Recherche d’emploi : 6 conseils pour gérer la pression de l’entourage
28 janv. 2021
9min
« Tu as rappelé le recruteur dont je t’ai parlé ? » « Tu sais, depuis le temps que tu cherches, tu ne devrais peut-être pas faire la fine bouche… » La recherche d’emploi met vos nerfs à rude épreuve, chacun y va de son petit mot ? Entre les “il faudrait” et les “tu devrais”, vous vous sentez un peu oppressé ? Quand on est en recherche d’emploi, on est souvent bombardé de questions et de suggestions de la part de nos proches, souvent bien intentionnées, mais qui viennent nous mettre la pression. Alors, comment gérer ?
Pourquoi notre entourage nous met-il la pression ?
Notre entourage se préoccupe de nous et c’est plutôt une bonne nouvelle. Le problème, c’est que l’attention qu’ils nous portent pour des raisons souvent louables peut parfois venir nous stresser et raviver en nous inquiétude, peur, confusion, quand elle ne vient pas complètement nous tétaniser…
« Je voudrais seulement t’aider ! »
Nos parents, amis et conjoints tiennent à nous, ils aimeraient beaucoup nous voir sortir de cette période de transition pas très confortable qu’est la recherche d’emploi. Ils ne peuvent pas s’empêcher d’y aller de leurs petits conseils, voire de leurs reproches, espérant d’une manière ou d’une autre avoir un impact sur notre situation. Claire, jeune diplômée en recherche d’emploi dans le secteur du social a plutôt mal vécu cette situation : « Tout part d’une bonne intention : nos proches veulent nous faire gagner du temps en nous partageant leurs conseils. Mais ils ne sont pas à notre place, ni dans notre tête, ils ne connaissent pas la situation de l’emploi dans notre secteur et n’ont pas le pouvoir de nous trouver un boulot d’un claquement de doigt. » Pire, leur préoccupation peut nous faire douter de notre capacité à nous en sortir seul.
Des conceptions différentes du bonheur et de la réussite professionnelle
« Nos proches ont en tête un certain modèle de bonheur, de ce qui les a rendu heureux, et ils ne comprennent pas que notre chemin ne soit pas nécessairement le même que le leur », partage Franck, actuellement en reconversion. L’ingénieur qui a quitté son dernier poste après un burn-out recherche un poste dans un autre domaine que sa formation initiale, ce qui ne manque pas de susciter inquiétude et incompréhension dans son entourage. « Ce qui est important à leurs yeux, c’est que tu aies ton bac + 5, ton diplôme d’ingénieur, même si cela ne correspond pas à ce qui te plaît au fond… », raconte-t-il. Difficile dans ce contexte de leur expliquer qu’il est prêt à changer de métier après toute l’énergie qu’il a investie dans ses études initiales !
« Ils me demandent comment s’est passé ma journée, si j’ai bien avancé. […] La plupart du temps, je n’ai rien à répondre », Claire, en recherche d’emploi
La période de recherche d’emploi peut accentuer le risque de conflits de loyauté ou faire naître une peur de décevoir ses proches. Comment assumer de rester à la maison quand votre conjoint travaille à plein temps ? Comment s’autoriser à prendre un temps de réflexion, quand vos parents ne se sont jamais accordé une pause ? Comment envisager de se reconvertir quand ces derniers ont mis tant d’énergie à financer vos études ? La pression est d’autant plus importante chez les jeunes, qui comme Claire, vivent encore chez leurs parents en attendant de retrouver un emploi : « Quand ils rentrent du boulot, je suis dans le salon, j’ai fait le dîner ; ils me demandent comment s’est passé ma journée, si j’ai bien avancé. J’en sais rien moi ! La plupart du temps, je n’ai rien à répondre. »
Des réactions multiples face au chômage
« On m’a dit, “Toi, tu profites du chômage” ; comme si certains avaient vraiment besoin du chômage, et que je profitais du système », s’exaspère Franck, qui se rend bien compte qu’après un burn-out, il avait besoin d’une pause pour se reconstruire et préparer la suite. Le chômage est connoté différemment en fonction des personnes, des milieux et des générations, mais il est fréquent que nos proches en aient une vision négative : « Mes parents ont du mal à accepter que leur fils puisse ne pas être en état de travailler. Pour mon père, prendre du temps pour se reposer, réfléchir, n’a jamais été imaginable. Pour lui, je suis un profiteur, loin du modèle qu’il avait en tête. »
Les amis aussi peuvent y mettre leur grain de sel. Entre les proches de Claire qui ont l’impression qu’elle peut organiser les soirées et week-ends puisqu’elle est “en vacances” et ceux de Franck qui ne comprennent pas qu’il prenne son temps, les réactions peuvent être multiples : « J’ai senti une incompréhension totale sur le temps que je prenais pour réfléchir à mon projet chez mes amis, et bizarrement cette incompréhension était parfois doublée d’une certaine jalousie. » Au final, les personnes en recherche d’emploi peuvent se sentir isolées en dépit de la pression omniprésente de leur entourage.
