Recherche d'emploi : faites une to-don’t list pour choisir votre prochain job
20 avr. 2023
4min
Savoir ce que l’on veut n’est pas simple, un peu comme quand on doit choisir une orientation après le lycée (alors que souvent, on n'en a aucune idée). Un flou quant à nos envies professionnelles qui peut se poursuivre en début de sa vie pro voire à un stade plus avancé de sa carrière. Parfois, on a besoin de nouveauté sans que cette envie ne soit clairement définie. Dans ce cas, pourquoi ne pas dresser une to-don’t list ? Tel un choix par élimination, c'est une liste met en exergue ce que l'on veut fuir. Un premier pas pour tendre vers le poste qui nous conviendra le mieux.
Au VIème siècle, le pseudo-Denys l’Aréopagite, un auteur athénien de traités chrétiens créait la théologie négative, ou via negativa. Le concept ? Dieu ne pouvant être décrit, il doit être raconté par ce qu’il n’est pas. Hors du prisme religieux, la via negativa se concentre sur ce qui est tangible afin d’agir sur des situations par une connaissance dite soustractive. Dans un certain sens, la to-don’t list peut être considérée comme une interprétation contemporaine de cette théorie grecque : elle permet de lister, point par point, toutes ces choses que l’on a observées, rencontrées ou vécues, et dont on veut plus.
L’intérêt du négatif
À l’inverse de la to-do list dont l’objectif est de rayer les points au fur et à mesure qu’on les réalise, la to-don’t list a un aspect permanent. La liste des choses “à ne pas faire” n’a pas pour objectif d’organiser et d’optimiser le quotidien, mais plutôt d’agir comme rappel de nos propres limites et des éléments qui nous apportent plus de désagrément que de satisfaction. Dans le cadre d’une recherche d’emploi, les items de cette liste peuvent concerner différents aspects : les horaires de bureau, la taille de l’entreprise, les valeurs éthiques, le salaire, la hiérarchie… Quadriller les aspects que l’on considère comme négatifs peut permettre, par effet miroir, de délimiter les contours de l’emploi qui correspondra le mieux à nos attentes.
Ex-secrétaire de direction, Pénélope (1) a mis fin à son contrat dans une grosse entreprise pour tendre vers une activité qui lui apporterait plus de bonheur et surtout, moins de prises de tête. Sans projet prédéfini, ses quelque trente années en entreprise lui ont permis de mieux cerner ses attentes : « Mon dernier poste m’a plongé dans une déprime et j’ai été en arrêt-maladie pendant plusieurs mois. Je n’en pouvais plus de ces grosses structures, de ces process compliqués et de mes retours aux ressources humaines qui n’aboutissaient jamais sur aucun changement. » Sans faire de bullet list à proprement parler, Pénélope a exploré d’autres activités, en gardant en tête les éléments qui l’avaient fait fuir son poste. Cette fois, elle ne veut plus de multinationale, plus de travail entièrement en présentiel, ni de process fastidieux qu’elle ne comprend pas. Loin du monde de l’entreprise, elle planche désormais sur un projet en freelance centré autour de l’écriture… radicalement opposé à son ancien quotidien, fait de tableaux Excel, de réunions et de grosses sueurs devant son écran.
La to don’t list : mode d’emploi
Comme savoir ce que l’on ne veut pas ? On vous explique comment mettre en place votre to don’t list.
1. Analysez vos expériences passées
Pour réaliser sa to-don’t list, une prise de recul et un travail d’introspection sont nécessaires. Mais pour cela il faut surtout de l’expérience, rappelle Mila Elhamdi, coach et consultante en gestion de carrière : « Savoir ce que l’on ne veut pas nécessite de se confronter au terrain, il ne faut pas se cantonner à ce que l’on sait, mais rester ouvert vis-à-vis du marché du travail. » C’est seulement avec de l’expérience que vous pourrez savoir quelles situations, quelles missions et conditions vous ne voulez pas. L’être humain ayant une capacité particulière à relever le négatif – comme quand, à peine après avoir lancé un navet sur Netflix, vous ne pouvez vous empêcher de lister tout ce que le film a de gênant –, s’appliquer à lister les défauts du monde du travail ne devrait pas être si compliqué. Il ne s’agit pas de roasterson N+1 ou ses collègues, mais de souligner les situations qui nous ont mis en position d’inconfort ou en trop grande difficulté.
2. N’oubliez pas le positif
La to-do et la to-don’t n’ayant pas le même objectif, les deux listes peuvent être complémentaires. Si la to-do classique est généralement utilisée pour énumérer et classer des tâches, dans le cadre d’une recherche d’emploi, elle peut prendre une autre forme, afin de lister les choses que l’on souhaite retrouver dans son futur poste. Cela peut concerner le domaine que l’on vise, l’utilité ressentie au travail, l’utilisation récurrente de certaines compétences, une cantine qui sert des frites le midi… Mises côte à côte, ces deux listes peuvent constituer un guide précieux dans votre recherche d’emploi.
3. Prenez acte de vos résolutions
Faire une liste de résolutions c’est bien, en prendre compte lors de ses recherches d’emploi, c’est mieux. Après avoir listé par ordre de priorité les éléments que vous souhaitez fuir, adaptez vos critères de recherche… et votre CV. « Si vous reprenez le dernier CV grâce auquel vous avez intégré un poste qui ne vous a qu’à moitié satisfait, vous risquez de retomber sur une fiche de poste similaire. Pour opérer un vrai changement, il faut réajuster votre CV afin de l’orienter vers les missions et les mots-clés qui vous intéressent », poursuit la coach en gestion de carrière. Aussi, mieux vaut esquiver une offre plutôt que de gaspiller son énergie dans une candidature – ou un poste – qui n’aboutira sur rien de bon.
4. Restez flexible
L’ensemble de votre to don’t list ne doit pas être complètement rigide, au risque que celle-ci ne devienne une contrainte. Si l’un de vos critères négatifs se retrouve au beau milieu d’une offre qui vous fait de l’œil, pourquoi ne pas discuter de vos appréhensions avec le recruteur. En expliquant pourquoi tel élément de la fiche de poste vous rebute, il peut être possible d’ajuster certains paramètres du poste à pourvoir. « Une fiche de poste est mouvante, il faut attendre l’entretien pour discuter des points qui peuvent être négociés, à l’instar des conditions de travail », rappelle Mila Elhamdi. Si l’on demande de l’anglais courant et que vous n’avez qu’un niveau A2, pourquoi ne pas commencer à suivre des cours ? Idem avec le télétravail : si vous avez besoin de passer quelques jours à travailler depuis chez vous, cela peut être abordé lors de l’entretien d’embauche.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la to-don’t list ne consiste pas à voir le verre à moitié vide. Le négatif, à travers l’analyse de ses expériences passées, permet aussi de prendre la bonne direction. La liste de ce qui nous rebute dans le monde pro peut servir de guide au moment de mettre à jour son CV, de trier les offres d’emploi et d’aborder un entretien d’embauche, pour ne pas réitérer les mauvais choix. Se connaître et avoir conscience de ce que l’on ne veut pas n’est pas seulement utile dans un moment d’errance professionnelle : garder ses points de vigilance en tête permet aussi de mieux mener une négociation et de faire des choix plus éclairés tout au long de sa carrière.
(1) Le prénom a été modifié
Article édité par Gabrielle Tremblay ; Photo par Thomas Decamps
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