6 recruteurs partagent leurs meilleures questions d’entretien

06 nov. 2023

5min

6 recruteurs partagent leurs meilleures questions d’entretien
auteur.e
Marlène Moreira

Journaliste indépendante.

contributeur.e

Une question bien posée peut révéler beaucoup. Pour vous aider à distinguer le grain de l'ivraie, six recruteurs et managers nous ont confié leur question secrète. Celle qui, selon eux, montre le candidat sous un jour unique.

« Pourquoi devrions-nous vous embaucher ? », « Quels sont vos trois principaux défauts ? Et vos trois principales qualités ? »… À question classique, réponse stéréotypée. Alors, comment poser celles qui transcendent les réponses toutes faites et ouvrent la voie à l’authenticité ? Pour percer le mystère des questions les plus efficaces, nous avons sollicité l’expertise de six managers et recruteurs rompus à l’exercice. Chacun d’eux a révélé celle qui, d’après leur expérience, se distingue comme un révélateur de talents. Soigneusement sélectionnées au fil de nombreuses interviews, ces questions sont des fenêtres sur la personnalité et les aspirations des candidats, des clés pour décrypter leur véritable potentiel.

« Qu’est-ce qui a fait tilt quand vous avez lu cette annonce ? »

  • Typologie : la question Coup de Foudre à Notting Hill.

Carole David, experte en recrutement chez Murfy, aime particulièrement poser cette question lors d’un premier entretien de qualification, afin d’ouvrir les échanges de manière informelle. « Il n’y a aucun piège, pas de bonne ou de mauvaise réponse », explique-t-elle. Pour elle, c’est à la fois une manière d’obtenir des indices sur la façon dont est perçue l’offre, mais aussi de connaître les motivations spontanées du candidat. « J’en ai un qui m’a déjà répondu avoir “tilté” sur le fait que l’on indique le nom du futur manager sur l’annonce, preuve de transparence d’après lui. Ou un autre qui a répondu qu’il se voyait bien évoluer dans l’environnement “pas carré carré” que j’avais décrit dans l’annonce », précise-t-elle. Une question qui offre donc un aperçu précieux des premières impressions du candidat, aussi révélatrice de sa personnalité et des valeurs importantes à ses yeux, que précieuse pour un recruteur attentif à l’image que renvoie son entreprise à travers ses écrits.

« Quelles sont vos références en matière de… ? »

  • Typologie : la question Trivial Pursuit.

Charlotte, directrice Social Media dans une agence digitale, utilise cette question pour filtrer rapidement les candidatures lors des entretiens de qualification par téléphone. « Je leur demande systématiquement quels sont les comptes et influenceurs qu’ils suivent, afin de tester leur culture Internet. S’ils me répondent un influenceur ultra connu, c’est niet. S’ils me parlent d’Hugo Décrypte, j’envisage la candidature. Et s’ils me parlent d’un compte moins connu mais avec une ligne éditoriale intéressante, je sais déjà que l’on va bien s’entendre ! », confie-t-elle. Le choix des références dévoile ici leur compréhension de la culture digitale, essentielle pour un poste dans le domaine des réseaux sociaux. Et elle révèle surtout la diversité des sources d’inspiration des candidats, offrant un aperçu de leur curiosité intellectuelle. Une question à adapter en fonction du domaine d’expertise, évidemment.

« Qu’est-ce que vous attendez de votre manager ? »

  • Typologie : la question de l’adéquation.

Pour Sofiane, Directeur Commercial dans l’e-commerce, cette question est une manière simple et rapide de juger si une collaboration est envisageable, tôt dans le processus de sélection : « Tu vois vite ceux qui ont besoin d’être très encadrés et suivis, et ceux qui préfèrent avoir de l’espace, du challenge et de la confiance. Donc en fonction du rôle et du temps que tu peux consacrer à la relation de travail, c’est une information très importante », explique-t-il. Cette question permet en effet de sonder les attentes du candidat vis-à-vis de son futur manager. En cernant ses préférences, et en connaissant le style de leadership de celui ou celle qui le supervisera, elle permet de s’assurer que la relation de travail sera harmonieuse (ou non), et que le candidat se sentira à l’aise dans son poste, au-delà de ses compétences.

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« Que feriez-vous si vous pouviez complètement changer de carrière ? »

  • Typologie : la question « plan B ».

