Essai transformé : ces projets étudiants devenus succès entrepreneuriaux
30 nov. 2020
7min
Journaliste
Dans la vie, il y a un temps pour tout. Petit, on se déplace à quatre pattes avant d’apprendre à marcher, puis à courir à toute allure. On apprend à parler avant de s’initier à la lecture et à l’écriture. Et puis, plus grand, on se forme, à l’école puis éventuellement en études supérieures, avant de se lancer dans la vie active. Mais il arrive parfois qu’une envie, une opportunité ou un succès inattendu bouscule l’ordre établi et fasse que ces différentes étapes se chevauchent ou se mélangent. C’est ce qu’il se passe lorsqu’un étudiant décide se lancer dans l’entrepreneuriat pendant ses études, ou qu’un projet qu’il menait dans le cadre de sa formation se poursuit dans un cadre plus professionnel. Nous avons sélectionné pour vous 6 succès entrepreneuriaux dont on ne pourrait pas se douter qu’ils ont commencé par être des projets étudiants sans prétention. Promis, Facebook n’est pas dans la liste.
1. VLC, la revanche des geeks
Samuel Hocevar, un des étudiants à l’origine du projet, en 1998, et l’ordinateur sur lequel il a commencé à développer VLC
Allez, on commence par du made in France ! Et oui, l’un des logiciels les plus téléchargés au monde (plus de 3 milliards de téléchargements depuis sa création) est frenchy. Et le plus insolite c’est qu’il a été créé par des étudiants de l’école Centrale (une des plus anciennes et prestigieuses grandes écoles d’ingénieurs françaises, ndlr).
Au début des années 90, son campus de Chatenay-Malabry était géré en totale autonomie par ses étudiants. À l’époque, c’est le début des jeux vidéo en ligne, et le moins que l’on puisse dire, c’est que ses apprentis ingénieurs en étaient déjà de vrais adeptes. Seul hic : le réseau du campus n’était pas assez puissant pour supporter leur passion. Ils ont bien tenté de convaincre l’école de financer l’installation d’un réseau plus puissant, arguant qu’il leur était nécessaire pour suivre leurs cours dans de bonnes conditions, mais l’administration ne s’est pas laissée amadouer. Alors, face au manque de ressources financières, ils n’ont eu d’autre choix que de mettre eux-mêmes au point un logiciel de lecture vidéo à faibles besoins de connexion : c’est la naissance de VLC.
Durant une dizaine d’années, le logiciel est géré bénévolement par des volontaires de l’école, se succédant d’année en année, ce qui rend son avenir fragile. Son arrêt définitif est d’ailleurs régulièrement envisagé, malgré un succès déjà encourageant dans le monde étudiant. Si au début des années 2000, des étudiants tentent de créer une vraie structure autour de l’innovation, ce n’est qu’en 2008 que le logiciel sort réellement du cadre étudiant pour permettre à des contributeurs externes et plus professionnels de rejoindre le projet, qui aura par la suite le succès mondial qu’on lui connaît.
2. Fedex, ou pourquoi il ne faut pas (toujours) écouter ses professeurs
Fred Smith, fondateur de Fedex
C’est ce que doit sans doute se dire aujourd’hui Fred Smith, le fondateur du géant américain de transport de fret. En 1962, il est étudiant à l’Université de Yale, lorsque pour un examen d’économie, il couche pour la première fois sur papier son projet de service de livraison révolutionnaire. C’est la première brique de ce qui deviendra plus tard la Federal express, plus connue sous le nom de Fedex, un mastodonte employant aujourd’hui plus de 400 000 personnes dans le monde. Pourtant, la légende raconte que son examen ne lui valu qu’un C (équivalent d’un 10/20 en France, ndlr), son professeur ayant jugé que le projet était “difficilement réalisable”. Difficile de savoir si ce dernier s’est totalement planté dans son jugement ou si le succès de Fedex est surtout dû au désir de revanche de Fred Smith suite à cet échec. En tout cas, la morale dans cette histoire, c’est qu’il ne faut jamais baisser les bras même lorsque les choses semblent mal embarquées, et que le succès tient parfois au pouvoir de la persévérance. Mince, on vous a fait regretter d’avoir abandonné vos rêves de devenir écrivain à la suite d’une dictée ratée en CM2 ?
