Télétravail : comment arrêter de faire des horaires à rallonge par culpabilité ?
08 juin 2022
5min
Travail, besogne, labeur : il a toujours rythmé la vie des hommes et des femmes. Nos ancêtres ont traversé de grandes crises économiques ou politiques, connu eux aussi les petits et grands défis d’une vie. Mais aucun d’entre eux n’a bénéficié de cette chance offerte à nombre d’entre nous aujourd’hui : pouvoir travailler depuis chez soi pour un meilleur équilibre entre vie pro et vie perso. Et pourtant, les études montrent que les personnes qui travaillent depuis chez elles ont tendance à prolonger leur journée de travail. La raison ? Une culpabilité de « déserteur⋅se » ainsi qu’un besoin de « surcompenser » l’absence physique au bureau. Oui mais attendez – si vous avez fini tout ce que vous deviez faire ou aviez prévu de faire ? Se libérer de la culpabilité, ça s’apprend ! On vous le promet, c’est possible.
Aujourd’hui, la société nous envoie plutôt des messages culpabilisants (le fameux « Tu devrais déjà être content⋅e d’avoir un travail », comme si le poste vous était tombé tout cuit dans la bouche ou n’était pas dû à vos efforts) nous poussant parfois à accepter des conditions de travail inacceptables. C’est ce même sentiment, la culpabilité, qui conduit certain⋅es d’entre nous à ne pas compter leurs heures, tout en étant moins bien payé⋅es et régulièrement mal accompagné⋅es – des sacrifices encore jugés nécessaires. Ce qui lie nombre d’entre nous est aussi la difficulté à nous octroyer un vrai jour off et notre tendance à consulter notre téléphone non-stop par crainte de rater un e-mail très urgent du ou de la boss, même en plein déjeuner avec notre moitié ou pendant un apéro avec des amis. Pourquoi ? Car, à nos yeux, ne pas checker plusieurs fois notre téléphone constituerait un manque de sérieux de notre part.
Le résultat ? Une génération qui se traîne en permanence une culpabilité XXL. En théorie, les progrès de la technologie devraient nous permettre de profiter de la vie comme jamais nos aïeux ne l’auraient rêvé. Le travail est moins physique que jadis, les loisirs et divertissements (une notion pas si vieille que ça) sont accessibles à tarifs abordables et les grands-parents souvent ravis de jouer les baby-sitters.
Nous ne travaillerons jamais comme nos parents et leurs aînés l’ont fait. Doit-on s’affoler ? Pas du tout. Nous sommes la première génération à pouvoir télétravailler (même si cela ne concerne pas tout le monde) et, si les conditions nous le permettent, à pouvoir afficher une productivité en béton armé sans rogner sur notre vie perso. Alors comment y arriver (vraiment) ?
1. La communication asynchrone à votre service
Pour ceux et celles d’entre nous dont le travail n’implique pas d’être en contact avec du public, un ordinateur et un téléphone suffisent souvent. Nous délaissons de plus en plus les appels téléphoniques, au profit de l’écrit : on parle de communication asynchrone. En d’autres termes, nous envoyons des messages sans attendre une réponse immédiate.
Pourtant… Nous avons une bien meilleure image de nous en tant que pro si nous répondons plus vite que notre ombre aux e-mails et autres messages reçus sur Slack ou WhatsApp. Nous n’avons pas encore pris conscience de la nuisance réelle que sont ces interruptions permanentes et du côté contre-productif de notre empressement à répondre en temps réel. Est-il par exemple acceptable de ne répondre à un e-mail que le lendemain ? Oui, trois fois oui. Deux raisons à cela : personne ne se fend d’un e-mail sur une question urgente. Deuxièmement, lorsque nous cliquons sur « Envoyer », nous n’avons aucune idée de la charge de travail de notre destinataire en face. Le sujet n’est cependant jamais abordé au bureau.
Il ne suffit donc pas de nous persuader des bénéfices de la communication asynchrone : il faut savoir remettre les pendules à l’heure et les échéances à leur bonne place dans nos échanges avec nos collègues, N+1, fournisseur⋅euses, partenaires et client⋅es.
Nos conseils pratiques
Les e-mails et messages WhatsApps n’appellent pas à une réponse immédiate. Si le sujet est urgent, on vous appellera. Bloquez un créneau le matin et l’après-midi pour y répondre. Vous constaterez bientôt un vrai gain d’efficacité de votre côté et verrez que votre boîte ne coule pas suite à ce petit ajustement de votre part.
Faites en sorte que rien ne puisse vous distraire. Si vous avez quelque chose d’important à faire, désactivez les données mobiles sur votre téléphone. Vous aurez la bonne surprise de constater à quel point l’efficacité est votre amie quand il n’y a rien pour venir vous interrompre.
