Bien-être au travail : pour ou contre le flex office ?
23 juin 2020
4min
L’expression est à la mode, l’aventure séduit les grands patrons. Le « flex office », littéralement, « bureau flexible », est un projet d’entreprise avec en son coeur, un nouvel espace de travail. Concrètement : plus de postes individuels, plus d’open space. A la place, de grandes pièces aménagées, design et lumineuses, où les salariés « sans bureau fixe » vaquent à leurs activités.
L’idée ? Adapter le groupe à l’ère du tout portatif et du tout digital. Un décloisonnement censé faciliter les échanges, et booster la réactivité, le collectif, et l’esprit d’initiative. Mais derrière ce vernis de modernité, la réalité est évidemment plus complexe qu’il n’y paraît. Faut-il opter pour le nomadisme d’entreprise ? On fait le point.
POUR
Des salariés conquis
« Depuis le passage en flex en septembre 2017, la plupart des employés disent qu’ils ne pourront jamais revenir en arrière », assure Elisabeth Candussi, chargée de la mise en place et du développement du programme chez PSA pour les sites tertiaire de Rueil et Poissy. Pourquoi un tel enthousiasme ? Les travailleurs migrateurs auraient, en fait,le sentiment d’être plus libres.
Depuis le passage en flex en septembre 2017, la plupart des employés disent qu’ils ne pourront jamais revenir en arrière.
Plus mobiles dans l’espace de travail, affranchis d’une organisation rigide, ils deviennent acteurs à part entière de leurs desseins dans l’entreprise mais aussi … dans leur vie. Car le plus souvent, ils peuvent opter pour le « home office », généralement complémentaire du projet. Dans les sociétés pionnières,le télétravailest d’ailleurs largement plébiscité. Ils sont un sur deux a l’avoir adopté un jour par semaine, dans les 14 entités sondées par une vaste étude JLL menée sur le sujets en 2018.
Un accélérateur de potentiels
Le point de départ de cette aventure est la volonté de moderniser l’établissement et d’optimiser un endroit souvent mal réparti. « Quelle que soit l’entreprise, l’une des réussites reste l’introduction des espaces informels de type workafé, mini-kitchen, break point… Souvent absents des aménagements traditionnels, ces espaces de détente et de vie sont invariablement plébiscités par les collaborateurs pour la convivialité et les échanges informels qu’ils favorisent » analyse Flore Pradère, auteure de l’étude JLL précitée.
Derrière ces travaux, se trouve en effet un projet d’entreprise global. L’idée ? Provoquer un changement culturel et insuffler un nouveau rapport au travail. « Les sujets sont traités beaucoup plus vite, les échanges sont plus directs, il en ressort une meilleure réactivité pour régler un problème ou avancer sur un sujet », explique Elisabeth Candussi. Le passage à l’ère du « tout mobile » casse le système hiérarchique, s’accompagne d’une nouvelle gestion des équipes, par la confiance et les objectifs. In fine, cette aventure professionnelle fait émerger chez les employés un esprit d’initiative.
Une marque employeur fortifiée
Le cachet « flex » offre un réel pouvoir d’attractivité. Il renvoie l’image d’un groupe précurseur, à la pointe. Certaines sociétés affirment recruter plus facilement grâce à cette transformation, tandis que d’autres misent dessus pour attirer les talents. « On a surfé sur le fait que beaucoup de jeunes informaticiens n’étaient plus attirés par les grandes entreprises et leurs modes de fonctionnement traditionnels », explique Jean-Marc Castaignon, de la Société Générale.
L’opération de charme fonctionne notamment sur les plus jeunes, ceux de la Génération Y et les millenials, adeptes du clic, du zapping, et du changement. Devenir un travailleur nomade donne finalement l’impression, que chaque journée de travail sera différente, à reconstruire selon ses envies, ses besoins et ses exigences.
On a surfé sur le fait que beaucoup de jeunes informaticiens n’étaient plus attirés par les grandes entreprises et leurs modes de fonctionnement traditionnels.
CONTRE
Le moule « flex » n’est pas universel
Sur le papier, l’intention est louable. Mais en pratique, cette nouvelle organisation heurte inévitablement à certains métiers. Les comptables ou les juristes par exemple peuvent-ils se passer des dossiers papiers et se lancer dans le tout digital ? Chez PSA, les salariés ont été répartis par zones pour tenir compte des spécificités de chacun et, « des adaptations ont été faites pour certaines activités », reconnaît Elisabeth Candussi.
« En moyenne, on a calculé un taux d’occupation de 0,8 % (8 bureaux pour 10 personnes), ce qui est large en raison des réunions ou des déplacements. Pour certaines activités notamment de juriste, ou de comptabilité, nous avons augmenté le taux d’occupation de 0,9 %. L’étude s’est faite au cas par cas pour répondre aux activités, en accord avec les managers. » Une matrice intéressante donc, mais pas applicable à tous.
Des efforts d’adaptation pour les employés
Il faut le savoir : l’idée d’un passage en flex crée généralement des angoisses dans un groupe. Auprès des non-pratiquants d’ailleurs, le rejet du concept est massif. La transformation nécessite un plan de communication et un accompagnement pendant la transition. La pratique étant nouvelle,les dysfonctionnements techniques existent et des ajustements doivent être mis en place.
Par exemple, il est arrivé que la convivialité si chère au projet, ait été fragilisée. Dans un endroit aussi décloisonné, certains collaborateurs de peur de déranger, s’auto censurent. Chez PSA, l’acoustique a été améliorée pour que les salariés puissent continuer de travailler dans un endroit ouvert tout en trouvant une certaine intimité.
Obligation de mettre en place des phases test
Pour réduire le risque des dysfonctionnements, et favoriser l’appropriation, les groupes ont recours à des phases-test. Elles sont probablement inévitables pour mener à bien une rupture d’une telle ampleur.
Chez PSA, à Poissy, les travaux ont duré un an et demi et découpés en 8 phases. il y en a eu huit pendant un an et demi, à chaque installation d’une nouvelle équipe. « Cela a aidé les collaborateurs à voir comme se projeter dans ces environnements avant d’y arriver, et à ceux qui s’installaient pendant cette période de remonter les questions. Chaque nouvelle zone pilote a amené son lot d’améliorations, qui ont ensuite été répercuté sur les espaces déjà investis », raconte Elisabeth Candussi. Et après la transition ? Si l’accompagnement mérite peut-être d’être étendus sur plusieurs mois, les aménagements, eux, à l’image du flex, se feront au cas par cas.
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