Un réel manque de neutralité
« Quand je me suis retrouvé au chomâge, il a fallu rassurer mon entourage », Franck, en recherche d’emploi
Même si elles veulent vous aider, les personnes qui vous entourent manquent d’objectivité. Et c’est normal : votre situation a un impact sur leur vie ! Dans un couple, par exemple, la période de recherche d’emploi vient bousculer le rythme de la vie à deux, entraîne des pertes de revenus qui impactent le foyer…. L’autre peut vouloir avoir voix au chapitre… et mettre, au passage, une certaine pression : « Quand je me suis retrouvé au chômage, il a fallu rassurer mon entourage, se souvient Franck. En même temps, dans mon ancienne vie professionnelle il y avait déjà tellement de personnes à satisfaire que j’ai fini en burn-out. Toute cette pression a fait qu’au bout d’un moment, il n’y avait plus d’espace, plus de place pour m’écouter. » L’ancien ingénieur a d’ailleurs profité de son break pour entamer un travail de fond avec un psychologue.
Touché, coulé ?
Pourquoi les petites réflexions des autres et leurs conseils nous déstabilisent-ils ? La recherche d’emploi vient fragiliser notre estime de soi, surtout quand nous sommes en recherche depuis un certain temps. Nous sommes en position de vulnérabilité : les préoccupations et les conseils de nos proches finissent par peser tout comme les reproches. Résultat ? Nous nous dévalorisons et culpabilisons. Pour autant, est-il possible de faire abstraction du regard et de l’avis des autres ? Pas évident, ce sont eux qui nous aident à nous construire, et ce, dès l’enfance, comme le rappelle Christophe André et François Lelord dans leur ouvrage L’estime de soi : « Les parents restent les plus importants pourvoyeurs d’amours, ce sont encore leurs avis qui comptent dans les domaines de la conformité comportementale et de la réussite scolaire. » Et si rien ne nous oblige à prendre leur avis au pied de la lettre, un peu d’approbation de leur part ne nous ferait pas de mal. C’est peut-être ce qui est le plus difficile à comprendre pour eux !
Derrière la pression de notre entourage se cache leurs propres peurs
Quel est l’intérêt pour les autres de nous mettre une telle pression ? Parfois, consciemment, notre entourage veut essayer d’influer sur nos comportements et nos décisions afin que ceux-ci correspondent à leurs attentes et à leur vision du monde. Mais la plupart du temps, la pression qui se déverse sur nous est le fruit inconscient des peurs et craintes qui les assaillent :
La peur de la précarité : nombreuses sont les personnes qui ont peur de se trouver un jour en difficulté financière. Les parcours atypiques, les périodes de chômage ou les emplois instables leur font peur, ils veulent vous préserver de la précarité : « Tu es trop difficile, en période de crise, un boulot est un boulot », a entendu Claire à de nombreuses reprises depuis qu’elle a entamé ses recherches il y a huit mois.
La peur de l’isolement social et de la marginalisation : être au chômage peut faire remonter chez votre entourage - mais aussi chez vous - la peur d’être socialement non conforme, de négativement vous démarquer de la société de travailleurs qui vous entoure. En plus de cette peur de la marginalisation peut naître une certaine honte : “ma fille”, ou “mon conjoint” est au chômage, n’est pas toujours facile à assumer…
Attention leurs peurs ne sont pas les vôtres….
Ils ont peur pour vous ? Leurs peurs ne sont pas les vôtres… Et en même temps, il se peut qu’elles fassent écho aux vôtres ! Car ce que ceux qui vous aiment craignent pour vous, c’est peut-être quelque chose que vous redoutez vous-même… Leurs peurs renforcent aussi les vôtres, décuplant l’effet au passage. Et s’ils ne vous font pas confiance pour vous en sortir, n’est-il pas le meilleur moyen de vous faire douter ? Vous pouvez alors être tenté de fuir vos proches pour un temps, de ne plus décrocher le téléphone… Comment faire la part des choses ?