3. Dropbox, un petit défaut peut parfois cacher une grande idée
Arash Ferdowsi et Drew Houston
Ce n’est finalement pas si étonnant que l’idée de ce logiciel de stockage et partage de fichiers ait germée dans l’esprit de Drew Houston, son fondateur, alors qu’il était encore étudiant, tant ce dernier est doué en informatique. Drew Houston a très tôt prouvé qu’il était un petit génie du code, au point qu’il a eu ses premières expériences professionnelles dès l’âge de 14 ans, et qu’avant de créer Dropbox en 2008, il avait déjà travaillé dans 5 start-up différentes, toujours en parallèle de ses études. Mais son plus grand succès reste incontestablement la marque au logo géométrique représentant une petite boîte en carton ouverte, qui a connu une croissance phénoménale et fait une entrée en bourse fracassante en 2018, 10 ans seulement après sa création.
Pour la petite histoire, même si Drew Houston excellait dans les études, avec souvent un sacré train d’avance sur ses camarades, il était toujours un peu tête en l’air. C’est d’ailleurs son petit défaut qui lui inspira Dropbox. Alors qu’il ne lui reste plus que quelques semaines avant l’obtention de son diplôme à MIT, lors d’un long trajet en bus de 4 heures, au cours duquel il comptait coder, il s’est aperçu à son grand désarroi qu’il avait oublié sa clé USB chez lui. Dans l’impossibilité d’avancer dans son travail, lui est venue l’idée d’une plateforme qui libérerait ses utilisateurs de l’utilisation d’espaces de stockage physiques. À peine quatre mois après l’épisode du bus, Drew s’envolait pour San Francisco pour pitcher son projet devant Paul Graham, célèbre investisseur américain. La suite, vous la connaissez.
4. Pumpkin, ou les bienfaits du voyage
Victor, Constantin et Hugo à leurs débuts sur Pumpkin
Pour les plus bilingues d’entre vous, le nom de l’entreprise évoque sûrement Halloween. Détrompez-vous, aucun lien entre l’application de remboursements entre particuliers et la fête des morts, si ce n’est peut-être qu’ils effraient leurs concurrents par la forte croissance qu’ils connaissent depuis leur création ? Non, l’explication est bien plus simple. S’ils ont décidé de s’appeler ainsi, c’est principalement par mimétisme des entreprises du numérique aux noms fruités : Apple, Blackberry, Orange, mais aussi Leetchi… Mais sachez aussi que cela n’a pas toujours été le nom de l’application, puisqu’à l’origine celle-ci s’appelait… “Projet de fin d’études Edhec 2014”.
Et oui, vous vous en doutez, l’application de paiement mobile était à la base un projet étudiant, présenté en dernière année du master entrepreneuriat de ses deux cofondateurs, Hugo Sallé de Chou et Constantin Wolform. D’ailleurs, le lien entre leurs études et le projet va encore plus loin car on peut même dire que c’est grâce à celles-ci qu’Hugo et Constantin ont eu la bonne idée de créer Pumpkin. La belle histoire commence lorsque Hugo s’envole pour San Francisco dans le cadre d’un stage chez Dailymotion. Il est alors en année de césure et découvre pour la première fois le paiement mobile, très répandu outre-Atlantique mais alors totalement inconnu en France. Même déclic pour Constantin, qui fait quant à lui sa césure au Kenya, où le paiement de salaires par mobile est monnaie courante en raison du grand nombre d’habitants ne disposant pas de compte en banque. Lorsqu’ils reviennent à l’Edhec, ils sont abasourdis par le retard de la France dans ce domaine, et l’idée d’importer le concept leur apparaît rapidement comme une évidence. Il paraît que “le voyage forme la jeunesse”, et bien, on peut dire que ces deux-là illustrent parfaitement ce mantra…
5. Privateaser, les soirées aussi ça fait cogiter
Raphaël Kolm, Nicolas Furlani et Alexandre Paepegaey
