Entretien d'embauche : comment apporter des idées sans passer pour un prétentieux ?
Jun 13, 2024
4 mins
Le processus de recrutement est un moment excitant (si on vous jure !), pour peu qu’on ait très envie d’intégrer l’entreprise ! Parfois, notre enthousiasme est tel qu’on développe déjà des idées pour imprimer sa patte dans la culture, la stratégie ou les produits de l’entreprise avant même de savoir si on va l’intégrer. S’il peut être tentant de proposer nos nouvelles idées aux recruteurs pour briller et se démarquer, est-ce toujours une bonne idée ? Ne risque-t-on pas de paraître prétentieux ? Et si on se lance, comment bien s’y prendre ?
Soumettre des idées nouvelles, un avantage concurrentiel !
En tant que candidat, on peut avoir peur d’être noyé parmi des profils relativement similaires, l’enjeu est donc de pouvoir se distinguer des autres. Or, en proposant des idées nouvelles, c’est votre propre intelligence qui parle, celle que vous avez construite grâce à votre formation, vos expériences et vos convictions. Pour Amélie Favre Guittet, cofondatrice de Talent Management Groupe, proposer des idées nouvelles c’est influencer positivement votre recruteur… et donc vous démarquer ! « En tant qu’êtres humains, on est attirés par ce qui est neuf ! Si un candidat est assez malin pour capter l’attention du recruteur de cette façon, cela permet de créer une sorte de biais qui fait qu’il est déjà en train de s’imaginer avec vous dans l’entreprise ! À travers la proposition d’idées, vous l’aidez à se projeter ! »
Proposer des idées nouvelles, c’est aussi montrer concrètement son potentiel proactif. C’est-à-dire sa capacité à prendre des initiatives, à innover sans attendre qu’on ne le demande. Ces propositions nouvelles supposent, en effet, que vous ayez pris le temps de faire des recherches pour mieux vous imprégner du contexte de l’entreprise et des éventuels défis auxquels elle fait face. Amélie Favre Guittet, nous rappelle l’importance de la curiosité intellectuelle. « En faisant ce type de recherches liées à l’actualité, vous pouvez par exemple indiquer que vous êtes au courant de la mise en place d’une nouvelle loi et montrer que vous vous interrogez déjà sur l’impact qu’elle aura sur votre métier ou secteur. Si vos propositions sont basées sur ce type de recherches, alors ça ne devient que du bonus ! »
Néanmoins, tout n’est pas si simple, et il existe un écueil principal. Le risque est de tomber dans une sorte de « syndrôme du sauveur », animé par un désir sincère de faire bouger les choses, on peut parfois être maladroit et donner l’impression qu’on veut repenser le fonctionnement de l’entreprise du sol au plafond. Si vous débarquez en entretien, et qu’au milieu de la conversation, vous proposez de refondre complètement le fonctionnement du service, ou que vous critiquez allègrement la stratégie marketing actuelle de l’entreprise, il y à fort à parier pour qu’on vous prenne pour un « monsieur ou madame Je sais tout ».
Alors, comment faire pour oser proposer des idées nouvelles sans risquer de froisser nos interlocuteurs ?
Se préparer, c’est la clef ! « Les négociateurs du RAID disent qu’une négociation réussie, c’est 80 % de préparation », rappelle Amélie Favre Guittet. Et partager votre éclair de génie à l’entreprise dont vous rêvez ne fait pas exception.
Jauger le contexte de l’entreprise et du poste
On pourrait être tentés de penser que la première information à avoir en tête, c’est le niveau de séniorité du poste. Il va de soi que si vous postulez à un emploi nécessitant davantage d’expérience avec une dimension stratégique mentionnée dans la fiche de poste, il sera plus facile d’oser partager ses idées ! Ce sera sans doute attendu. Mais pour Amélie Favre Guittet, même les plus juniors peuvent se permettre de proposer des idées ! À condition… de bien stalker l’entreprise et de se préparer !
Stalker pour mieux régner
Pour proposer des idées pertinentes, en lien avec les défis de l’entreprise, il est d’autant plus nécessaire de bien comprendre le besoin et les défis auxquels vous pourriez être confrontés. « Et ce quel que soit votre poste et votre expérience. Vous avez forcément un rôle à jouer ! rappelle Amélie. En tant que RH on regrette souvent que les candidats ne se renseignent pas sur l’entreprise donc lorsqu’un candidat le fait, forcément on est charmés ! » Après la préparation, vient l’action !
S’adapter à son interlocuteur en restant attentif au non verbal
Si vous constatez que votre enthousiasme est partagé et que votre interlocuteur engage la conversation et se montre ouvert alors la situation vous est favorable. Mais ce n’est pas toujours le cas. Comme le précise Amélie Favre Guittet « Vous pouvez aussi vous retrouver face à un interlocuteur qui est plutôt du style à vouloir poser une liste de questions très précises et strictes. Dans ce cas, il restera dans sa ligne de conduite ». Rien ne sert donc de « forcer le passage », ça ne sera pas entendu. Il faut vous adapter à votre interlocuteur. De toute façon, le processus de recrutement est aussi l’occasion de savoir si on veut évoluer dans le contexte qu’offre l’entreprise donnée. « Si vous êtes face à quelqu’un de réticent, c’est une indication en soi, est-ce que vous souhaitez vraiment évoluer dans un contexte qui laisse peu de place à la proposition d’idées nouvelles ? »
Y aller pas à pas et passer par le questionnement
Ce qui est intéressant pour le recruteur ce n’est pas que vous « étaliez » votre science et qu’il reparte avec un plan d’action gratuit, mais de voir votre capacité de réflexion… et pour bien réfléchir, il faut poser des questions ! C’est par le questionnement que vous pourrez valider (ou non) votre compréhension du contexte et impliquer votre interlocuteur dans la discussion. « il faut mettre en avant l’idée de la co-construction, être dans l’échange plutôt que dans le déballage intempestif. Mieux vaut proposer une première idée et voir comment l’autre réagit. » Amélie Favre Guittet met également en garde les profils plus seniors : « Les plus expérimentés ont tendance à expliquer quelque chose en utilisant 1 milliard d’exemples pour prouver leur expertise et rassurer leur interlocuteur. Mais il vaut mieux suggérer davantage plutôt que de dérouler toute la stratégie. Signez d’abord mon contrat et après je vous en dirai plus ! »
Proposer des idées nouvelles, ce n’est pas un exercice évident, mais avec de la préparation et en gardant une posture humble, cela peut donner une toute autre dimension à vos entretiens ! Amélie Favre Guittet nous livre le mot de la fin : « En 20 ans de carrière en recrutement, je n’ai quasiment jamais vu de candidat faire preuve de ce niveau de curiosité intellectuelle. Ce qu’il faut garder en tête c’est que l’entretien c’est votre moment, quand vous arrivez à en maîtriser les codes, vous êtes les reines et rois du monde ! »
Article rédigé par Clémentine Buisson et édité par Gabrielle Predko, photo de Thomas Decamps
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