Candidats : osez demander pourquoi l’entreprise recrute !

Quelle réalité se cache derrière une offre d’emploi ? Pour le savoir, la description du poste et des missions doivent être les plus détaillées possible. Cette transparence permet de mieux cerner les attentes de l’entreprise et de mieux se projeter. Rappelons que l’inadéquation entre le profil du candidat et le besoin du recruteur est le premier obstacle dans un processus d’embauche… Alors si la raison de l’ouverture de poste n’est pas donnée d’office, il ne faut pas hésiter à vous manifester : « Il est légitime de poser la question, c’est un gage de transparence qui permet de rétablir de l’équilibre au cœur de l’entretien, conseille Anouk Jugla, culture leader chez Carbo. Toutefois, la raison n’est pas toujours facile à donner. » Lors de l’entretien, c’est le moment d’aborder tous les sujets, même ceux qui fâchent. Hors de question d’en sortir avec des points non élucidés. Sachez que cette franchise, dès le recrutement est d’ailleurs aussi dans l’intérêt de l’entreprise qui risque de perdre des candidats à rester trop évasive. En effet, selon un sondage réalisé auprès de 2 800 candidats, 65 % des sondés ont indiqué avoir mis fin au processus de candidature après avoir découvert certains aspects du poste ou de l’entreprise qui leur déplaisait. Pour l’entreprise, manquer de transparence s’apparente à une opération de sabotage car vous finirez de toute façon par découvrir le pot aux roses.

Vous devez avoir en tête que l’ouverture d’un poste répond à des problématiques bien précises :

• Remplacement pour un arrêt-maladie, un congé maternité, un mi-temps thérapeutique… ;
• Création de poste pour agrandir une équipe déjà formée ;
• Ouverture d’un nouveau département nécessitant de nouvelles compétences ;
• Remplacement sur un poste au fort turn over…

Comment se positionner selon le cas de figure rencontré ?

Ce n’est plus une nouvelle, le bien-être au travail est un critère clé dans une recherche d’emploi. Vouloir se sentir bien au milieu de ses collègues, trouver sa place, débriefer du week-end le lundi à la machine à café ou en zoom sont des grands plus qui permettent de vivre une expérience professionnelle enrichissante. Toutefois, selon les raisons qui poussent l’entreprise à ouvrir un poste, la qualité de vie au travail peut cacher des réalités différentes pour les futurs salariés. Selon Clotilde Mérillon, directrice des ressources humaines chez Javelo, « si l’entreprise cherche un profil expert avec une forte valeur ajoutée technique, il y a fort à parier que le challenge sera grand ».

Un poste au fort turnover

Dans le cas d’un emploi au fort turnover, le recruteur aura tendance à cacher les raisons de l’ouverture de poste. Néanmoins, quelques signes peuvent vous alerter :

• Description floue des missions ;
• Missions répétitives et/ou physiques ;
• Mauvaise notation de l’entreprise sur des sites de notation comme Glassdoor ;
• Manque d’intérêt pour votre profil (comme ci vous étiez interchangeable avec un autre candidat)…

Si vous avez un doute, il est dans votre intérêt d’interroger l’entreprise afin de mieux cerner son niveau de développement. Il va de soi qu’une entreprise où il fait bon vivre est synonyme d’un faible taux de turnover. Toutefois, Clotilde Mérillon rappelle que ce n’est pas une science exacte : « Le turnover peut aussi être un facteur sain synonyme de dynamisme pour l’entreprise qui arrive à injecter du sang neuf, à développer de nouveaux projets et qui permet à ses salariés d’évoluer. » Donc, pas de conclusions hâtives : on peut envisager que le candidat avant vous ait fait le tour des missions, ou bien que la charge de travail ne correspondait plus avec ses priorités, ou bien qu’il ait entamé une reconversion professionnelle ! Chaque parcours est singulier et c’est à vous de titiller le recruteur pour mieux identifier les raisons de ce turnover.

Vous hésitez encore ? Dans ce cas là, entrez en contact avec des salariés (en poste ou non) de votre potentiel département : ils vous aideront à vous forger une opinion sur l’ambiance de travail et la culture de l’entreprise.

