TikTok, Discord… les réseaux sociaux, terrain de recrutement privilégié de la gen Z ?

03 mars 2025

7min

TikTok, Discord… les réseaux sociaux, terrain de recrutement privilégié de la gen Z ?
auteur.e
Paulina Jonquères d'Oriola

Journalist & Content Manager

contributeur.e

Mener sa campagne de recrutement sur TikTok ? Tel est le pari de certaines entreprises. Mais cette méthode est-elle réellement efficace pour attirer et engager la nouvelle génération de talents ? Décryptage des stratégies qui bousculent les codes traditionnels du recrutement.

Le recrutement a connu une transformation majeure au cours des dernières années, en particulier avec l’essor des réseaux sociaux. Si LinkedIn reste un outil privilégié pour les profils expérimentés, d’autres plateformes comme TikTok, Instagram ou Snapchat se positionnent désormais comme des canaux stratégiques pour attirer les jeunes talents.

Forcément, avec des millions d’utilisateurs quotidiens, ces plateformes offrent une opportunité unique aux entreprises de toucher une audience jeune et engagée. Si bien que 40 % des structures tenteraient d’attirer des candidats par ce biais désormais, selon le baromètre Hootsuite de 2021. Mais le recrutement via ces médias est-il vraiment efficace ? Quels en sont les avantages et les limites ? Et surtout, comment bien l’exploiter ?

Réseaux sociaux : le passage obligé attractif du recrutement des jeunes talents

Une audience massive et engagée

Les réseaux sociaux permettent aux recruteurs de toucher une audience bien plus large que les jobboards traditionnels. D’après une étude menée par Diplomeo et BDM en 2023, les 16-25 ans passent entre 3 et 5h par jour sur les réseaux sociaux. Et parmi ceux qui raflent la mise, TikTok figure largement en haut du podium. C’est justement cette traction que Virginie Gourc Chevriot, responsable Marque Employeur et Politique Jeune chez Saint-Gobain, est venue chercher. « À l’origine, nous avions déjà un compte sur les réseaux sociaux pour notre événement Saint-Gobain Football Cup. Nous l’alimentions avec du contenu ludique, des récapitulatifs de matchs et des messages marque employeur. Nous avons constaté un engagement qui allait crescendo : les jeunes produisaient du contenu pour que nous les publions à notre tour », explique-t-elle.

Fort de ces premiers résultats, le groupe décide d’investir, en lançant une campagne de recrutement avec 20 vidéos sur TikTok en 2024. Son objectif ? Attirer de nouveaux alternants. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le résultat est au rendez-vous : la campagne ayant enregistré 6 millions d’impressions et 90 000 candidatures, soit le double de l’année précédente. Un impact considérable qui prouve combien ces plateformes sont capables d’attirer un grand volume de candidats en un temps record.

Un canal idéal pour renforcer la marque employeur

Les réseaux sociaux ne servent pas uniquement à diffuser des offres d’emploi. Ils permettent aussi aux entreprises de valoriser leur image et de rendre leurs métiers plus attractifs. Par exemple, Saint-Gobain a mis en place des vidéos immersives où des alternants présentent leur quotidien, dans le but de dépoussiérer l’image du groupe industriel et le rendre plus humain. Ce type de contenu permet à la fois de créer une connexion authentique avec les jeunes, montrer les coulisses de l’entreprise de manière ludique et humaniser la communication RH.

« L’objectif est que les jeunes comprennent mieux qui nous sommes. Beaucoup ne penseraient pas à nous pour un job en finance ou de data scientist. Avec ces vidéos, nous leur permettons de s’immerger au cœur de nos différents métiers », nous explique Virginie Gourc Chevriot. En prime, ces vidéos ont également eu un impact positif sur les collaborateurs en interne : « Ils étaient très fiers de pouvoir montrer leur quotidien. »

Un coût attractif et un fort retour sur investissement

Par rapport aux médias traditionnels, les réseaux sociaux offrent un coût par candidature plus avantageux. Selon les chiffres de Saint-Gobain, une campagne TikTok coûte en moyenne 0,80 € par clic, un tarif très compétitif par rapport aux annonces payantes sur LinkedIn ou Indeed. « De plus, le taux d’interaction y est souvent plus élevé, et à ce titre, TikTok arrive largement en tête devant tous les autres réseaux sociaux », explique Nicolas Pasetti, CEO de l’agence de marketing RH eteam at_work. Avec une moyenne de 7-8 % sur TikTok et 3-3,5 % sur Instagram, cela signifie que les contenus sont plus susceptibles d’être vus, partagés et commentés, augmentant ainsi leur portée sans coût supplémentaire.