Encore un concept né dans la tête d’étudiants de l’école Centrale, décidément ! Lorsque Raphaël Kolm et Alexandre Paepegaey, les deux co-fondateurs, se rencontrent, ils sont tous deux délégués de leur promotion et responsables d’organiser des événements pour tous les étudiants de leur promo. Or, ils rencontrent énormément de difficultés à trouver un lieu idéal, disponible, qui plus est à un prix raisonnable. À l’époque, la plupart des espaces consacrés à ce type d’événements sont en effet des salles des fêtes ou de concert… qu’il faut louer parfois très longtemps à l’avance. Plutôt que d’attendre des mois avant de pouvoir faire la fiesta, ils imaginent une plateforme numérique où les bars et restaurants peuvent être privatisés rapidement et facilement. Et ça tombe bien, les deux compères suivent un cursus entrepreneurial au sein de l’école Centrale, alors ils décident d’approfondir leur concept en partant à la rencontre de potentiels partenaires et clients. Les retours étant particulièrement positifs, ils décident de monter leur start-up une fois diplômés. Comme quoi, parfois, l’envie de faire la fête peut être une grande source d’inspiration et de motivation…
6. Les Monty Python, une histoire drôle à l’anglaise
Les Monty Python à leurs débuts
Avant de devenir l’une des troupes les plus mythiques du 20ᵉ siècle, les membres des Monty Python n’étaient que de simples étudiants se dirigeant vers des carrières bien plus sérieuses que celles de la comédie. Alors étudiante, la troupe commence à se former lorsque trois d’entre eux, respectivement en études de médecine, de droit et d’anglais à Cambridge se rencontrent au sein du Footlight Dramatic Club, le club de théâtre de la prestigieuse Université. Si chacun a ses propres raisons de s’inscrire à cet atelier d’art dramatique, l’histoire de l’inscription de John Cleese, l’un des membres les plus connus, traduit bien le style très pince-sans-rire des humoristes britanniques.
Lorsque celui-ci débarque à Cambridge pour étudier le droit, il fait le tour des stands d’inscription aux différents clubs, et se dirige spontanément vers le Footlight Club. Les membres présents lui demandent alors s’il sait chanter ou danser, ce à quoi il répond : « Non. On m’a d’ailleurs interdit de chanter à l’école tellement j’étais mauvais. Et s’il existe un art dans lequel je suis encore moins bon qu’au chant, il s’agit sûrement de la danse. » Un peu surpris, ses interlocuteurs lui demandent alors ce qu’il sait faire. Et John Cleese rétorque, sans sourciller : « Je fais rire les autres. » Au sein du club, le noyau dur de la troupe commence à trouver son style et c’est lors de la tournée mondiale du Footlight, dont une des étapes s’arrête à New York, qu’ils rencontrent Terry Gilliam, seul membre américain des Monty Python. Le succès de la tournée leur ouvre ensuite les portes du monde du spectacle et leur permet d’être engagés par la BBC pour diriger une émission satirique, The Frost Report, alors qu’Eric Idle, le plus jeune de la bande, n’a que 23 ans ! Au sein de la chaîne britannique, la troupe sera finalement complétée une dernière fois par un duo de jeunes comédiens qui travailleront à l’écriture de l’émission, tous deux anciens étudiants… d’Oxford, l’université rivale de Cambridge.
Comme vous l’avez vu, le succès ne tient pas à grand-chose et arrive souvent quand on ne l’attend pas, parfois très tôt, venant bouleverser tous nos plans. Certains parleront de coups de chance, mais à en croire le vieux guérisseur indonésien dans L’homme qui voulait être heureux, de Laurent Gounelle : « Il n’y a pas de gens chanceux, mais seulement ceux qui voient les opportunités qui se présentent et ceux qui ne les voient pas ». Qui sait, même si vous êtes encore étudiant et que vous jonglez encore entre cours, stages et examens, les mois à venir vous réservent peut-être un déclic, un signe, une rencontre ou une idée, qui sera le fondement de votre future réussite professionnelle, ou d’un projet entrepreneurial. Alors, gardez les yeux bien ouverts et soyez attentifs ! Car même en temps de crise, innover reste possible. C’est d’ailleurs souvent dans la contrainte que naît la créativité.
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