Travailler vieux = travailler mieux ?
09 mars 2021
13min
Autrice, consultante et conférencière sur le futur du travail, spécialiste de la productivité, de l’âge et du travail des femmes
Notre monde traverse des changements démographiques spectaculaires qui nous obligent à redéfinir nombre de nos institutions. Nous ne pouvons pas continuer à envisager la carrière de la même manière. La santé et la retraite devront être organisés différemment. Notre contrat social pensé au XXe siècle semble insoutenable au XXIe siècle. Des changements culturels profonds se produisent avec l’accroissement de la longévité et le fait que les personnes âgées de 65 ans et plus commencent à être plus nombreuses que les enfants. Enfin, les mondes du marketing et des ressources humaines devraient prendre la mesure de ces bouleversements.
Pourtant, « nos institutions sont terriblement à la traîne par rapport à la nouvelle réalité. » Trop peu de spécialistes de l’avenir du travail s’intéressent aux multiples conséquences de cette révolution démographique (que même la Chine connaît actuellement). Heureusement, de plus en plus de chercheurs / chercheuses et journalistes inspiré·e·s abordent le sujet de la longévité et de ses conséquences sur le travail, la vie et la société. Andrew Scott et Lynda Gratton en font partie (voir nos articles sur les deux « must-read » The 100-Year-Life et The New Long Life). C’est le cas aussi de la journaliste du Financial Times Camilla Cavendish, Senior Fellow à la Kennedy School de Harvard, qui siège également à la Chambre des Lords au Royaume-Uni.
Son livre Extra Time:10 Lessons for an Ageing World, publié en 2019, avant que la pandémie ne prouve davantage sa pertinence, a connu un succès considérable. Pour écrire ce livre, elle a mené l’enquête dans le monde entier, ce qui l’a amenée à remettre en question les tabous autour du vieillissement que la plupart d’entre nous continuent à entretenir. Si je devais résumer le livre en une seule phrase, je dirais que nous devrions tous considérer la longévité de manière plus positive pour être en mesure de récolter les fruits de ces « prolongations ». Le livre offre des analyses pertinentes dont tous / toutes les décideurs / décideuses (dans les organisations et au gouvernement) devraient tenir compte s’ils / elles veulent se préparer à ce « nouveau monde de prolongation ». Il comporte dix leçons que je vais résumer dans cet article.
« En football, les prolongations sont la période où tout est encore possible. Ce sera le cas aussi pour beaucoup d’entre nous. De nombreuses personnes choisissent de ne pas prendre leur retraite et de retourner au travail. Les progrès de la biologie et des neurosciences nous aideront à rester jeunes plus longtemps. Mais nos institutions, et nos sociétés, n’ont pas pris la mesure de ce qui se passe. »
-Camilla Cavendish dans Extra Time.
Comment développer une culture de la reconnaissance au travail ?
1. Il nous faut prendre conscience que la démographie va modifier la culture et l’équilibre des pouvoirs
« Depuis 2020, pour la première fois dans l’Histoire, il y a plus de personnes de plus de 65 ans que de personnes de moins de 5 ans sur terre. Plus de grands-parents que de petits-enfants. » Alors que les enfants se font rares, les familles et les réseaux de solidarité se transforment. Notre pyramide des âges change d’autant plus vite que « les bébés sont passés de mode » dans de nombreux pays (notamment au Japon). Les racines de nombre de ces changements se trouvent dans une révolution féministe : « les femmes se débarrassent des traditions de service dévoué au mari et au ménage, et mettent les hommes au défi de s’adapter. »
Si vous voulez un aperçu de notre avenir démographique, regardez le Japon, écrit Cavendish. Beaucoup de personnes restent célibataires toute leur vie. Le Japon a sûrement quelques années d’avance sur les autres pays, mais il ne s’agit pas d’une situation démographique aberrante ou isolée. La Chine aussi vieillit très vite : « La population chinoise en âge de travailler est en déclin depuis 2012 et devrait diminuer de près d’un quart d’ici 2050. (…) Au milieu du siècle, la population chinoise pourrait ressembler beaucoup plus à celle du Japon - mais sans la richesse du Japon. » De nombreux experts prédisent que la population chinoise diminuera rapidement après 2029. Quant à l’Europe, les taux de natalité sont faibles depuis trois décennies. En raison du taux élevé de chômage des jeunes, l’Italie détient le record du plus faible taux de natalité en Europe.
