Feedback post-entretien : 6 points clés pour améliorer l'expérience candidat

10 jul 2024

6 min

Feedback post-entretien : 6 points clés pour améliorer l'expérience candidat
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Laure Girardot

Rédactrice indépendante.

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Dans le domaine du recrutement, le feedback aux candidats après un entretien est souvent délaissé. Pourtant, cette pratique est cruciale pour la réputation des entreprises aux yeux des postulants, pour l’amélioration de leur employabilité et pour le renforcement d’une image de marque employeur positive. Lumière sur les motifs pour lesquels un retour systématique est essentiel et comment il peut être implémenté efficacement.

L’expérience des candidats s’impose désormais comme un pilier de l’identité de marque employeur. Séduire les talents ne se limite plus aux perspectives offertes, mais aussi à la qualité du traitement des candidats durant l’ensemble du processus de recrutement. Le retour après entretien constitue un jalon essentiel pour créer une expérience enrichissante et humaine, plutôt qu’un rituel de passage. Cependant, les statistiques révèlent une réalité bien différente : 79 % des candidats indiquent avoir déjà participé à un entretien sans jamais recevoir de retour.

Pourquoi cette étape -qu’elle soit positive ou négative- est-elle négligée par les recruteurs ? Est-ce en raison de contraintes liées à la rentabilité ? Ou bien l’importance de cette pratique n’est-elle pas clairement établie ? Alors que certains recruteurs considèrent que cela ne fait pas partie de leurs prérogatives, d’autres y voient une opportunité d’enrichir l’employabilité des candidats. Nos experts Marie-Sophie Zambeaux et Léo Bernard soulignent, quant à eux, l’importance de cette pratique et partagent leurs stratégies pour en faire une expérience d’apprentissage mutuel.

Feedback : nouveau barycentre d’une expérience candidat réussie ?

Selon 87 % des candidats, la manière dont est mené un processus de recrutement reflète le traitement des employés au sein de l’entreprise. Le retour auprès des postulants, en particulier, est vu comme une pratique bénéfique et influente selon nos experts. Pourquoi cette perception ?

Renforcement de la marque employeur

Une expérience négative peut avoir de lourdes conséquences : 92 % des candidats partagent leurs mésaventures avec leur entourage. À l’ère numérique, les critiques sur des plateformes telles que Glassdoor peuvent durablement ternir l’image de l’entreprise. Offrir un retour constructif peut transformer une situation potentiellement défavorable en une occasion d’améliorer la perception de l’entreprise. « Les organisations qui prennent le temps de mener un feedback à leurs candidats ont saisi l’importance de valoriser l’expérience des candidats et les impacts positifs sur leur réputation et leur marque », explique Marie-Sophie Zambeaux. Elle cite le processus de recrutement d’Alan, loué par Élise Moron sur LinkedIn pour son retour « ultra détaillé et bienveillant qui met en valeur ses atouts, mais fait passer le message malgré tout ». La candidate -non retenue- conclut son message en remerciant Alan.

Maintien de la relation avec les candidats

Négliger de répondre aux candidats après un entretien peut les éloigner définitivement de l’entreprise. En effet, neuf mauvaises expériences de recrutement sur dix génèrent des réactions négatives. Selon la même enquête, 57 % des personnes interrogées indiquent que cela détériore l’image de l’entreprise. Pire, 58 % des candidats partagent leur déception, répandant ainsi une image négative au sein de leur réseau, qui pourrait inclure de futurs candidats potentiels. C’est une perte considérable quand on sait que le pourcentage de salariés français retournant travailler pour une entreprise où ils ont déjà été employés a grimpé de 36 % entre 2020 et 2023, selon un baromètre de l’emploi LinkedIn. Le feedback témoigne d’un respect envers les candidats, essentiel pour construire un réservoir de talents pour l’avenir.

Valorisation des talents et répercussions sociales

Offrir un retour personnalisé et utile est une marque de respect, valorisé par 89 % des candidats d’après une étude RegionsJob de 2016. En effet, refuser un candidat en expliquant les raisons est crucial pour son développement professionnel. « Certaines entreprises rémunèrent leurs recruteurs pour attirer et sélectionner les meilleurs talents, rien de plus. Leur approche ? Prioriser les besoins de l’organisation plutôt que les attentes des candidats », note Marie-Sophie Zambeaux. Cependant, ce minimalisme compromet la mission sociale du recruteur : guider et conseiller les candidats dans leur carrière, au-delà du poste proposé. Cette démarche valorise également la réputation des RH en tant que partenaires fiables et soutenants. « Prendre le temps de conseiller les candidats, de clarifier les raisons d’un refus et de suggérer des pistes d’amélioration est crucial. Toutefois, peu de recruteurs adoptent cette posture de coach », souligne-t-elle.

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6 commandements pour créer un feedback candidat à fort impact

Commandement n°1 : l’entretien structuré, le prérequis à un feedback juste

« Personne n’apprécie de donner un retour, particulièrement lorsqu’il est négatif », admet Léo Bernard. Pour s’y préparer et offrir des feedbacks précis et équitables, il est crucial de se baser sur des critères objectifs, tels que ceux énoncés dans une grille d’évaluation de recrutement. De son côté, Marie-Sophie Zambeaux souligne l’importance d’un feedback post-entretien fondé sur l’entretien structuré : « Cela permet de fournir des retours explicites et objectifs, rendant plus aisée l’explication des raisons d’un refus par exemple. On peut mettre en exergue les critères non atteints ou comparer les réponses données à celles attendues. » Le recruteur peut donc facilement aborder les questionnements des candidats relatives au poste, réduisant ainsi tout risque de suspicion de discrimination ou de biais.

