Retranscrire un univers de marque en image : le métier de styliste photo
25 févr. 2019
5min
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Fondateur, auteur, rédacteur @Word Shaper
Elodie Rambaud est styliste photo depuis près de quinze ans. C’est-à-dire qu’elle crée et agence des univers pour mettre en avant des produits et des idées, essentiellement dans le domaine de la food et de l’art de vivre. À la croisée entre production, direction artistique et stylisme, son métier lui a enseigné de toujours garder l’œil avisé pour pouvoir se renouveler perpétuellement.
Quelles études as-tu suivies ?
J’ai commencé par une fac d’histoire et d’histoire de l’art. J’avais déjà suivi un parcours plutôt artistique au lycée. J’ai arrêté la fac avant la licence puis j’ai repris une formation de Visual Merchandising à la Chambre de Commerce. Plus que les cours en eux-mêmes, c’était l’opportunité de faire des stages qui était intéressante dans cette école.
Justement, quelle a été ta première expérience professionnelle ?
J’ai fait un stage de fin d’année chez Sinéquanone en tant que chargée d’agencement. Je faisais le lien entre les architectes, les visual merchandisers, et les franchisés. Je devais m’assurer que l’identité de la marque était respectée dans les boutiques franchisées. Je remplaçais une personne en congé maternité et donc j’avais quasiment un poste de responsable alors que je démarrais. J’y suis finalement restée un an, c’était très enrichissant mais ça m’a aussi fait réaliser que le statut d’employée ne me convenait pas et qu’il fallait que je fasse mon possible pour travailler en tant que freelance par la suite.
Quelle a été ta trajectoire après ce stage ?
Je suis partie à Londres pour améliorer mon anglais. Là-bas, j’ai voulu travailler pour la marque Habitat, j’ai frappé à leur porte tous les jours et ils m’ont embauchée en tant que Visual Merchandiser. J’allais aux réunions avec tous les visual merchandisers UK, Écosse, Irlande… C’était génial. J’ai compris que pour les anglo-saxons, ce n’était pas les grandes écoles qui importaient le plus. Ils te donnent une chance même avec un parcours atypique si tu montres que tu es motivé(e).
Ensuite, en rentrant à Paris, j’ai travaillé en freelance pour Fauchon pendant six mois : j’ai participé à la création de leur nouvelle identité visuelle, au montage des show-rooms, des nouvelles vitrines. Je n’avais pas envie de rester à Paris alors j’ai envoyé un mail à un magazine en Australie, Donna Hay qui était un peu la référence dans le domaine de la food et du lifestyle. Le lendemain, j’avais une réponse qui me proposait de venir à Sydney pour les rencontrer. Tout s’est bien passé nous étions en novembre et ils m’ont conseillé de revenir en janvier après le summer break, c’est là que j’ai commencé à travailler pour eux et que j’ai commencé le métier de styliste photo en freelance.
Est-ce que tu avais des passions qui te prédestinaient à ce métier ou ça a été un concours de circonstances ?
J’ai toujours bien aimé le dessin, j’ai toujours plutôt été attirée par l’art, le créatif, tout ce qui est lié à la couleur, aux formes… Je ne me suis jamais imaginée exercer un métier trop “posé”, comme avocat ou médecin. Je préférais travailler avec mes mains et me déplacer, plutôt que travailler derrière un ordinateur, écrire, etc. Avec du recul, mon meilleur atout est d’avoir eu l’audace de partir, de suivre mon instinct. Beaucoup de personnes autour de moi me conseillaient de commencer par trouver un CDI, de rester en France alors que selon moi, c’était important d’aller découvrir ce qui se passait ailleurs et au pire, d’apprendre de mes erreurs.
Avec du recul, mon meilleur atout est d’avoir eu l’audace de partir, de suivre mon instinct.
Comment est-ce que tu définirais ton métier aujourd’hui ?
En collaboration avec un(e) photographe, j’imagine des mises en scène, des séries d’images que je vais prendre soin d’accessoiriser. Je me présente en tant que styliste photo car c’est pour cela que l’on fait appel à moi, mais ce n’est que la face visible de l’iceberg. Mon travail se divise en plusieurs blocs que j’exploite plus ou moins en fonction des projets : la direction artistique, la recherche d’éléments, la production, le stylisme le jour du shooting, parfois même la rédaction.