Entre-temps, l’espérance de vie n’a cessé de croître tout au long du XXe siècle : « entre 1970 et 2011 (…) l’espérance de vie à 65 ans a augmenté 20 fois plus vite qu’au siècle précédent. La raison principale ? Une baisse massive des décès dus aux crises cardiaques et aux accidents vasculaires cérébraux, grâce au fait que les gens renoncent à la cigarette. » Ces changements vont transformer l’équilibre des pouvoirs entre les pays (à différents stades de leur transition démographique) et entre les générations au sein des pays.
2. Vous êtes plus jeune que vous ne le pensez : les étapes de la vie changent
« Le défi pour les PDG est considérable. La main-d’œuvre multigénérationnelle est déjà là, mais il n’est pas toujours facile de la manager. Même si les emplois sont automatisés, les départs à la retraite des baby-boomers créent une pénurie de compétences. Nous avons besoin d’une révolution de l’éducation, à la hauteur de la quatrième révolution industrielle. »
-Camilla Cavendish dans Extra Time.
Notre société vieillit, mais cela nous amène aussi à redéfinir ce que cela signifie d’avoir 50, 60 ou 70 ans. En fait, chaque étape de notre vie est en train d’être redéfinie. Par exemple, le stade de l’adolescence dure beaucoup plus longtemps : « le stade de l’adolescence devrait durer jusqu’à 24 ans. C’est l’âge moyen auquel les enfants quittent le foyer familial au Royaume-Uni. » Ce n’est pas la vieillesse qui s’allonge, explique Cavendish, c’est l’âge moyen. Aux États-Unis, par exemple, une majorité écrasante (75 %) des personnes âgées de 60 à 75 ans n’ont pas de déficience cognitive et physique. De moins en moins de gens développent de la sénilité. On croyait autrefois que la démence était inévitable dans la vieillesse. Ce n’est pas le cas.
Le plus vieux pays du monde, le Japon, a déjà (en partie) pris la mesure de cette nouvelle réalité en établissant une distinction entre les « jeunes vieux / vieilles » (ceux qui sont en bonne santé, indépendants et actifs) et les « vieux vieux / vieilles vieilles » (ceux qui sont fragiles et ont besoin d’aide). Les « jeunes vieux / vieilles » sont plus nombreux / nombreuses à continuer à travailler, à rester actifs / actives, à garder un but et à se rapprocher des autres. « Nous assistons à un découplage entre l’âge biologique et l’âge chronologique. » « Les prolongations nous ont donné une toute nouvelle étape de la vie : l’étape « jeune vieux / vieille. Il faut (…) arrêter de mettre dans le même panier les personnes de 60 à 100 ans et accepter qu’il est normal d’être dynamique et valide à 70 ans. »
Bien que cela ne signifie plus la même chose d’avoir 65 ans aujourd’hui, la plupart des systèmes de retraite sont toujours basés sur l’idée que c’est à ce moment-là qu’il faut s’arrêter de travailler. « Dans toute l’Europe, l’âge de la retraite ne suit pas le rythme de l’espérance de vie ». Les recruteurs / recruteuses et les médias continuent de véhiculer des stéréotypes dépassés qui dénigrent les personnes de plus de 50 ans. Notre langage transforme souvent les gens âgés en des « êtres inférieurs ». La désinvolture de l’âgisme rend la chose d’autant plus néfaste. La publicité, par exemple, se nourrit de l’idée que nous menons une « bataille constante » contre l’âge.
La plupart d’entre nous avons tendance à sous-estimer notre espérance de vie parce que nous basons nos attentes sur la vie (et l’âge de décès) de nos grands-parents. Le fait est qu’il existe de fortes inégalités en matière d’espérance de vie. L’éducation reste un facteur déterminant. « On ne sait pas très bien pourquoi l’éducation est si vitale. Certain·e·s expert·e·s affirment que les gens éduqués sont mieux à même de planifier et d’exercer un contrôle de soi, ce qui peut les aider à choisir un mode de vie plus sain. L’éducation a également une incidence sur le type d’emploi que nous exerçons. »
3. Si le sport et l’alimentation saine étaient une pilule, on en prendrait tous / toutes
Il existe des différences marquées entre individus en termes d’âge biologique. Mais les gènes n’expliquent qu’une petite partie de ces différences. Notre destin biologique dépend principalement de facteurs environnementaux : « ce que nous mangeons et buvons, le degré de stress, le niveau de pollution, l’exercice physique ». De nombreuses études ont été publiées au cours des trois dernières décennies sur l’importance du sport, quasi « remède miracle » contre nombre de maladies chroniques et la détérioration physique en général.
