Partir travailler à Tokyo
10 janv. 2019
9min
Freelance @ Communication numérique
Partir à l’autre bout du monde et manger des sushis à tous les repas, un rêve impensable ? Et bien non, avec un peu d’huile de coude, de la motivation et une pointe de sauce soja, vous pourrez embrasser une nouvelle vie au Pays du Soleil-Levant !
Le monde du travail
Marché de l’emploi
Avec un taux de chômage national en dessous des 3%, et un rapport offres/demandeurs d’emploi inversé à Tokyo (deux offres pour un chômeur), le Japon a de quoi donner envie. Cependant, attention de ne pas se laisser aveugler. Population vieillissante, emplois à temps partiel ou précaires, faible productivité : le plein-emploi n’est pas la seule explication de ces chiffres exceptionnels. En revanche, fait indéniable : le Japon souffre bien d’une pénurie de main d’œuvre. Mais là encore, il y a un hic : ne pas parler Japonais est un véritable handicap à l’obtention d’un emploi qualifié. « Je pensais que l’Anglais suffirait pour travailler » , explique Alberto, expert en marketing installé à Tokyo depuis cinq ans, mais les Japonais le parlent encore assez peu : « j’ai donc dû commencer par donner des cours d’Anglais pour gagner ma vie, tout en prenant des cours de Japonais, pour pouvoir revenir dans mon secteur professionnel. » Et cet apprentissage mérite réflexion : pour rappel, le Japonais, c’est trois alphabets différents et des niveaux de langage qui varient en fonction de votre interlocuteur. Alors, pour commencer, vous pouvez prendre un “baito”, soit un job alimentaire, afin d’acquérir les bases. Vous pouvez aussi postuler auprès des entreprises françaises, comme BNP Paribas, Chanel ou encore Michelin.
« J’ai dû commencer par donner des cours d’Anglais pour gagner ma vie, tout en prenant des cours de Japonais, pour pouvoir revenir dans mon secteur professionnel. » - Alberto, expert en marketing à Tokyo depuis cinq ans.
Scène entrepreneuriale
On commence à observer une (toute) petite effervescence du côté de la communauté tech tokyoïte, même si le pays arrive 54ème (sur 54) au classement des pays selon leur taux d’esprit entrepreneurial réalisé par le GEM. Ainsi, quelques événements annuels sont organisés pour fédérer la communauté : le Scality Software Defined Storage Day, Tech In Asia… Le gouvernement essaie même d’encourager l’esprit start-up en mettant en place des partenariats avec des incubateurs tels que Edgeof ou en rendant plus facile la création d’entreprise. On compte même quelques jolies success stories, comme par exemple Pocket Concierge, qui permet de réserver une table dans un restaurant étoilé au Michelin ou encore SmartDrive, qui analyse les données numériques dans le secteur de l’automobile. Le big data est d’ailleurs un secteur en plein essor au Japon, avec un fort besoin de spécialistes… Bref, une scène à très haut potentiel, encore assez peu exploitée : affaire à suivre.
Les secteurs qui recrutent
- Le secteur informatique et tech : entre 250 et 350K yens mensuels (soit entre 2 000 et et 2 700 euros) pour un web developper.
- Ingénierie et BTP : la ville a lancé plusieurs chantiers afin d’accueillir dans les meilleures conditions les Jeux Olympiques de 2020.
- Le commerce : 6 à 12 000 yens de l’heure pour un sales manager (soit entre 45 et 90 euros)
- L’apprentissage de langues (comprendre : l’Anglais) : le faible niveau de la population fait le bonheur des anglophones !
