Le nombre d'apprentis en France en hausse de 16%
06 févr. 2020
3min
Journaliste
Et si un jour tous les jeunes en quête de formation optaient pour l’apprentissage, plus professionnalisant et plus intéressant financièrement ? On en est encore loin, mais le nombre d’apprentis ne cesse de grimper année après année. Comme l’a annoncé la Ministre du Travail Muriel Pénicaud, celui-ci a d’ailleurs augmenté de 16% en 2019. Pourquoi un tel succès ? Comment s’explique cette croissance historique ? Déchiffrage.
Un succès sans précédent
Alors que l’apprentissage existe depuis presque 100 ans, le sens du mot n’est pas toujours bien compris en raison de la diversité des publics auxquels il s’adresse et de la multitude de secteurs qu’il concerne. Revenons donc sur la définition même du terme pour être sûrs de ce dont on parle. En France, l’apprentissage est un mode de formation basé sur l’alternance : les apprentis alternent entre moments en entreprise et cours dans un centre de formation (CFA) qui peut être un établissement d’enseignement public ou privé. Les contrats d’apprentissages peuvent être délivrés à tous les niveaux d’études, du CAP/BEP au Master (Bac+5). Il peut donc s’agir de contrats délivrés à de jeunes artisans en devenir comme à des futurs cadres.
Après une forte diminution du nombre d’apprentis constatée entre 2012 et 2015, l’apprentissage avait repris des couleurs à partir de 2016. Et la décennie s’est conclue de la meilleure des manières puisque la formation en alternance a connu une progression sans précédent. On dénombre ainsi 491 000 apprentis en 2019, un chiffre qui n’avait encore jamais été atteint depuis la création du contrat d’apprentissage en 1928. À titre de comparaison, en 2016, 288 700 contrats d’apprentissage avaient été délivrés, soit quasiment deux fois moins !
Un succès qui n’a rien de surprenant quand on énumère les avantages de ce mode de formation. Mettre un pied dans le monde du travail, acquérir de l’expérience professionnelle tout en ayant accès à des cours, et surtout, avoir la possibilité d’être rémunéré chaque mois durant sa formation… De quoi entrer dans la vie active en ayant fait le plein de connaissances et de confiance. Et même si cela demande de l’organisation et de la volonté pour survivre aux emplois du temps souvent chargés entre cours et entreprise, le jeu en vaudrait la chandelle. L’apprentissage serait même un chemin particulièrement sûr vers l’emploi : à la fin de leurs études, les apprentis s’insèrent plus facilement sur le marché de l’emploi que les personnes en formation initiale (à diplôme égal). Ils sont en effet 69% à être en poste 7 mois après la fin de leur formation, et ce taux d’insertion augmente avec le niveau d’études (82% pour les bac pros, 88% pour les BTS).
La loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel
Malgré la liste d’avantages incontestables, l’apprentissage a longtemps balbutié en France et souffert d’une image négative. Mais en 2018, l’Etat a montré son intention de le promouvoir davantage auprès des jeunes en intégrant une réforme sur l’apprentissage dans la loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel, effective depuis janvier 2019.
Parmi les changements apportés par cette réforme, on retrouve notamment une augmentation des salaires des apprentis et une aide de 500 € accordée sur le permis de conduire. Il a aussi été décidé d’ouvrir ces contrats à un plus grand nombre d’apprentis, en augmentant la fourchette de l’âge réglementaire de 14-26 ans, à 16-30 ans. Par ailleurs, certaines mesures de la réforme ont pour objectif d’impliquer davantage les entreprises dans le fonctionnement et le financement de l’apprentissage pour soulager les régions. Depuis janvier 2019 et l’application de la réforme, les entreprises peuvent donc créer elles-mêmes leur CFA en vue de former les talents de demain. Enfin, au niveau des démarches, l’Etat a voulu simplifier les choses : il est désormais plus facile de faire une demande pour devenir maître d’apprentissage et les aides financières des entreprises ne sont plus le casse-tête administratif qu’elles étaient auparavant.
Si l’apprentissage se développe donc à un rythme impressionnant, difficile de dire si cette évolution est le résultat des mesures de l’État où s’il s’agit de la conséquence d’un effort commencé bien avant, notamment par les régions. Ces dernières condamnent d’ailleurs la réforme, reprochant à l’État de les avoir mises à l’écart en leur coupant les subventions qu’elles recevaient auparavant. Surtout, leur crainte est de voir les mesures du gouvernement favoriser uniquement le développement de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur (BTS, Licence, Master), au détriment des enseignements du secondaire (CAP, BEP, bac pro). Si leurs inquiétudes venaient à se confirmer, il se pourrait alors que la vocation même de l’apprentissage soit transformée. En effet, alors qu’avant ce type de contrat était un moyen de faciliter l’insertion des moins qualifiés, il deviendrait la voie royale pour les étudiants surqualifiés (d’universités et d’écoles de commerce, ingénieur…) pour faire face à la forte concurrence qui les attend sur le marché du travail.
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Photo d’illustration by WTTJ
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