Hélas, les modes de vie sédentaires sont de plus en plus courants. À bien des égards, la sédentarité est le « nouveau tabac », affirment de nombreux / nombreuses scientifiques. (La pandémie qui a fait que les gens bougent beaucoup moins pourrait d’ailleurs avoir un impact néfaste durable sur notre santé). Nous confondons souvent l’impact délétère d’un mode de vie sédentaire avec ce qu’est le vieillissement normal : « nous confondons les effets du véritable vieillissement avec ce qui est principalement une perte de forme physique, causée par un manque d’activité. »
Il y a quatre aspects de la forme physique qui doivent être améliorés : la force, l’endurance, la souplesse et l’habileté. Le développement de tous ces aspects combinés aide à réduire toutes sortes de problèmes de santé et de problèmes mentaux. Mais pour que les bienfaits de l’exercice soient réels, nous devons nous mettre des défis à chaque âge, et pas nous « détendre » à 80 ou 90 ans. L’exercice physique, cela n’est cependant pas aussi facile que prendre une pilule. Il n’est pas soutenu par une industrie de plusieurs milliards d’euros dotée d’un fort pouvoir de lobbying (l’industrie pharmaceutique). Et il exige une profonde compréhension de nos comportements et de la manière de nourrir la motivation.
Malheureusement, les taux élevés d’obésité font perdre de nombreuses années de vie à de nombreuses personnes. Ce sont les États-Unis qui ont le plus fort taux d’obésité de tous les pays industrialisés : d’ailleurs, leur espérance de vie a cessé d’augmenter depuis quelques années. L’obésité et le mode de vie sédentaire rendent la longévité et le vieillissement en bonne santé de plus en plus inégalitaire. Ce sont des problèmes qui ne sont malheureusement pas abordés par nos systèmes de santé qui ont été historiquement « mis en place pour traiter les maladies, pas pour préserver la santé. »
4. Pour certaines personnes, il peut être judicieux de reporter le départ à la retraite
Prendre sa retraite à 65 ans peut sembler souhaitable, mais la vérité est que cela ne rend pas nécessairement les gens heureux. « Et si la retraite pouvait nous faire vieillir ? » interroge Cavendish. La perte de but et de la reconnaissance des autres, le manque de vie sociale, l’ennui et l’inactivité qui accompagnent souvent la retraite rendent beaucoup de gens très malheureux. C’est pourquoi le « mouvement des Silver Centres » a été créé au Japon pour redonner aux personnes âgées du sens et du lien. « Le premier Silver Centre a été fondé en 1975 par un professeur de l’université de Tokyo et quelques ami·e·s retraité·e·s qui voulaient compléter leurs revenus, maintenir leur santé et contribuer à la société. (…) Votre salaire n’est pas tout : avoir un endroit où vous raoyonnez, c’est important. »
Nous sous-estimons souvent la contribution des entrepreneurs / entrepreneuses et des employé·e·s plus âgé·e·s. Chez les Américain·e·s, les 55-65 ans ont en fait 65 % de chances de plus de créer une entreprise que les 20-34 ans ! Et ils / elles ont aussi un taux de réussite plus élevé. Le monde du capital-risque qui investit dans les start-ups ne devrait pas passer à côté de ces entreprises : il n’y a pas de raison de faire de l’âgisme ! De plus en plus de personnes choisissent de ne pas prendre leur retraite ou de retourner travailler après avoir pris leur retraite. « Un·e Américain·e et un·e Britannique sur quatre retournent au travail après avoir officiellement pris leur retraite. Leurs raisons sont à la fois financières et psychologiques. » Ils / elles sont souvent très éduqué·e·s. Bien sûr, la non-retraite a plus de sens pour les personnes qui aiment leur travail. Si vous détestez votre travail, il est plus pertinent de le quitter plus vite pour vivre mieux.
La discrimination sur le marché du travail rend la vie plus difficile à ces nombreuses personnes qui aimeraient continuer à travailler. « En 2018, une commission parlementaire britannique a conclu que le talent de plus d’un million de personnes de plus de 50 ans est gaspillé en raison de préjugés et de pratiques de recrutement dépassées. » Cela ne manquera pas de causer d’énormes problèmes à l’avenir. En fait, les pays vieillissants comme l’Allemagne (et le Japon) ont besoin que davantage de personnes âgées continuent à travailler pour remédier à la pénurie massive des talents.