La vie en entreprise
Il est facile d’avoir des a priori négatifs sur les conditions de travail au Japon : heures supplémentaires à répétition, jusqu’au karoshi (soit, littéralement, dépassement au travail), aucune remise en question possible de la hiérarchie et costume obligatoire… Il n’y a rien de faux, mais il faut savoir nuancer : « en tant qu’étranger, je n’ai pas vraiment l’obligation de porter un costume, j’ai un peu plus de liberté » explique Alberto, « et j’ai des horaires fixes, que je respecte, très peu d’heures supplémentaires pour moi ! » Une réalité confirmée par Nima, qui a été cuisinier dans un restaurant japonais à Tokyo : « l’ambiance était détendue, sans stress, mais je précise que je ne travaillais presqu’avec des expatriés. » En revanche, la ponctualité n’est pas à prendre à la légère (sachant que vous ne pouvez même pas blâmer les transports en commun) : « dans certaines entreprises, je devais pointer, et si j’arrivais en retard, c’était retiré de mon salaire » se souvient Alberto. Par ailleurs, les Japonais sont très respectueux les uns envers les autres, et encore plus envers leur hiérarchie : « il faut savoir faire preuve de diplomatie » concède Alberto. Il faudra aussi vous habituer au rythme de travail « parfois très très lent » précise-t-il, et faire des efforts pour s’intégrer dans l’équipe : « j’ai de la chance : dans mon entreprise, on ne boit pas des verres tous les soirs, mais il serait très compliqué pour moi de manquer l’une des deux ou trois fêtes annuelles » raconte Alberto. À vous de vous adapter aux us et coutumes de votre entreprise afin de vous intégrer à l’équipe.
« En tant qu’étranger, je n’ai pas vraiment l’obligation de porter un costume, j’ai un peu plus de liberté. J’ai des horaires fixes, que je respecte, mais très peu d’heures supplémentaires pour moi ! » - Alberto, expert en marketing à Tokyo depuis cinq ans.
Les plus
- Le salaire moyen est plus élevé qu’en France : environ 2600 euros au Japon contre 2 250 en France
- L’importance du collectif : « les équipes sont soudées, on travaille tous pour remplir nos objectifs, c’est motivant » explique Alberto
- Des restaurants japonais, partout, tout le temps, « à petit prix et très bons ! » précise Nima
- « C’est une ville très ergonomique : les transports sont tout le temps à l’heure, il y a des conbinis (petits magasins nldr.) ouverts 24h/24 à tous les coins de rues, et donc des toilettes propres et gratuites, il y a de la wifi presque partout, vos colis n’arrivent jamais en retard… Bref, dites adieu à tous les petits stress du quotidien » s’enthousiasme Alberto.
- Tokyo est la capitale la plus sûre du monde : vous pouvez même laisser votre iPhone X en évidence sur la table d’un restaurant pendant que vous allez aux toilettes sans risque de vol !
- Découvrez aussi la joie des KitKat à tous les goûts, qui changent en fonction des saisons : framboise, thé vert, caramel mais aussi melon ou saké !
Les moins
- Les rues n’ont pas de nom : bonne chance !
- Le coût de la vie est 22% plus élevé qu’en France
- Les Japonais ont le droit à 10 jours de congés payés annuels après 6 mois d’ancienneté, chiffre qui monte à 20 jours après 6 ans passés dans l’entreprise, mais ils n’en prennent que 8 ou 9 par an
- Le monde du travail n’est pas très accueillant pour les femmes : le harcèlement des femmes enceintes est une triste réalité, et il peut être difficile de pour les femmes de poursuivre leur carrière après avoir eu un enfant
- Il existe un congé parental (pour mère et père) fixé à 1 an (rémunéré à 60% du salaire) mais seul 2,3% des hommes l’utilisent (et pour seulement quelques jours)
Pour qui ?
« Il peut être un peu difficile de se faire des amis japonais du fait de la barrière de la langue » annonce tout de suite Alberto. Là encore, pour vous intégrer, il va falloir faire quelques efforts linguistiques. En attendant, vous pouvez toujours vous tourner vers la communauté française, très présente sur Facebook, ou du côté des meet-ups internationaux qui sont organisés par les expatriés.
