Recrutement : comment rappeler un candidat qu'on a déjà refusé ?
25 mai 2021
4min
Rédactrice indépendante.
Peut-on recontacter un·e candidat·e après avoir écarté sa candidature ? Exercice de haute-voltige, c’est pourtant une pratique très courante chez les recruteurs. Sur des métiers en tension, le choix des candidat·e·s est souvent restreint et 76% des recruteurs entretiennent un vivier en vue de futures embauches (selon une enquête RégionsJob 2019). La probabilité de retomber sur l’un·e d’entre eux/elles paraît presque inévitable ! Ensuite, il y a l’art et la manière de le faire… Comment renouer le contact le plus efficacement possible ? De quelle manière aborder le nouveau poste ? Dans quel cas, faut-il lâcher l’affaire ? Nos bonnes pratiques pour renouer avec un candidat dans les meilleures conditions.
Bien se séparer pour mieux se retrouver
La reprise de contact dépend beaucoup de la manière dont vous aurez refusé le/la candidat·e la première fois. Inès Giraud, « tech sourceuse » chez Doctolib abonde : « Dans le recrutement, tu retombes souvent sur les mêmes personnes. Il faut absolument se quitter “bons amis” ! Alors, même si donner un retour négatif n’est pas très agréable, il faut le faire en donnant un maximum d’arguments au candidat ». En « ghostant » le/la candidat·e, il va sans dire qu’il sera d’autant plus difficile de le/la rappeler ultérieurement. Une appréciation que des chiffres viennent sanctionner puisque selon Le Book Focus RH (31ème édition 2019), 57% des candidats ne souhaitent plus postuler aux offres d’une entreprise lorsqu’ils n’obtiennent pas de réponse après l’envoi d’une candidature ou suite à un entretien. Et on le comprend : il n’y a rien de plus frustrant que de ne pas savoir pourquoi sa candidature n’a pas été retenue. Au contraire, un·e candidat·e sera toujours plus à l’écoute d’un recruteur qui prend le temps de lui expliquer le contexte de ce refus. Inès Giraud poursuit : « Un refus doit être réalisé en donnant un maximum d’explications au candidat. Mais aussi de la perspective. Par exemple, en lui proposant de garder contact en vue de prochaines opportunités ou le/la tenir informé·e sur les évolutions de l’entreprise* ».
La reprise de contact : une préparation de haut-niveau
Avant de rappeler un candidat, il s’agit de bien préparer son argumentaire. Dit autrement : aucune place pour l’improvisation. Inès Giraud insiste sur le fait de bien connaître le contexte du premier refus pour pouvoir mieux aborder vos retrouvailles : « En ayant les éléments en tête, tu peux préparer ton argumentaire et expliquer pourquoi, désormais , le profil de la personne t’intéresse : changement de management, nouvelle organisation, nouveaux besoins, virage dans la stratégie de l’entreprise… ». En retraçant l’historique, il est possible de comprendre si le premier refus était lié aux soft-skills, aux compétences techniques ou à un alignement avec la culture d’entreprise. Ainsi, le recruteur peut poser de nouvelles bases et entamer sereinement ce second round. « Il faut presque se positionner en coach carrière en écoutant le/la candidat·e et en lui exposant les bons leviers pour lui donner envie de rejoindre l’aventure, une nouvelle fois », poursuit Inès Giraud.
Suis-moi, je te suis
C’est bien connu, il existe des scénarios catastrophes dans la vie du recruteur. « *La pire des situations est de devoir rappeler un·e candidat·e que tu n’as pas suivi·e et dont tu ne connais pas l’historique. Tu ne sais pas ce qu’il s’est passé : est-ce un “non ferme” côté entreprise ? Le/la candidat·e a-t-il/elle mal réagi ? », confie Inès Giraud. La clé ? Suivre les candidatures pour relancer avec tact. Pour cela, pas de secret : il faut s’outiller. Que ce soit un ATS, LinkedIn recruiter ou même Excel, ces systèmes permettent d’ajouter des commentaires sur une fiche candidat. Il est donc possible de connaître l’objet du refus ou encore la manière dont cela s’est passé puis, d’évaluer la probabilité de le/la rappeler pour un futur poste. Ça, c’est pour le côté « back office ». Côté « front », il est impératif d’entretenir le relationnel avec son vivier de candidat·e·s (refusé·e·s ou pas) ! « Régulièrement, il faut faire le tour de son pool. En gros, il s’agit de les appeler, pour prendre le pouls, leur communiquer des nouvelles informations ou encore échanger sur l’état du marché », déroule Inès Giraud. Ainsi, un lien de confiance se crée et se consolide entre recruteurs et candidat·e·s : un investissement pour les futurs recrutements. Et surtout, on évite le rappel maladroit après de longs mois d’absence : « Alors, qu’est-ce que tu deviens ? Au fait, j’ai un super poste pour toi* ». Moment de solitude assuré.
Téléphone, mails, sms : quel canal privilégier ?
Évidemment, cela dépend. Le moyen de communication à privilégier pour rappeler un·e candidat·e est généralement fonction du degré d’engagement dans le processus de recrutement initial. « Si c’est une personne qui avait bien avancé dans le processus de recrutement et qu’il y a eu des interactions avec l’équipe, j’utilise le téléphone. Après, si j’ai échangé avec la personne par email, et que cela fonctionnait bien, j’utilise le même canal pour reprendre contact. Il faut s’aligner sur l’existant », dévoile Inès Giraud. Autre donnée à prendre en compte : le niveau du poste. Si c’est un·e manager·euse ou pour un poste clé dans l’entreprise, ne pas hésiter à décrocher son téléphone. Il est plus simple de donner du contexte, d’établir un échange personnalisé avec la personne et de l’embarquer dans cette nouvelle dynamique de recrutement.
Une reprise de contact compliquée : les gestes simples
Il arrive que malgré toute la bonne préparation abattue, une personne réagisse mal à une reprise de contact. Heuresement, il y a Inès Giraud : « Ce n’est vraiment pas simple à gérer mais c’est fréquent. Pour faire face à ce type de situation, il ne faut pas hésiter à canaliser le négatif en écoutant la personne. L’écoute est primordiale dans notre métier. Ensuite, ne pas hésiter à expliquer en quoi les choses ont changé en interne et pourquoi, aujourd’hui, son profil est pertinent ». Le plus important : ne pas renchérir par orgueil ou par ego. Ne l’oublions pas, l’objectif numéro un est de le/la convaincre de vous rejoindre. Dans cette optique, l’empathie (avec une touche de « low profile ») est votre meilleur allié.
Les trois écueils du recruteur débutant
Faire comme si c’était la première fois que vous parliez au/la candidat·e. Le déni de réalité est rarement une bonne idée pour construire une relation professionnelle, une relation tout court même. Assumez, contournez et embarquez le/la dans un nouveau projet commun grâce à votre argumentaire en béton !
Mettre tout sur le dos d’un collègue recruteur qui aurait mal fait son job. Mieux vaut tabler sur un changement interne, une nouvelle stratégie ou des besoins différents pour le/la convaincre.
Être trop sûr·e de soi ou susceptible. « Les refus ou les échanges un peu tendus font partie de la vie du recruteur. Si tu le prends mal ou que tu n’es pas équipé émotionnellement, il faut changer d’activité ou apprendre à prendre du recul », affirme Inès Giraud.
Photo par WTTJ
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