L’idée que les travailleurs / travailleuses âgé·e·s sont forcément moins productifs / productives est fausse. Des ajustements mineurs en termes d’ergonomie et d’organisation peuvent contribuer à maintenir (voire accroître) la productivité bien au-delà des attentes. (Par exemple, en Allemagne, BMW a procédé à certains ajustements avec beaucoup de succès). Il convient également de créer « une véritable méritocratie de l’apprentissage continu » pour développer et exploiter le potentiel des individus de tous les âges.
- Lire aussi : Carrière : pourquoi l’âge ne compte plus
5. Pour rester en forme, votre cerveau devra continuer à apprendre
Les neuroscientifiques expliquent que notre cerveau a bien plus de plasticité que nous le pensions. La perte de mémoire n’est pas inévitable. Le cerveau n’est pas figé à l’âge adulte. « Nous remodelons continuellement les connexions entre nos neurones dans notre expérience du monde, et notre comportement peut modifier notre cerveau. » « Utilisez-le ou perdez-le » : en apprenant quelque chose de nouveau, en changeant notre environnement et en recherchant des stimulations, nous pouvons préserver la plasticité de notre cerveau. L’âge n’est pas forcément un obstacle à l’apprentissage. Il y a toutes les raisons de continuer à investir dans votre apprentissage et de relever de nouveaux défis.
6. Les médicaments anti-vieillissement progressent
L’exercice physique et l’alimentation ont un impact plus important que les médicaments. Pourtant, les progrès de la médecine sont étonnants. Il y a une « ruée vers l’or de l’immortalité » dans la Silicon Valley, par exemple, où les scientifiques travaillent à réduire le temps que nous passons au stade de « vieux / vieille ». Des entrepreneurs / entrepreneuses et autres obésédé·e·s du quantified self et du développement personnel essaient toutes sortes de choses comme le jeûne et la restriction calorique, et recueillent des données précieuses pour aider les scientifiques à en apprendre davantage. Les scientifiques avancent également sur la génétique du vieillissement. « Il existe des gènes du vieillissement (…) et ces gènes peuvent être manipulés. » La plupart s’accordent à dire que l’humanité est confrontée à une limite d’âge biologique (environ 120 ans). Mais il ne faut pas considérer cette limite comme immuable. De nombreuses autres découvertes peuvent contribuer à repousser des limites physiques que nous pensions auparavant impossibles à repousser.
7. Tout le monde a besoin d’une vie de quartier / d’une communauté
« La clé d’un vieillissement en bonne santé, ce sont les relations, les relations, les relations », a déclaré George Vaillant, un psychiatre de Harvard. Autrefois, le quartier, c’était l’endroit où l’on pouvait se sentir en sécurité et développer des relations. Mais notre mode de vie moderne rend les gens de plus en plus seuls. Au Royaume-Uni (les chiffres sont plus ou moins les mêmes dans de nombreux pays), plus d’un tiers des personnes de plus de 65 ans vivent seules. Et ceux / celles qui vivent dans des maisons de retraite sont souvent déshumanisé.e.s. (Le taux de mortalité dans ces maisons pendant la pandémie illustre cette déshumanisation de manière tragique).
C’est pourquoi de nouvelles communautés apparaissent dans le monde entier pour offrir aux personnes âgées un « quartier » plus agréable. Par exemple, au Danemark et aux Pays-Bas, des groupes d’individus ont déjà commencé à se regrouper dans le « co-housing » dans les années 1960. De nouvelles alternatives de logement apparaissent, basées sur l’idée que les différentes générations doivent se mélanger (et si les étudiants pouvaient faire entrer le monde extérieur dans la vie des vieux ?). Les « jeunes vieux / vieilles » ne veulent pas d’une vie tranquille, ils / elles veulent vivre comme ils / elles l’entendent. Les « vieux vieux / vieilles vieilles » ne veulent pas être trimballé·e·s et commandé·e·s, ils / elles veulent rester les auteurs / autrices de leur propre vie. « Ce dont chacun·e a besoin, c’est d’un quartier, de préférence conçu avec sa participation. Les avantages évidents des liens sociaux et de la communauté signifient qu’il devrait être dans l’intérêt des gouvernements de faciliter le co-housing. »
8. Nous avons besoin d’une révolution du care, avec ou sans robots