Et à Tokyo, soit une mégalopole on ne peut plus dynamique, vous aurez toujours quelque chose de nouveau à essayer avec vos nouveaux amis ! Impossible de compter le nombre de restaurants, de friperies, de clubs ou de galeries d’art contemporain. La ville vous réserve plein de surprises cachées dans ses buildings à néons : n’hésitez pas à lever la tête et à prendre les ascenseurs au hasard, pour découvrir le nouveau disquaire ou bar à la mode. « J’étais particulièrement fascinée par l’architecture de la ville » raconte Nima, « entre gratte-ciels très modernes, temples et maisons traditionnel.le.s : on est surpris à chaque coin de rue ! »
C’est aussi le moment de vous laisser aller à votre passion karaoké ou de profiter des nombreuses salles de jeux, des loisirs totalement clichés certes, mais qui sont très populaires au Japon. Et comme dans toute grande ville, le rythme peut être difficile à suivre : « parfois, j’ai vraiment une impression de métro-boulot-dodo, et que tout va très vite » confie Alberto. Alors, prenez le temps de faire des pauses au Yoyogi Park, ou dans l’un des nombreux temples de la ville, ou de faire des excursions en dehors : des randonnées en montagnes sont accessibles à seulement une heure de transport !
« J’étais particulièrement fascinée par l’architecture de la ville entre gratte-ciels très modernes, temples et maisons traditionnel.le.s : on est surpris à chaque coin de rue ! » - Nima, cuisinier.
Infos budget
Loyer
La ville de Tokyo est chère, les logements sont petits et les agences immobilières peuvent être réticentes à proposer les dossiers d’étrangers aux propriétaires. Armez-vous de patience ! Si vous êtes dans l’urgence et que vous avez les moyens, vous pouvez avoir recours aux entreprises telles que Sakura House, qui proposent des chambres dans leurs immeubles avec cuisine et salle de bain partagées, à des loyers de départ de 60 000 yens environ (soit 466 euros) (pour des chambres de parfois 5 mètres carrés). Si vous souhaitez faire appel à une agence, il vous faudra un garant japonais, plusieurs enveloppes de caution (l’une pour les éventuels travaux et le ménage, une autre pour remercier le propriétaire de vous accepter et enfin une caution classique), toutes équivalentes à au moins un mois de loyer, auxquelles s’ajoutent les frais d’agence (un mois de loyer également). Notez bien que les contrats sont renégociés tous les deux ans. Comptez en moyenne 115 000 yens (880 euros) pour un studio dans la capitale nippone, même si ce prix peut varier d’un extrême à l’autre en fonction des quartiers : la mégalopole compte non moins de 23 arrondissements, certains très huppés comme Roppongi, et d’autres plus accessibles comme Ueno. Si vous avez un peu de temps devant vous, consultez les offres de location sur Craigslist, soit la version américaine de leboncoin, très utilisée au Japon, et notamment à Tokyo.
Santé
Si vous venez avec un PVT, vous avez pour obligation de souscrire à une assurance santé privée. Mais attention, comme tous les autres expatriés, vous devez souscrire à l’assurance santé japonaise, même si, parfois, même les fonctionnaires de Mairie ne sont pas au courant. Si vous êtes salarié, vous cotisez à hauteur de 9,90 % de votre salaire, divisé en parts égales entre vous et votre employeur. Si vous n’êtes pas salarié, vous devrez cotiser auprès de l’assurance santé générale (2% de vos revenus annuels, bien que ce taux puisse varier en fonction des préfectures).
Transports
Dès votre arrivée à l’aéroport, investissez dans une carte de transport rechargeable. Vous avez deux options : la Suica Card, à 2 000 yens (mais seulement 500 yens de caution, donc 1 500 yens de crédit), qui vous offrira 5% de réduction pour chaque trajet ; ou la Pasmo (même prix), qui vous permet de prendre un abonnement sur un trajet identique (au hasard, maison-travail). Vous découvrirez que la propreté et la ponctualité à toute épreuve des transports tokyoïtes ont malheureusement un coût, assez élevé.
