par A + B, de manière factuelle, en quoi cela ne correspond pas », ajoute Virgile Raingeard. En présentant des arguments rationnels et bien fondés, vous avez de meilleures chances d’obtenir une réévaluation de l’offre initiale. Pour Léo Bernard, il est également question d’opportunités. Si vous avez vraiment envie de travailler dans cette entreprise et que d’autres avantages sont négociables, des concessions peuvent être envisagées. Dans le cas contraire, notre expert est clair : « Ne lâchez rien ! Si le processus a été long et qu’il n’y a pas trop de candidats en face, ou si vous n’avez pas de pression financière : c’est le moment de négocier fermement. »

Maîtriser l’art de la négociation salariale demande de la préparation, de la stratégie et un peu de finesse. En évitant les erreurs courantes et en adoptant les bonnes pratiques, vous pourrez aborder ces discussions cruciales avec confiance et réussir à obtenir la rémunération que vous méritez.


Article rédigé par Sarah Torné et édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.