Presque partout, le travail du care est dévalué, sous-payé et souvent éreintant. Pourtant, écrit Cavendish, ce travail est en réalité hautement qualifié. Avec le vieillissement de notre population, nous allons avoir besoin de plus en plus de travailleurs / travailleuses du care, mais nous aurons de plus en plus de mal à les recruter (il y a déjà une énorme pénurie de soignant·e·s en Europe). La bureaucratie et la division du travail ont déshumanisé les soins de santé. « Trop de gens se retrouvent coincés entre différents silos médicaux, avec de longues attentes, devant répéter leur histoire à chaque fois. Et il y a une déconnexion presque totale entre le service de santé et le social. »
Cavendish consacre plusieurs pages à la « révolution » que représente Buurtzorg aux Pays-Bas. « C’est ce qui arrive quand on fait passer l’humanité avant la bureaucratie. » Buurtzorg est une organisation de soins néerlandaise fondée en 2007, qui permet aux infirmiers / infirmières de prendre leurs propres décisions avec chaque patient. Elles travaillent de manière autonome, en petites équipes de 10 à 12 personnes, et l’équipe support de Buurtzorg est limitée à un petit groupe d’individus qui s’occupe de l’informatique et de la paie. Le modèle de Buurtzorg fonctionne incroyablement bien pour trois raisons : premièrement, la continuité des soins ; deuxièmement, le lien qui est fait avec les réseaux familiaux ; troisièmement, l’absence de division du travail. Dans d’autres systèmes, beaucoup de ressources sont consacrées à attribuer les tâches aux travailleurs / travailleuses les moins chers, ce qui constitue une « fausse économie ».
« Traiter les gens comme des êtres humains, établir de bonnes relations et bien payer ceux / celles qui ont une vocation pour le savoir-faire des soins infirmiers peut sembler relever du bon sens. Mais dans le monde d’aujourd’hui, c’est radical. » « Les systèmes de santé sont toujours organisés pour traiter les problèmes d’hier. Nos systèmes d’après-guerre sont encore largement orientés sur les maladies ponctuelles, plutôt que sur la prévention et le traitement de maladies chroniques. »
9. Trouver son Ikigai = trouver le sens de la vie
« Le temps supplémentaire devrait être un cadeau. » Mais si vous n’avez rien à faire de ce temps, pas de but ni de communauté, alors ça n’est pas un cadeau. « Nous autres humains avons besoin de sens pour vivre une vie épanouie. » Toutes les études montrent que les personnes âgées qui se sentent utiles sont plus heureuses et en meilleure santé. Les Silver Centres japonais mentionnés plus haut sont organisés autour du concept d’Ikigai qui réunit le spirituel et le pratique. L’Ikigai réconcilie le travail, la famille, le devoir et les passions.
Un célèbre diagramme de Venn montre l’Ikigai comme l’intersection entre ce que vous aimez, ce dont le monde a besoin, ce pour quoi vous pouvez être payé et ce pour quoi vous êtes bon. Pour beaucoup de personnes, l’Ikigai vient de l’aide qu’elles apportent aux autres. Dans les communautés où les personnes âgées trouvent des moyens d’aider les autres, il y a plus d’Ikigai. Cavendish donne l’exemple (magnifique) des Friendship Benches au Zimbabwe où les grands-mères aident les gens du village (apparemment, elles traitent mieux la dépression que les médecins qualifiés !) « Faire le bien vous fait du bien. »
La contribution d’un plus grand nombre de personnes âgées pourrait résoudre bon nombre des problèmes que nous connaissons : une pénurie d’enseignant·e·s et d’infirmiers / infirmières et un accroissement de la solitude et de l’isolement. « Des bénévoles dévoué·e·s peuvent également faire une différence réelle et mesurable dans les services publics. »
10. Il nous faut un nouveau contrat social
« Depuis 50 ans, les citoyen·ne·s qui grandissent dans les pays industrialisés bénéficient d’un contrat social implicite : ils / elles travaillent dur et paient des impôts, et peuvent s’attendre à une hausse du niveau de vie, à un filet de sécurité si les choses tournent mal et à une pension (…) Mais ce contrat est maintenant menacé. » Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes en Europe et aux États-Unis ne s’attendent plus à recevoir une pension de retraite lorsqu’ils / elles vieilliront. Le ratio actifs/inactifs rend nos systèmes intenables. L’évolution démographique, conjuguée à une augmentation spectaculaire des inégalités de richesse, remet en question les transferts intergénérationnels et le contrat social de manière inédite. Nous ne devons pas laisser les générations actuelles s’approprier les ressources des générations futures. Cela sera probablement LA question sociale et politique de ce siècle.
Inspirez-vous davantage sur : Laetitia Vitaud
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