Les prix des trajets sont fixés en fonction de la distance parcourue, sachant que vous payez un prix d’entrée fixe à chaque fois que vous validez votre carte. Il y a trois compagnies de métro à Tokyo : la JR, le Tokyo Metro et le Toei Subways, sans compter le monorail, les tramways et les bus. Il faut donc bien penser son trajet, et éviter de cumuler les différents réseaux sous peine d’exploser son budget transport. Vous pouvez d’ailleurs utiliser le site hyperdia pour trouver votre itinéraire et son prix.
Si vous habitez non loin de votre lieu de travail (Tokyo étant une mégalopole, le nombre de kilomètres qui vous séparent de votre entreprise peut rapidement s’allonger), vous pouvez envisager d’investir dans un vélo : encore une fois rendez-vous sur Craigslist ou sur les nombreux groupes Facebook d’expatriés pour des vélos de seconde main entre 5000 et 10 000 yens. N’oubliez pas de demander le registration paper du vélo en question à l’ancien propriétaire, et de le faire mettre à votre nom : il vous en coûtera 500 yens (moins de 5 euros) dans n’importe quel magasin de vélo, ou au commissariat du coin (les koban). Les contrôles de police sont fréquents.
Internet et téléphonie mobile
Pour votre téléphone, rendez-vous à Yodobashi-Akiba : un étage entier est dédié aux opérateurs mobiles japonais. Vous y trouverez forcément votre bonheur, avec des abonnements mensuels (avec engagement d’un à deux ans) tournant autour de 2 000 yens (environ 15 euros), et l’avantage du service japonais en plus : vous ne repartirez pas sans que votre téléphone fonctionne parfaitement ! Pour la box Internet, l’abonnement est en général compris dans le loyer : il tourne autour de 4 000 yens par mois, soit 35 euros.
Infos visa
PVT
Si vous avez entre 18 et 30 ans, vous pouvez faire la demande d’un visa Vacances-Travail, en plus d’apporter la traditionnelle copie du passeport et une photo d’identité, vous devrez justifier de minimum 3 100 euros sur votre compte bancaire si vous choisissez de présenter vos billets aller et retour à l’ambassade (4 500 euros si vous choisissez de ne présenter que votre billet aller), un certificat médical datant de moins d’un mois, et écrire une lettre de motivation mais aussi présenter le programme détaillé de vos mois au Japon. Cette dernière étape peut vous provoquer quelques pics de stress, mais pas de panique, avec un peu de bon sens, et les témoignages des nombreux pvtistes sur les forums, vous en viendrez à bout !
Visa de travail
Vous disposez d’un large éventail de visas de travail, dont vous pouvez trouver toutes les options détaillées. Dans tous les cas, vous serez obligé de fournir un Certificate of Eligibility (CoE), qui vous sera transmis par votre entreprise après validation du Bureau de l’Immigration. Vous êtes donc fortement encouragé à chercher un travail depuis votre pays de résidence, plutôt que de vous rendre sur place sans visa adéquat.
Spouse visa
Si vous trouvez l’élu.e de votre coeur sur place, et que vous décidez de vous marier, vous pourrez faire la demande du Spouse Visa qui vous permet de travailler au Japon, quelque soit votre domaine d’activité.
Notons que le 8 décembre 2018, le gouvernement japonais a adopté une loi visant à assouplir les conditions d’obtention de visas de travail, afin d’accueillir plus d’étrangers.
Formalités administratives
À peine arrivé à l’aéroport, on vous imprimera une resident card, soit votre carte d’identité japonaise. Une fois installé, vous n’avez qu’une semaine pour vous enregistrer à la Mairie : on vous donnera un numéro, appelé simplement My Number. Il est obligatoire pour ouvrir un compte en banque ou même travailler. On en profitera pour graver votre adresse sur votre resident card : à chaque déménagement, pensez à la mettre à jour. De fait, vos trajets maison-travail, calculés sur la base de l’adresse la plus récente de votre resident card, sont généralement remboursés à 100% par l’entreprise.
Entre rythme effréné et zen attitude, entre modernité et tradition, vous découvrirez une métropole aux multiples facettes, qui ne cessera de vous surprendre : à vous de voir si vous pouvez vivre constamment en dehors de votre zone de confort !
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Photo d’illustration by WTTJ
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