Témoignage et conseils de Gaspard, consultant senior
09 sept. 2018
5min
GA
Être consultant, c’est exercer plusieurs métiers à la fois, ce qui distingue cette profession éminemment difficile (et parfois jugée “fourre-tout”) à cerner pour ceux qui ne l’ont pas pratiquée.
Consultant de carrière depuis 12 ans, je ne suis toujours pas lassé car j’estime que l’on joue avec plusieurs casquettes, plusieurs métiers, et parfois dans une seule et même journée ! __Je vous livre ci-dessous un petit tour d’horizon des divers métiers que je suis amené à exercer.
Les divers métiers du consultant
En tant que consultant, je suis d’abord et avant tout une petite main qui aide dans la formalisation et le delivery. Que le consultant travaille dans le domaine stratégique (ex. McKinsey, BCG, Bain) ou dans le management consulting (ex. Big Four, comme Deloitte, KPMG), l’intégration de systèmes (ex. Accenture, Capgemini) ou dans un domaine conseil niche (ex. Big data, data science en général), le consultant est celui qui formalise dans un livrable ou une présentation les résultats d’une mission (stratégie, besoins fonctionnels, audit, diagnostic, benchmark…). Plusieurs jours sont nécessaires pour atteindre un niveau de qualité et un caractère auto-porteur, à l’issue de plusieurs itérations. Aujourd’hui à un niveau un peu plus senior, je passe deux tiers de ma semaine dans le delivery. Au départ, il est important de se former avec des formations comme la résolution de problèmes, l’analyse, etc.
Expert
Je suis aussi expert dans un domaine, fonctionnel ou dans une industrie. Certes, beaucoup d’entre nous sommes généralistes, mais nous avons tous un domaine d’expertise. À titre d’exemple, je suis expert dans la transformation des organisations, surtout via le digital, avec une focalisation sur les organisations du service public. À cet égard, je peux donner d’autres exemples de transformations réussies, partager des bonnes pratiques en matière d’organisation, d’expérience utilisateur, d’agilité, etc.
Dans le cadre de plusieurs projets pour des organisations de service public, j’ai parlé de la notion d’expérience utilisateur, où il s’agit de faire un design sur du papier pour imaginer quelle serait l’interface et l’expérience la plus pertinente pour moi en tant que segment d’utilisateur. Je pose des questions comme « quel est votre objectif stratégique ? » ; « comment préférez-vous voir vos priorités et alertes ? », etc. Il n’y a pas de secret, il faut, pour devenir expert, lire énormément de recherche sur le sujet (Linkedin a plein d’articles intéressants) et suivre l’actualité de son industrie (pour ma part, la transformation digitale des administrations).
Coach
En tant que consultant, je suis parfois aussi un coach. Plusieurs exemples me viennent à l’esprit. J’ai eu des clients qui ont parfois manqué de confiance en eux, y compris à des postes de management. Le consultant senior, de par son expérience acquise sur des projets similaires, peut jouer un rôle de coach pour encourager son client à prendre des décisions, sans pour autant se substituer à lui. J’ai de nombreuses fois aussi conseillé sur les compétences requises par les membres d’une équipe chez le client, par exemple en précisant qu’ils leur manquaient une compétence d’analyse métier pour bien comprendre et challenger le métier sur ses besoins et processus, dans l’objectif d’apporter des simplifications et des solutions.
J’ai également proposé d’effectuer des changements de rôles pour certains postes afin d’optimiser l’équipe dans sa globalité, par exemple en plaçant le chef de projet dans un rôle d’expert alors qu’il est remplacé par un membre beaucoup plus leader. Pour devenir coach, il faut souvent observer ses seniors, et en particulier ceux qui ont le plus d’intelligence émotionnelle, qui sont capables de persuader des clients. Il faut, pour réussir à être coach, faire preuve d’empathie en permanence, en se mettant à la place d’autrui.
Mentor
Je joue aussi le rôle de mentor, notamment auprès de mes collègues plus juniors. Je passe plusieurs heures par semaine à donner des conseils à mes équipes, allant de la revue de livrables à des conseils pour progresser au sein de la structure (performance et promotion), aux possibilités de formation, etc. C’est un rôle qui me tient personnellement à cœur, car je peux aider au développement de la carrière de mes collègues. Au-delà de l’observation, il existe des formations à la capacité à faire du mentorat. Des actions de bénévolat dans des organismes, comme Passeport avenir ou au profit de l’Institut Télémaque pour soutenir des collégiens et lycéens de zones d’éducation prioritaire, permettent de se former au mentorat.