Entre devoir d’agilité et risque de bad buzz, les limites d’un recrutement à haut risque

Un volume élevé de candidatures, mais une qualification variable

C’est ce qui s’appelle avoir les défauts de ses qualités ! Si les réseaux sociaux permettent d’attirer un grand nombre de candidats, tous ne correspondent pas toujours aux profils recherchés. « Sur TikTok notamment, le contenu se consomme comme un snack. Si on tape très large dans le message, on risque d’avoir des candidatures peu qualifiées », relève le CEO d’eteam at_work.
Virginie Gourc Chevriot l’admet : « Nous travaillons cette année sur des questions filtrantes sur notre site carrière pour éviter des candidatures non qualifiées. Par exemple, pour un commercial itinérant, il faut obligatoirement le permis B. » Cela implique donc un travail supplémentaire pour trier les candidatures et s’assurer de leur pertinence.

Le risque d’un bad buzz

C’est certainement ce qui fait trembler les employeurs avant de se lancer : les entreprises qui ne maîtrisent pas les codes des réseaux sociaux peuvent voir leurs initiatives se retourner contre elles. « Certaines ont été accusées de “jeune washing” en tentant d’adopter un ton trop décalé ou artificiel », relate Nicolas Pasetti. Sur TikTok, les commentaires peuvent être particulièrement véhéments. « Pour se mettre à l’abri des haters, il vaut mieux éviter un message trop corporate et privilégier l’authenticité », renchérit la responsable Marque Employeur de chez Saint-Gobain.

Une stratégie qui demande une veille permanente

Contrairement aux job boards classiques, les réseaux sociaux évoluent très rapidement. Ce qui fonctionne aujourd’hui peut devenir obsolète demain. Il est donc indispensable d’adopter une stratégie agile et de rester à jour sur les tendances. Comme le rappelle Nicolas Pasetti : « Le contenu doit être adapté aux tendances du moment, tout en restant cohérent avec l’image de l’entreprise. » Cela nécessite donc des compétences en community management et une veille régulière.

Recruter via les réseaux sociaux : 4 conseils pour bâtir une stratégie (vraiment) efficace

Conseil n°1 : misez sur les bonnes plateformes

  • TikTok, le TF1 des jeunes
    TikTok n’est pas le seul réseau social pour capter les jeunes talents. « Il s’agit clairement du TF1 des jeunes, et les campagnes d’ads peuvent avoir des résultats impressionnants. Mais si on veut plus de finesse dans son ciblage, il ne faut pas oublier les autres plateformes et réfléchir en termes de personas », souligne Thibaud Michel, DG de l’agence Twinin.

  • LinkedIn et Meta, toujours dans la place
    Par exemple, un ingénieur ferroviaire peut très bien être sur TikTok, mais il n’y a pas moins de chances de le cibler directement en comparaison d’une campagne d’ads LinkedIn. De même, le groupe Meta offre de bons résultats pour les contenus sponsorisés. Les jeunes demeurent présents sur Instagram, même s’il s’agit du réseau privilégié des trentenaires. Aussi, on les trouve encore sur des groupes privés sur Facebook.

  • Snapchat, pour innover
    Bien évidemment, il y a aussi Snapchat. En 2017, la filiale australienne de McDonald’s a innové en matière de recrutement sur les réseaux sociaux, en lançant une campagne originale. Grâce à un filtre dédié, les utilisateurs pouvaient se transformer virtuellement en équipiers de l’enseigne, arborant la célèbre casquette et le badge de McDonald’s. Ils disposaient ensuite de dix secondes pour se présenter dans une courte vidéo, appelée « snap », avec l’espoir d’obtenir un entretien d’embauche.