Et pour la communication directe ? Groupez tout ! Vous devez par exemple passer cinq coups de fil ? Passez-les tous le temps d’une petite marche autour de chez vous. Vous gagnerez du temps, avec un bol d’air en prime – et probablement quelques bonnes idées que vous n’auriez pas eues en regardant le mur de votre salon / chambre / coin bureau.
2. Fixez-vous des objectifs clairs et pointez-les
Il est temps d’ouvrir le débat et de poser quelques principes en matière de productivité et de protocoles au travail, tout comme il est nécessaire de sensibiliser les personnes qui composent notre environnement professionnel. La question est la suivante : qui travaille vraiment sur objectifs ? À moins de faire partie d’une équipe commerciale, de travailler sur une chaîne de montage ou d’être un⋅e athlète de haut niveau, personne ne fonctionne spontanément de la sorte.
Comment s’y mettre ? En se fixant des objectifs clairs, atteignables et mesurables. Et en démontrant que l’on peut réussir même avec une organisation non linéaire. Le rendement professionnel comme la conception de la vie sont propres à chacun⋅e. Vraiment. À vous de suivre quelques étapes simples et d’établir un plan d’action qui ne grignotera pas trop de votre temps. Vous verrez non seulement votre productivité grimper, mais aurez également la preuve irréfutable d’avoir fait votre travail du mieux possible. Culpabilité ? Connais pas.
Nos conseils pratiques
Le vendredi, faites le point sur le travail réalisé pendant la semaine. Vous aiderez ainsi les personnes qui vous supervisent ou celles qui vous ont embauché⋅e en tant qu’externe à vérifier votre travail. De votre côté, vous pourrez constater en un coup d’œil le travail abattu sur une semaine.
Bloquez le dernier quart d’heure du vendredi ou le premier du lundi pour planifier votre semaine. Cela vous mettra sur les bons rails côté tâches à réaliser, vous épargnera le stress de « Est-ce que je vais avoir le temps de tout faire ? » et vous permettra de voir clairement la charge de travail qui vous attend chaque jour.
Établissez un planning tenant compte de vos activités perso autant que vos obligations professionnelles. Accordez autant d’importance aux unes qu’aux autres. C’est le meilleur moyen de profiter vraiment de la flexibilité que permet le télétravail / travail hybride.
Ne vous demandez pas l’impossible : tout doit être faisable. Si vous devez envoyer un rapport pour 11 heures, ne prévoyez pas un rendez-vous à l’autre bout de la ville trente minutes plus tard. Ce n’est pas gérable et aura pour conséquence de faire grimper votre niveau de stress d’un cran – avec un effet domino fort probable sur tout votre planning. Pas besoin de vous coller vingt to-do dans une seule journée (avant tout car il n’y a jamais, en réalité, vingt choses à traiter absolument dans la journée).
Si vous finissez plus tôt un soir, arrêtez-vous là. Ce qui est impossible au travail (il vous faut rester devant votre ordi – les pauses cigarette ou cafés avec les collègues ne servant qu’à souligner que le travail est bouclé) est tout à fait possible à la maison. Vous avez fait tout ce qui était prévu. Voilà. Stop. Ne commencez pas à vous avancer sur la suite. Personne ne s’est jamais libéré du temps avec ce type de stratégie. Jamais, on vous dit.
Conseil bonus
Consacrez 19 minutes au très efficace TED Talk de Jason Fried baptisé Why Work Does Not Happen at Work ou Pourquoi le Travail ne se Fait pas au Travail (sous-titrage en français). Après ça, vous aurez tout compris.
Article traduit par Sophie Lecoq
Photo de Thomas Decamps
Inspirez-vous davantage sur : David Blay
Journaliste. Consultant et formateur en télétravail.
Télétravail et pandémie : la recette d'un « boom » technologique ?
Demain, télétravaillerons-nous tous dans des réalités virtuelles ? #Hologrammepourtous
17 mai 2021
Géographie et opportunités : pourquoi le télétravail est une bonne nouvelle
Demain, tous concurrents ? Le journaliste et spécialiste des questions de télétravail, David Blay, nous parle plutôt de belles opportunités !
15 févr. 2021
Vacances impossibles, finances instables... Quand le freelancing fragilise le couple
Entre stress financier et bouleversement des rythmes de vie, la vie de freelance complexifie parfois la vie de couple...
15 oct. 2024
Le téléprésentéisme, nouvel avatar du bon vieux présentéisme ?
« J'envoie un “Bonjour” sur Slack et me rendors après »
04 juil. 2024
Télétravail et libido : près des yeux, près du corps
Plus de proximité, pour plus de désir ?
04 avr. 2024
La newsletter qui fait le taf
Envie de ne louper aucun de nos articles ? Une fois par semaine, des histoires, des jobs et des conseils dans votre boite mail.
Vous êtes à la recherche d’une nouvelle opportunité ?
Plus de 200 000 candidats ont trouvé un emploi sur Welcome to the Jungle.
Explorer les jobs