Nos conseils pour relâcher la pression
1. Faites le tri entre vos peurs et celles des autres.
Prenez le temps d’identifier les peurs qui émanent de vous et des autres. Leurs ressentis ne vous appartiennent pas, vous avez déjà assez à faire avec vos propres questionnements. Peut-être que certaines des peurs que vous ressentez sont en lien avec le regard des autres ? Peur de ne pas être à la hauteur, peur de décevoir, peur de transgresser les règles de votre fonctionnement familial, social ? « Une fois que j’ai identifié les mécanismes qui me mettaient la pression, j’ai réussi à prendre un peu de distance », partage Franck qui a bien été aidé par son thérapeute.
2. Restez concentré sur votre objectif et votre projet
Les situations de recherche d’emploi nous rendent vulnérables et influençables. Autant être bien au clair avec ses objectifs pour ne pas se laisser disperser par nos émotions et par la pression parasite de notre entourage. « Au bout de quelques mois de chômage, j’ai complètement paniqué parce que ça n’avançait pas, je n’en pouvais plus d’être dépendante de mes parents. J’ai postulé un peu partout, mais les postes me déprimaient et ne collaient pas du tout à ce que je voulais », raconte Claire qui a finalement refusé un poste… Rester sur son cap ne veut pas dire ne pas écouter les conseils des autres. Mais n’oubliez pas que, c’est vous qui êtes aux commandes. Prenez le temps de faire le point sur ce que vous cherchez, ce qui vous semble important pour rester concentré dans vos recherches.
3. Écoutez et exprimez vos besoins
Il peut être intéressant d’aller au-devant des autres pour exprimer vos besoins, plutôt que de subir leurs discours : “ce qui m’aiderait ce serait”, “j’aimerais te demander ton avis”…. Si parler de votre recherche d’emploi vous mine carrément le moral, vous pouvez dire que vous préférez pour le moment éviter d’en parler. Cette technique s’est révélée utile à Claire pendant les fêtes de fin d’année : « Je n’avais pas envie qu’on me parle de ma recherche d’emploi, tout simplement parce que je pense que je me débrouille mieux seule. Pour être sûre de ne pas m’énerver, j’ai préféré anticiper. Je leur ai dit et on m’a laissé en paix. »
4. Rassurez vos proches en communiquant
Communiquer, tenir informés vos proches de l’avancement de vos recherches peut également vous aider à reprendre le contrôle. Puisqu’ils ont peur, montrez-leur que vous comprenez leurs craintes tout en exprimant que vous n’avez pas besoin qu’ils vous la fassent peser. Rassurez les autres alors que c’est vous qui êtes au chômage, c’est un peu le monde à l’envers et pourtant, bien communiquer peut vous rendre service. « Parler, c’est le secret. J’ai eu de grosses discussions avec mes proches, j’ai posé les choses, raconte Franck. Tu ne peux pas en vouloir à quelqu’un de ne pas comprendre où t’en es si tu as pas communiqué. Mes parents, par exemple, se raccrochaient au peu de chose que je leur donnais. Comme maintenant je leur en donne plus, ils se posent moins de questions. »
5. Armez votre discours
« Alors, ta recherche d’emploi, tu en es où ? » La question peut être terrorisante pour certains. Franck le premier s’est fait prendre au piège : « Une fois, quelqu’un m’a posé cette question et je me suis fait totalement embarquer. Depuis, je prépare un petit speech, qui, jusque-là, a plutôt bien marché. » Préparer votre discours peut vous permettre de tenir informé les personnes qui s’inquiètent pour vous, et de manière factuelle. Un pitch préparé devrait vous aider à passer sereinement les réunions amicales et familiales. Vous pouvez par exemple lister ce que vous cherchez, les actualités du moment, ce dont vous avez besoin. Si vous ne savez pas encore exactement ce qui vous plaît, n’hésitez pas à dire « Je réfléchis à ce type de job », des portes peuvent s’ouvrir pour vous faire avancer dans votre réflexion !
6. Faites vous confiance, vous avez en vous les solutions
Malgré tout ce que votre entourage peut vous dire, rien ne bougera sans vous. Vous êtes la personne qui sait ce qui est bon pour vous, et contrairement à vos proches, vous êtes 100% dédié(e) à votre situation, puisque vous vous levez tous les matins avec cette recherche en tête. Se concentrer sur la voix qui s’exprime à l’intérieur plutôt que sur le brouhaha de la foule peut vous aider à remettre chaque chose à sa place.
Si vous n’avez pas la main sur la pression qu’exerce votre entourage, vous pouvez choisir la place que vous voulez lui donner. Pouvoir l’identifier et la comprendre, seul ou avec l’aide d’un tiers, peut vous aider à prendre un peu de recul et à gagner en liberté. Être au clair et en accord avec vous-même tout en communiquant avec les autres est un bon moyen de vous créer un espace de paix intérieure que rien ou presque ne pourra ébranler.
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Photo d’illustration par WTTJ
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