  • Discord et Twitch, la puissance des communautés
    Enfin, il ne faut pas non plus oublier Discord, qui permet de créer des communautés en apportant de l’expertise sur un sujet. « Il ne s’agit pas d’essayer de promouvoir ses offres directement, c’est vraiment de l’inbound. Mais, on peut ensuite transférer cette communauté en l’invitant sur un événement qui a lieu sur Twitch par exemple” », souligne Nicolas Pasetti. En outre, le spécialiste estime que Twitch possède un potentiel hors norme, avec la possibilité de diffuser du contenu de qualité.

Conseil n°2 : adaptez vos formats aux codes de la plateforme

Cela va de soi et pourtant… Une énorme erreur serait de se lancer sur une plateforme sans s’adapter à ses formats spécifiques. Par exemple, vous n’aurez aucun résultat sur Instagram si vous ne publiez pas de reel ou de story. « C’est pour cette raison que nous avons préféré travailler avec une agence, et des influenceurs spécifiques », souligne Virginie Gourc Chevriot.
Nicolas Pasetti constate aussi que de nombreux recruteurs oublient qu’ils recrutent avant tout « des profils et pas des postes ». C’est pour cela qu’il juge essentiel à la fois de personnifier les communications, être volontairement clivant pour ne pas cibler trop large et faire du contenu pro… sans être pro. En effet, la plateforme TikTok, sous ses airs d’amateurisme, abrite en réalité des contenus léchés. « La vidéo doit vraiment être impactante dans les trois premières secondes », martèle le spécialiste.

Conseil n°3 : mixez contenu inspirationnel et recrutement direct

Pour Thibaud Michel, il est essentiel de bien distinguer les sujets de branding (la visibilité) et de sourcing (le recrutement) : « Souvent, les entreprises mélangent les deux dans un même post, alors que la différence entre les deux stratégies est notable. Autrement, on risque un clic déceptif. » Pour Nicolas Pasetti, la stratégie d’outbound doit, en effet, reposer en grande partie sur de l’inbound.
Et tout cela a un impact sur les KPI’s qui vont être suivis. Comme l’explique Adel Zemiti, analyste de données chez Twinin, il est donc très important de fixer ses objectifs au démarrage d’une campagne : « Quand on est sur du branding, on va regarder la durée moyenne de visionnage, le taux de rétention, le nombre de partages, de commentaires… Mais si l’on cherche de la conversion, il faut que chaque entreprise veille à installer parfaitement les différents pixels, afin d’analyser les comportements des visiteurs de leur site web. Sans ces données nous ne savons pas ce que font les visiteurs, ce qu’ils apprécient, ce qu’ils ne considèrent pas…»
Une stratégie efficace repose donc sur un équilibre entre des contenus attractifs (témoignages, coulisses, format immersif…) et des appels à l’action clairsPostulez ici », « Rejoignez notre programme jeune talent »).

Conseil n°4 : soyez aussi authentique qu’innovant

Avec l’avènement de l’IA, la jeune génération va être de plus en plus en quête de contenus authentiques, portés par des personnes sincères. « On nomme cette tranche d’âge “La Truth Generation”. Cela signifie qu’il ne faut jamais dénaturer son message premier en tant qu’employeur, sous prétexte de vouloir plaire à tout prix », martèle Nicolas Pasetti. Toujours est-il que bien exploités, ces outils permettent non seulement d’attirer des talents, mais aussi de renforcer durablement l’image employeur. « Il est important d’être toujours dans une posture d’innovation, c’est ce que cherchent les jeunes », ajoute Adel Zemiti.
Enfin, n’oublions pas que cette stratégie sur les réseaux sociaux n’empêche pas d’investir les canaux traditionnels, comme les salons étudiants, les partenariats avec les écoles… En somme, d’adopter une perspective à 360° !

Article rédigé par Paulina Jonquères d’Oriola et édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.

Vous êtes fier de votre culture d’entreprise ?

Donnez-lui la visibilité qu’elle mérite.

Nos solutions