Commandement n°2 : le feedback, c’est pas automatique

Faire un retour ne doit pas être perçu comme un acte systématique. Comme l’indique Marie-Sophie Zambeaux, il est crucial de solliciter l’accord du candidat avant de procéder : « Recevoir des critiques peut être intrusif et parfois perturbant. Il est donc essentiel de vérifier que la personne accepte cette démarche. » Il est également important de déterminer le moyen de communication préféré du destinataire : certains sont plus réceptifs à l’écrit, alors que d’autres privilégient un échange en face à face. Cependant, 84 % des candidats préfèrent recevoir des retours par téléphone plutôt que par courriel, exprimant le désir d’un dialogue ouvert et sincère sur leur performance. Léo Bernard confirme : « L’oral est moins sujet à interprétation. Même par message vocal, de manière asynchrone, il est possible de réaliser un retour efficace en invitant la personne à nous recontacter au besoin. Toutefois, pour certains entretiens avancés dans le processus - tels que ceux avec le PDG -, il est recommandé de les réaliser en personne, car le candidat a investi du temps pour se déplacer et rencontrer son interlocuteur. C’est une forme de respect. »

Commandement n°3 : à chaud, à froid, délai de réponse… les invariants du feedback

Léo Bernard souligne que la réalisation de feedbacks, qu’ils soient immédiats ou différés, exige de la transparence. Lors d’un retour immédiat, à chaud : « Si le candidat ne répond pas aux attentes ou seulement partiellement, il faut clarifier les zones d’incertitude tout en l’encourageant à se perfectionner. Cela s’applique au poste en question, ou à d’autres opportunités si le recruteur décide de ne pas poursuivre avec lui. » Concernant les retours différés -à froid- il est recommandé de les fournir dans un délai de 48 heures, selon l’expert. En effet, 79 % des candidats estiment que le délai d’attente acceptable après une candidature varie entre trois et quatorze jours. Il est vital de structurer le feedback de manière détaillée et constructive en fournissant des recommandations pratiques pour favoriser l’évolution du candidat. « Cette méthode contribue à solidifier la relation de confiance entre le recruteur et le candidat », poursuit notre expert et formateur en recrutement.

Commandement n°4 : recruter, c’est coacher

Marie-Sophie Zambeaux et Léo Bernard mettent en avant l’importance d’adopter une posture de coach lors des retours. « Le coaching va au-delà de la simple explication des raisons techniques pour lesquelles un candidat n’a pas été retenu », insiste Marie-Sophie Zambeaux. L’experte en recrutement met l’accent sur les aspects comportementaux et les compétences interpersonnelles, tels que la clarté de l’expression, la précision des informations, ou encore la manière de structurer les réponses. « Il faut préciser les aspects à améliorer et offrir des conseils pour les futurs entretiens, que ce soit dans l’entreprise actuelle ou ailleurs », poursuit-elle. En consacrant du temps à développer l’employabilité de tous les candidats, qu’ils soient retenus ou non, le recruteur joue un rôle social important, influençant potentiellement leur parcours professionnel. « Il est également bénéfique de fournir des outils concrets d’amélioration, en recommandant par exemple des ressources utiles telles que des livres ou des formations. »

Commandement n°5 : le feedback, ce catalyseur d’une relation féconde entre talents et entreprises

Un refus après un entretien ne signifie pas nécessairement la fin d’une opportunité, surtout dans le contexte actuel. En offrant un retour constructif et bienveillant, l’entreprise initie le début d’une relation durable avec le candidat. Cette approche peut inciter les talents à postuler de nouveau, enrichissant ainsi l’entreprise de leur expérience et de nouvelles compétences acquises. Le recrutement doit être envisagé comme un dialogue continu, susceptible de reprendre à tout moment, et un feedback adéquat sert de catalyseur pour de futures collaborations. En termes de pratique, pour les candidats ayant progressé dans le processus, pourquoi ne pas envisager un rendez-vous dans six mois ou un an ? Cette démarche permet de maintenir la porte ouverte et de transformer ce moment potentiellement difficile en une perspective plus positive. Certaines entreprises renforcent ce lien en proposant une newsletter dédiée aux candidats. Dans cet article, Aurore Baudry, Head of Talent chez Foodles, révèle maintenir le contact avec plus de 21 000 talents grâce à une newsletter qui, avec douze éditions annuelles et un taux d’ouverture de 63 %, a déjà contribué au recrutement de 123 candidats.

Commandement n°6 : le principe des feedbacks réciproques

En symétrie, encourager les candidats à exprimer leur avis sur le processus de recrutement est déterminant pour créer un échange bénéfique et enrichir l’expérience de tous les intervenants. « En sollicitant un retour d’expérience des candidats, que ce soit par des questions ciblées lors de l’entretien ou via un questionnaire de satisfaction, les recruteurs peuvent recueillir des informations précieuses pour améliorer continuellement leurs méthodes », déclare Marie-Sophie Zambeaux. L’intégration de ces retours permet d’ajuster les pratiques de recrutement afin de les rendre plus efficaces et respectueuses. Le feedback mutuel favorise alors un environnement de recrutement transparent et en constante évolution, essentiel dans un monde professionnel qui change continuellement.
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Article rédigé par Laure Girardot et édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.

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