Mais tous les projets suivent à peu près ces différentes étapes :
- Le travail de recherche d’ambiance en amont avec le client est très important et très motivant car tout est encore possible et on a toujours envie de faire encore mieux, encore plus beau.
- La recherche de lieu, d’accessoires, de modèles… dont je m’occupe souvent également. Cette partie permet de préciser le travail à venir en fonction du budget. Cela demande de connaître un très grand panel de lieux, de produits et fournisseurs, disponibles en France comme à l’étranger. Il m’arrive quasiment à chaque mission de devoir trouver des éléments très précis comme un scooter Lambretta rouge à Londres, une petite barque ancienne bleue à Sydney, un champs d’herbes hautes et fines… J’adore cette partie de recherche d’accessoires car elle m’entraîne toujours dans des coins inattendus, à la rencontre de gens que je n’aurais pas eu l’occasion de croiser autrement.
- Puis le jour J, vient la partie élaboration de l’image. C’est un travail d’équipe qui me passionne. J’installe le décor, pose les produits, le photographe travaille la lumière, le cadre, puis les modèles entrent en scène et la magie opère.
Mon travail se divise en plusieurs blocs que j’exploite plus ou moins en fonction des projets : la direction artistique, la recherche d’éléments, la production, le stylisme le jour du shooting, parfois même la rédaction.
Comment travailles-tu avec tes clients ?
Mes missions au quotidien varient selon les clients. J’aime approcher les marques en direct, leur proposer des séries de photos en essayant de les orienter sur un style et une identité. Mais parfois, ce sont des marques établies qui viennent à moi avec un projet en tête. Dans ce cas, la direction artistique est déjà définie et moi j’opère simplement en fonction du brief.
Qu’est-ce qui te motive le plus dans ton métier ?
La nouveauté. Généralement, chaque nouveau projet qui tombe est un coup de boost. La motivation, c’est de toujours trouver quelque chose à mettre en avant, à photographier, à proposer.
En ce moment, je m’associe à la designer Caroline Gomez. Nous développons ensemble le projet E à Bordeaux, une maison perdue dans la forêt landaise, proche de l’océan, que Caroline rénove. Il y a plein de beaux projets autour de cette maison qui prendront vie à partir du printemps prochain. C’est passionnant car cela me permet d’évoluer et d’approcher un nouveau terrain de jeu, différent de toutes les expériences que j’ai pu acquérir par le passé.
La motivation, c’est de toujours trouver quelque chose à mettre en avant, à photographier, à proposer.
À l’inverse, est-ce que tu as des obstacles à surmonter dans ton boulot ?
Le plus difficile à gérer, ce sont les périodes où j’ai un peu moins de boulot. C’est stressant mais aussi très générateur. Au final, je me rends compte que ces périodes sont quand même toujours très positives. C’est effrayant à première vue, on a l’impression de perdre ses repères, ou même certains clients, mais c’est aussi ce qui permet de se renouveler et de redéfinir ce vers quoi on a envie d’aller. Garder sans arrêt les mêmes clients, c’est prendre le risque de tourner en rond, malgré la sécurité que ça représente.
Quels sont les conseils que tu donnerais à quelqu’un qui voudrait suivre cette voie ?
Je dirais de ne vraiment pas avoir peur d’aller rencontrer les gens. C’est important de se démener pour se créer un réseau et de se rendre dispo. Il faut aussi être optimiste, ne pas avoir peur d’exprimer son envie de travailler mais aussi être très flexible et humble, surtout au début.
Après, pour tout ce qui est technique : à force de regarder des images, à force d’observer ce que les photographes, les clients recherchent, l’œil apprend et se précise petit à petit. Je ne pense pas que ce soit forcément inné. Les qualités à avoir s’acquièrent au fil du temps, en observant, en étant un peu obsédée par l’image, en essayant toujours d’évoluer, en imaginant des séries de photos sans arrêt, en anticipant ce que ça pourrait donner.
Il faut aussi être optimiste, ne pas avoir peur d’exprimer son envie de travailler mais aussi être très flexible et humble, surtout au début.
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Photo by WTTJ
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