Le métier d’innovation manager : mettre l’humain au coeur du digital
05 sept. 2019
5min
GA
Solveig Courvoisier occupe le poste de responsable Digital RH au sein de La Banque Postale. Passée par une khâgne puis par l’université, Solveig fait partie de cette génération des jeunes pousses des années 2000 qui ont commencé à se passionner pour l’univers du web et du digital, ses valeurs, les sujets techniques en général, les méthodes et nouvelles façons de travailler.
Aujourd’hui, elle se considère comme un profil multi-casquettes, à la fois experte et généraliste. Ce qu’elle aime avant tout ? Partager ses connaissances et aider ses collègues à expérimenter et innover.
Quel a été ton parcours académique et professionnel pour en arriver là ?
J’ai suivi tout au long de ma carrière des chemins de traverse. Après un parcours en sciences humaines, où j’ai suivi des cours d’urbanisme, donc déjà techniques, je suis arrivée par hasard au cours d’une mission d’intérim chez Certinomis avec comme mission de proposer des axes d’amélioration du service client, en tant que responsable de la qualité de service. C’était passionnant d’être dans une start-up de neuf personnes car nous devions avoir une grande polyvalence dans nos activités. J’ai pris en charge la partie communication au bout de deux ans. Mais après six ans en start-up, j’ai eu envie de changer d’environnement.
Après six ans en start-up, j’ai eu envie de changer d’environnement.
C’est ainsi que j’ai rejoint la direction de l’innovation et des e-services du groupe La Poste. Ma première mission était de réaliser une expérimentation sur l’identité numérique et l’authentification forte (un domaine de sécurité informatique qui permet de certifier l’identité d’une personne et/ou d’une organisation sur Internet, NDLR), un domaine que je maîtrisais bien. L’innovation ouverte, les processus et les indicateurs d’innovation, la notion d’intelligence collective, le travail sur les business models, la créativité sont des apprentissages enrichissants et passionnants que je continue à développer pour le groupe aujourd’hui.
Quelles sont tes principales responsabilités ?
En 2016, j’ai rejoint l’équipe de la Banque Postale pour accompagner la filière RH dans sa transformation digitale. J’avais une vraie envie d’accompagner un métier dans sa mutation, métier qui est, de surcroît, au cœur de la transformation numérique de l’entreprise.
Aujourd’hui, je pilote le dispositif des coachs digitaux, un groupe de volontaires qui partagent leurs connaissances et pratiques sur le digital. Le but est de favoriser l’acculturation des collaborateurs au digital, notamment les nouvelles recrues. Mon rôle, dans le binôme d’animation de la communauté, est aussi d’avoir du recul, de poser un cadre, de comprendre et définir les leviers et freins à ce type de dispositif, et d’en dresser le bilan.
J’avais une vraie envie d’accompagner un métier dans sa mutation, métier qui est, de surcroît, au cœur de la transformation numérique de l’entreprise.
Je travaille aussi sur l’innovation des pratiques RH, en faisant des expérimentations. Cela peut prendre, par exemple la forme d’un outil d’auto-déclaration des compétences, un chatbot à destination des managers, etc.
Quelle que soit l’équipe avec laquelle je travaille, la transformation digitale demeure, selon moi, l’objectif commun à tous ces projets. Il faut créer du lien entre les personnes et les outils, mais en mettant, toujours, les utilisateurs au centre du projet.
Quelle que soit l’équipe avec laquelle je travaille, la transformation digitale demeure, selon moi, l’objectif à tous ces projets.
Peux-tu nous donner un aperçu de ta semaine-type ? Quelles sont tes missions?
Une majorité de mon temps est dédiée à la gestion de projet : recueillir de l’info, construire le projet, planifier, anticiper et trouver des solutions avec le groupe projet. Concrètement : des réunions de pilotage, des ateliers de co-construction, des rendez-vous, etc. Ensuite, mon temps se partage entre les activités de veille (un peu tous les jours) sur les domaines de l’innovation et du digital, et des activités liées aux coachs digitaux.
Qu’est-ce que tu aimes dans ton travail ?
Ce qui me plaît, c’est d’embarquer et d’inclure les gens. Que ce soit dans les projets ; comme facilitatrice en méthodes de créativité ; dans la préparation des conférences du Lab Postal, dans les activités avec les coachs digitaux et dans la transformation numérique, c’est fondamental pour moi.
Je cherche à donner de l’autonomie et à révéler les capacités de mes interlocuteurs. J’essaie systématiquement de donner des clés de compréhension, et d’utilisation pour que chacun puisse s’emparer de nouvelles méthodes, de perspectives, de pistes de réflexion, etc. Je donne des grilles de lecture pour comprendre la transformation numérique, et pas que sur la technique, mais également sur les implications sociétales.
J’aime les “allers-retours” entre la stratégie et les actions concrètes, et faire le lien entre les deux. J’apprécie aussi l’alternance entre travail individuel et travail collectif. Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est qu’une fois que la mission d’accompagnement se termine, on n’ait plus besoin de moi.
Je cherche à donner de l’autonomie et révéler les capacités de mes interlocuteurs.
Quels sont les challenges auxquels tu dois faire face?
Le défi principal, c’est le temps. Il y a, comme partout, un besoin de rattraper un retard, de réduire la fracture numérique en entreprise et de prendre le temps pour mettre en place la transformation digitale, qui est une transformation culturelle. Or, il peut être difficile de donner du temps hors de son cœur de métier, de mobiliser les interlocuteurs en interne comme en externe. On me demande souvent un retour sur investissement au préalable, or c’est impossible : nous sommes dans le test and learn, nous mesurons des effets. Ceci implique de revoir sans cesse les formats, d’être parfois moins dans de grandes ambitions, mais de faire de nombreux petits pas.
De plus, il ne faut pas se leurrer, il y a un côté plus “sombre” de la transformation digitale, à l’image de la robotisation, des menaces sur la vie privée, et de discours qui deviennent facilement très idéologiques. C’est aussi mon rôle de désamorcer ces craintes en facilitant le partage de connaissances, les relations, le pair-à-pair et de commencer la transformation par là.
Le défi principal, c’est le temps. Il y a, comme partout, un besoin de rattraper un retard, de réduire la fracture numérique en entreprise.
Quels conseils donnerais-tu à celles et ceux qui souhaiteraient un travail comme le tien ?
Au niveau des compétences, il est essentiel d’avoir des connaissances en gestion de projet. Il faut savoir fédérer des compétences pluridisciplinaires, définir un planning et des jalons et maîtriser une communication irréprochable tant écrite qu’orale.
Il faut aussi aimer avoir un rôle transverse. Parfois, cela peut être un peu frustrant, car il n’y a pas d’indicateurs clés de performance dans ce rôle car on vient toujours “en plus” de toutes les activités quotidiennes. Mais on peut aussi être récompensé quand l’interlocuteur fait sien ce qu’on lui a transmis.
Le mot de la fin?
Je pense qu’il ne faut pas hésiter à saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent. Les passerelles entre métiers existent aussi bien dans les start-up que dans les grands groupes, mon parcours s’est construit de cette manière.
Pour conclure, je pense que pour s’éclater dans ce métier il faut être curieux, aimer apprendre, et ne pas avoir peur de transmettre les savoirs. Il faut aussi savoir inclure les gens pour les embarquer dans une aventure commune et vers un objectif partagé !
Les passerelles entre métiers existent aussi bien dans les start-up que dans les grands groupes, mon parcours s’est construit de cette manière.
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