Chef de projet opérationnel
J’assume aussi le rôle de chef de projet opérationnel. Je dois gérer une équipe, le planning, suivre le budget, les ressources et l’équipe, la qualité des livrables, la relation avec le client, etc. Je passe 10 à 20% de mon temps sur la gestion de projet et sur les aspects administratifs d’une mission. Ils sont importants et ne peuvent pas être pris à la légère, à l’image du procès-verbal de réception des livrables ou de la mission, et de la facture, qu’il importe de vérifier afin qu’elle soit exacte. Ici encore, pas de secret, il s’agit de suivre des formations de type Prince 2 ou MSP (Managing Successful Programmes) pour réussir.
Psychologue
De manière intéressante, je dois parfois prendre une casquette de psychologue. Il arrive que les consultants soient mobilisés dans des contextes difficiles, dans le cadre par exemple de réorganisations qui peuvent impacter des postes en quantité et en qualité. Beaucoup de clients ne le vivent pas forcément bien.
Ayant un rôle externe et neutre, je dois parfois me mettre en mode écoute et faire preuve d’empathie pour aider mon client à se sentir plus à l’aise dans ces contextes difficiles qui impactent aussi les consultants par ailleurs – nous sommes avant tout humains. L’écoute peut aider, surtout si les ressources humaines sont trop occupées, ou insuffisamment à l’écoute. Même si je ne suis pas un psychologue, j’ai suffisamment vécu de situations compliquées pour des clients pour savoir à quel moment il faut faire une pause, entrer dans un mode d’écoute active, de réflexion sur l’avenir et comment mieux appréhender des situations délicates.
Négociateur
Je me suis souvent mis dans la peau d’un négociateur. Cette négociation intervient à tous les niveaux, entre le consultant et son client, entre consultants, entre clients. N’est pas consultant quiconque n’est pas prêt à négocier pour encourager à prendre des décisions qui auront des impacts positifs à moyen terme, sans tomber dans le court termisme.
Je me rappelle de discussions avec des clients où nous poussions la mise en place de bonnes pratiques et on m’a souvent opposé les contraintes qui empêchent de mettre en œuvre telle ou telle bonne pratique. On doit alors négocier pour montrer que d’autres clients, qui ont eu les mêmes contraintes, ont réussi à trouver des espaces de co-création et de collaboration. J’aime bien donner ce type d’exemples, car on ne peut m’opposer une fin de non-recevoir sans vraie justification. Le livre de Chris Voss (Never Split the Difference) permet de bien comprendre les concepts autour de la négociation, avec une focalisation sur la partie émotionnelle.
Gestionnaire de compte
Je reste un gestionnaire de compte. Je suis ambassadeur de mon cabinet et dois m’assurer que le client est satisfait de la prestation, de la qualité et des ressources déployées. Le client m’a parfois fait part d’un manque de qualité de certains livrables, et il faut alors discuter précisément des points d’amélioration. C’est un exercice d’équilibriste à trouver entre l’acceptation de certains points et la capacité à rester ferme sur des points du livrable qui, tant sur la forme que sur le contenu, répondent au cahier des charges. Je me focalise personnellement sur la relation de longue durée, en mode partenariat, dans l’objectif de faire en sorte que mes clients réussissent. Il faut aussi, parfois, savoir taper du poing sur la table lorsque le client demande trop d’éléments hors contrat, qui peuvent requérir une demande de changement formelle. A cet égard, il doit bien comprendre le contrat précis et discuter avec les juristes.
Commercial
Enfin, je suis un commercial, à l’écoute d’opportunités où je peux potentiellement apporter un support. Je dois formaliser dans ce rôle le périmètre des futures missions, les objectifs et l’approche proposée. Je dois aussi rédiger des documents de discussion, puis des propositions commerciales afin de formaliser des relations contractuelles.
En raison de ces différentes casquettes, j’ai dû m’initier à tous ces nouveaux métiers. On apprend de ses projets, on apprend aussi de ses mentors. Le tout est de trouver l’équilibre pour être le plus efficace possible. Comme je l’ai souvent répété, on ne naît pas consultant, on le devient. Je suis persuadé que celui qui arrivera à apprendre ces différents métiers, progressivement bien sûr, saura tirer son épingle du jeu.
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