Vivre et travailler ensemble, le concept de la hacker house
20 oct. 2017
4min
CN
Fondatrice de Dea Dia
“Hacker house”, un mot qui stimule l’imagination. Est-ce un endroit secret où se retrouvent des hackers dissidents ? Une communauté de geeks vivant ensemble à l’écart du monde pour mieux inventer l’avenir ? La maison du bonheur au travail ?
Rencontre avec Elisa Desbrosses qui vit et travaille chez Seed-Up- la première hacker house française - en tant que Responsable Communication mais aussi « bras droit, assistante de direction et tout autre rôle polyvalent. » Oui, parce que dans une hacker house, rien n’est jamais figé…
Une hacker house, c’est quoi ?
Une nouvelle structure de travail
À l’origine de Seed-Up, il y a Benjamin Poilvé et Paul Poupet. Ils se sont rencontrés pendant leurs études et se sont suivis lors de leurs expériences professionnelles respectives avec un constat commun : ils étaient malheureux dans les entreprises traditionnelles. Ils ont donc voulu inventer une nouvelle façon de travailler, en se débarrassant de tout ce qui leur déplaisait dans l’entreprise.
« Il s’agissait de créer un endroit où tous les savoir-faire seraient mis au service d’un projet et où toutes les conditions seraient réunies pour exploiter au mieux la créativité de chacun. » , explique Elisa.
Ils ont donc créé Seed-Up, une maison, agréable et confortable, avec une cuisine, des chambres, des poules dans le jardin et des gadgets technologiques qui traînent dans le salon. Un lieu à des années lumière de ce qu’on imagine quand on dit « je vais au travail ». D’ailleurs, la question d’aller au travail ne se pose pas puisque les membres de la hacker house vivent à plein temps dans la maison !
Ici, exit l’organisation verticale, l’inertie, l’ennui, la division du travail et tous les points de blocage qui peuvent nuire à la capacité d’innover des salariés et finir pas gâcher leur talent. A contrario, Seed-Up mise sur le partage de compétences, le management horizontal, la bienveillance et le respect de chacun. Des valeurs essentielles selon eux pour créer un espace d’innovation.
Un lieu d’expérimentation
« Le métier de hacker consiste à déconstruire un système pour pouvoir comprendre son fonctionnement et le réutiliser pour d’autres usages. Donc ici, tout le monde adore bidouiller et expérimenter », raconte Elisa.
Cette passion pour la bidouille, c’est précisément ce qui les rend si créatifs et leur permet d’inventer des solutions audacieuses à des problèmes complexes. Ici, un projet ne commence pas par des mois de conceptualisation soumis à validation car on préfère le “Proof of concept” à de longues réflexions. Une hacker house serait alors comme le temple de l’expérimentation et de l’innovation. « Chez Seed-Up, on met en avant les gens qui FONT plutôt que les experts du marketing et du Power-Point. »
Quel statut pour les membres de la hacker house ?
Les douze membres du groupe sont salariés et chacun consacre 30% de son temps à des missions clients. Les 70% restants sont consacrés à des projets personnels, généralement apportés par l’un des membres mais développés par tous.
Pour Elisa, « les missions clients permettent de financer la hacker house mais aussi de nous légitimer, de nous donner accès aux problématiques du marché actuel, de nous ancrer dans le réel, sinon on pourrait vite s’enfermer dans notre bulle et perdre pied avec la réalité, surtout qu’on a beaucoup de profils atypiques ici ! »
Un exemple de mission client
Pour un grand groupe de BTP qui souhaitait assurer la sécurité de ses chantiers, Seed-Up a créé une caméra 3G avec un algorithme de reconnaissance d’image qui détecte tous les problèmes potentiels (incendie, distance de sécurité etc). Le système est aujourd’hui implanté avec succès sur trois chantiers du leur client.
Le projet Moore, un projet personnel développé par Seed-Up
Au départ, c’est une idée ambitieuse née d’une discussion entre les membres de la hacker house : créer une clé usb au stockage illimité. « On a tous des problématiques de stockage alors on s’est dit qu’il faudrait avoir une clé usb illimitée. On a donc créé un algorithme de machine learning qui apprend des usages de l’utilisateur et stocke, de lui-même, les données dans notre téléphone ou dans le cloud. » explique Elisa.
Une journée dans la hacker house
Une vie en communauté
Des jours types dans la hacker house, il n’y en a pas vraiment. Ici, tout le monde a entre 20 et 28 ans, personne ne vit en couple, personne n’a d’enfants ou de contraintes familiales même si tout le monde a une vie bien à lui en dehors de la maison. Cela laisse donc une grande liberté d’organisation !
« La hacker house fonctionne comme une sorte de communauté où on se connaît bien tout en restant ouverts. Tout repose sur la bonne volonté de chacun. A 10h, tout le monde est debout et prêt à travailler. Le premier levé fait le petit-déjeuner, c’est pareil pour le déjeuner et le dîner. Le plus grand débat, c’est pour choisir le film du soir. On organise aussi pas mal de sorties, mais rien n’est jamais obligatoire. »
L’organisation du travail repose donc sur la notion de confiance. Il y a peu de règles à respecter et chacun peut travailler comme il l’entend, mais comme chacun est passionné par ce qu’il fait, le travail consacré aux missions clients est toujours fait avec sérieux et dans les délais impartis.
Un lieu où la créativité n’est jamais interrompue
Dans les entreprises traditionnelles, la majorité des salariés rentrent chez eux le soir et cessent, si possible, de penser au travail. Chez Seed-Up, on vit au travail ou on travaille à la maison alors les réunions surviennent naturellement, au détour de conversations, durant les heures de travail, pendant le repas ou le film du soir. Les conversations peuvent donc être plus riches, créatives et productives car informelles.
« Le fait de vivre ensemble amène à penser de manière plus spontanée, on développe des idées à tout moment. On se confronte à soi-même et aux autres, il n’y a pas de pause dans le processus de pensée donc on va très loin. »
Le recrutement chez Seed-Up
Chez Seed-Up, on trouve : des designers, des développeurs, des responsables communication et des business developpers. Mais ici, les diplômes importent peu et la dimension humaine est prépondérante dans le processus de recrutement. Car il semble logique de s’intéresser autant à la personnalité qu’au parcours lorsqu’on recrute un colocataire en même temps qu’un collaborateur. « Pour le recrutement, on privilégie les projets personnels bien plus que les diplômes. Ce qui nous intéresse, ce sont l’expertise, la curiosité, les valeurs, l’ambition, les centres d’intérêts et la manière de réfléchir. Tous les gens ici ont un véritable savoir-faire. » explique Elisa.
De plus, il faut s’assurer que la personne saura se fondre dans cette culture d’entreprise très particulière, fonctionner de manière efficace sans avoir de cadres, adhérer à la culture de la hacker house qui, décidément, ne ressemble en rien à celle des entreprises plus traditionnelles. « Tous les salariés de la hacker house pourraient avoir de bons postes bien payés ailleurs mais ils choisissent de travailler ici. C’est un choix philosophique que de ne pas vouloir s’adapter aux grands groupes. »
Bien sûr, ce type de fonctionnement ne conviendra pas à tout le monde. Il faut pouvoir accepter de partager tout son temps avec ses collègues et d’être autonome dans son travail. Et Elisa de conclure que c’est surtout « un bon tremplin entre la vie étudiante et la vie professionnelle. »
Photo @Seed-Up
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