Elliot, responsable d’un cabinet d’expertise comptable, aime terminer ses entretiens par cette question légère, mais révélatrice. « Cela me donne une idée d’à quel point la personne est loin de son rêve », explique-t-il. Comment réagir quand un candidat au poste de comptable reconnaît rêver d’une carrière de danseur de claquettes ? « Bien, rassure Elliot. Au-delà de la question, le feeling que l’on ressent à ce moment-là est important. Il permet de se rendre compte si la personne risque de nous claquer dans les doigts à tout moment, ou si elle vit bien sa situation actuelle. » Cette question lève le voile sur un aspect important de la personnalité du candidat. Elle indique non seulement ses aspirations profondes, mais permet aussi de juger s’il est en phase avec son poste actuel ou s’il est susceptible de chercher activement à réaliser son « plan B » à l’avenir. Finalement, c’est un moyen subtil de mesurer la satisfaction professionnelle, et la stabilité potentielle du candidat au sein de l’entreprise.

« Qu’avez-vous réalisé dans votre précédent poste, TRÈS concrètement ? »

  • Typologie : la question « back to the basics ».

François, dirigeant d’une société de formation, ne se contente pas des réponses préparées à cette question qui semble classique. « J’insiste, je creuse. Je demande au candidat de me parler de ses projets et de ses résultats, des aspects qu’il a aimés ou non au sein de ce même projet, de ce qu’il a ressenti quand il s’est trouvé en difficulté ou quand il a réussi, des leçons qu’il a retenues… Bref, j’essaie de gratter le vernis qu’une personne peut mettre sur ce type de réponse. Et je fais ça autant pour voir si la personne sait être authentique que pour m’aider à me projeter dans une future collaboration avec elle », résume-t-il. Cette question offre un aperçu précieux de ce que le candidat sait faire, ce qu’il aime faire, et comment il perçoit son propre parcours professionnel, ce qui peut aider à prédire sa performance future.

« Où pensez-vous être capable d’apporter de la valeur rapidement ? Et à l’inverse, quels sont les points sur lesquels nous devrions vous accompagner ? »

  • Typologie : la question de l’auto-diagnostic.

Utilisée par Carole David en conclusion d’un entretien, cette question est utile à bien des égards. « D’abord, elle permet de donner des informations complémentaires si on observe qu’il y a une différence de perception sur le contexte ou les missions », explique-t-elle. Car entre ce que l’annonce indique, ce que le recruteur ajoute et ce que le candidat comprend, il y a parfois un monde. « Ensuite, c’est aussi une manière de voir si la personne est consciente de ses forces et de ses faiblesses, et d’anticiper les points sur lesquels elle aura besoin d’être accompagnée », ajoute-t-elle. En utilisant cette question, les recruteurs peuvent évaluer la conscience que les candidats ont de leur propre adéquation avec le poste, tout en recueillant des informations précieuses sur la manière dont l’entreprise devra préparer leur intégration et leur montée en compétences. Une belle manière d’anticiper, en somme.

« Qu’est-ce que vous faites si vous devez collaborer avec un collègue que vous jugez incompétent ou avec qui vous ne vous entendez pas ? »

  • Typologie : la question « sauce piquante ».

Anthony, directeur financier dans une entreprise du BTP, reconnaît que cette question brutale lui permet de pousser les candidats dans leurs retranchements. « Ils sont souvent un peu démunis, ils essaient d’arrondir les angles comme ils peuvent. Et au fond, il n’y a pas réellement de bonne réponse. Mais cela me permet d’avoir une idée des savoir-être de la personne, de sa manière de collaborer, de sa diplomatie (ou non). Et surtout, je vois les candidats qui font au moins l’effort de chercher une bonne réponse… et dans mon milieu ce n’est pas systématique », précise-t-il. Voilà une question qui a le mérite d’être inattendue ! Tout en permettant d’évaluer les compétences relationnelles et la gestion des conflits des candidats. Autant de compétences « non techniques » essentielles dans le monde professionnel.

En utilisant judicieusement ces questions, les recruteurs révèlent des facettes importantes de chaque candidat. Mais surtout, ils nous rappellent que chaque entretien est une opportunité de découvrir des talents uniques, bien cachés derrière cet air tendu et ces réponses réchauffées.


Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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