Toutefois, ayez en tête trois choses :

• Le turnover coûte cher à l’entreprise ;
• Certaines activités et secteurs ont traditionnellement un turn over important. C’est notamment le cas de la restauration, de l’hôtellerie, du tourisme, des nouvelles technologies, du commerce…
• La hausse du turnover est d’ordre conjoncturel : les chiffres ne cessent d’évoluer ces 25 dernières années, illustration d’un marché du travail extrêmement dynamique.

L’ouverture d’un nouveau poste

Vous êtes une pépite dans un domaine bien précis ? Vous êtes doté d’un sang-froid à toute épreuve ? Vous détenez une expertise rare ? Les entreprises sont de plus en plus amenées à inverser les processus de recrutement afin d’adapter le poste à la personne - car il manque une compétence technique à l’entreprise - et de lutter contre l’obsolescence des compétences. Ces dernières ont effectivement une durée de vie de plus en plus courte, notamment en raison des avancées technologiques. Il s’agit alors pour l’entreprise de dénicher des jeunes talents pour une création de poste. Pour Edwige Fernande, « si le talent a les compétences recherchées, on peut imaginer lui proposer une offre nouvelle de poste ». La création de poste est souvent floue pour l’entreprise qui ne peut s’appuyer sur des retours d’expérience pour s’améliorer. C’est donc une preuve d’amour que l’entreprise vous fait car c’est un saut dans le vide pour tout le monde ! Vous aimez les challenges ? Ce type de poste est ultra galvanisant. « Attention toutefois, vous devez absolument questionner sur ce poste afin d’y voir plus clair sur le contenu de ses missions et sur les attentes de l’entreprise », ajoute la spécialiste. Enfin, n’hésitez pas à mettre en avant vos capacités d’adaption et votre proactivité lors de l’entretien. Ce sont des facultés nécessaires lors d’une création de poste où, en tant que nouvelle recrue, vous allez devoir communiquer avec les autres équipes pour comprendre comment vous intégrer et participer à la conception de votre propre job. Vous aurez tout à créer !

Si le recrutement est une compétition avec un seul vainqueur, de nombreux postes relèvent d’un travail d’équipe qu’on peut chercher à agrandir. Dans ce cas de figure, le poste est souvent clair et c’est plus facile de monter rapidement en compétence car l’entreprise sait ce qu’elle peut apporter et connaît bien les missions du poste. Pour Anouk Jugla, cette volonté d’agrandir le nombre de collaborateurs peut faire suite à une levée de fonds ainsi qu’à un recrutement tous azimuts. Dans ce cas, vous devez être au clair sur le modèle de croissance de l’entreprise et sa vision stratégique à court et moyen terme.

Le remplacement temporaire

S’agissant d’un recrutement qui viserait à remplacer temporairement un salarié en congé maladie ou autre, il s’agit par définition d’un poste à durée limitée avec un transfert de missions bien connues de l’entreprise, le tout étant d’être clair à ce sujet. Il faut alors s’interroger sur les possibilités d’évolution en interne et sur la définition du poste. S’agit-il d’un départ volontaire ? D’un poste avec des horaires de travail très denses ? D’un environnement de travail toxique ?

Attention aux recrutements rares !

Certaines entreprises ont tendance à ne pas beaucoup recruter et attendre que le besoin devienne important pour elle avant de lancer le recrutement d’un nouveau salarié. Dans ce cas, attention au grand poids qui risque de reposer sur vos épaules une fois embauché·e, à savoir une charge de travail très conséquente. En résumé, plus le besoin de l’entreprise sur un poste est important, plus les attentes seront grandes. Être transparent dès le départ est donc dans l’intérêt de l’entreprise. Comme le recrutement est une action coûteuse en temps comme en argent : il y a donc peu d’intérêt à dissimuler les raisons d’un recrutement sauf bien sûr si celles-ci sont peu avouables…

Donc faites comme à l’école et posez des questions ! Il n’y a aucune question bête et dites-vous qu’un profil curieux à toutes les raisons de taper dans l’œil du recruteur ! La curiosité est une soft skills plus qu’appréciée !

Article édité par Romane Ganneval ; Photographie de Thomas Decamps