Candidat.es LGBTI+ : le mentorat comme tremplin professionnel

Tracer sa route dans le monde professionnel quand on est une personne LGBTI+ met face à des difficultés bien particulières. De la discrimination aux microagressions liées à l’usage des pronoms ou à l’identité de chacun.e, la recherche d’un emploi n’a souvent rien de tranquille. Le mentorat peut s’avérer très utile, voire crucial, pour gérer les coups durs et aider à traverser certains obstacles. C’est aussi une aide, un moyen de se sentir mieux armé.e pour sa recherche d’emploi et moins contraint.e d’enfouir son identité.

En ce mois des fiertés, nous avons exploré le sujet en compagnie de pros LGBTI+. Ils et elles nous ont raconté en quoi le mentorat leur a été bénéfique, sur le plan pro comme sur le plan personnel. En écoutant leurs expériences singulières, nous avons voulu mettre en lumière les effets concrets du mentorat, son pouvoir transformateur. Peut-être aussi trouver de quoi inspirer et guider une prochaine génération de talents LGBTI+.

Trouver la bonne personne

Le mentorat est un atout de taille pour se construire un réseau professionnel. Le mentor peut présenter le mentoré à d’autres acteurs de son secteur, lui permettre d’étendre son cercle de connaissances et ouvrir la voie à des opportunités professionnelles. Les soirées pros, les conférences et les groupes LGBTI+ sont des tremplins très utiles pour rencontrer du monde et trouver un mentor.

David Rosenstein, expert en vente et branding chez LinkedIn, prévient toutefois que trouver le bon mentor n’est pas forcément évident. Si vous échangez avec une personne, demandez-vous en premier lieu si les conseils que vous recevez vous semblent justes et authentiques. Sont-ils personnalisés, réalistes et à votre portée ?

Tout le monde fonctionne et travaille différemment : le plus important est de recevoir des conseils que vous sentez adaptés à votre situation. C’est ce qui vous permettra d’écouter vos envies professionnelles tout en vous sentant soutenu.e et compris.e. Et pour cela, rien de tel que de trouver quelqu’un à qui vous vous identifiez.

Le mentorat en ligne pour les candidats LGBTI+

La crise du Covid-19 a poussé tout le monde à passer au digital, et le mentorat en ligne est devenu un outil très précieux pour toutes les personnes en recherche d’emploi, y compris au sein de la communauté LGBTQ+. Le mentorat en face-à-face présente clairement des avantages, mais en ligne, il peut s’avérer très pratique et plus accessible.

Les échanges en ligne gomment la distance géographique et ouvrent le champ des possibles à l’international. On peut être en France et se tourner vers un.e « sénior » à Londres, New York ou Rio de Janeiro. Ciao les frontières physiques, bonjour à un monde de perspectives et de stratégies professionnelles bien plus larges.

Des plateformes telles que LinkedIn et Queer Tech, communauté digitale destinée aux pros LGBTI+ des secteurs de la tech, sont particulièrement utiles pour créer des ponts entre candidats et potentiels mentors. Mais comment s’assurer de l’efficacité réelle d’un mentorat en ligne ? Commencez par vous mettre d’accord sur le comment de vos échanges, en tenant compte de l’éventuel décalage horaire et des disponibilités de chacun. Profitez ensuite des divers canaux digitaux facilitant la communication : appels vidéo, partage d’écran, documents collaboratifs… C’est un bon moyen d’entretenir une relation professionnelle.

Construire une relation solide avec son mentor

Pour nouer un vrai lien avec son ou sa mentor, il faut pouvoir être dans une communication ouverte, dans le respect mutuel et se fixer des objectifs clairs. Énoncer clairement vos attentes dès le début du mentorat permet de poser les bases d’une relation vraiment utile. Selon une étude menée par l’Olivet Nazarene University (Illinois) aux États-Unis, 76 % des professionnels estiment qu’avoir un mentor est essentiel, mais seulement 37 % en ont un. Un décalage certainement dû à des attentes mal formulées et un manque de clarté dans la communication.

Le mentorat doit créer un espace sécurisant, surtout pour les membres de la communauté LGBTI+ confrontés à des problématiques singulières dans le monde du travail. La confiance est une notion capitale. Le respect mutuel entre mentor et mentoré.e favorise une liberté de parole : on peut verbaliser ses inquiétudes, poser ses questions, chercher des conseils, sans peur du jugement.

Réfléchissez ensuite à vos enjeux. Établir des objectifs permet de se fixer un cap. Cela aide aussi à voir les progrès réalisés, donc à célébrer les étapes franchies. Dans la relation mentor-mentoré.e, il est également crucial que le feedback soit fait avec empathie. Ce sont ces derniers qui vous aideront à évoluer alors n’hésitez pas à en demander régulièrement. Le ou la mentor, en retour, est invité.e à le faire dans un esprit d’encouragement, et de façon constructive.

En face-à-face ou en ligne, le mentorat peut être une mine d’or dans une carrière. Dans la communauté LGBTI+, une solide relation de mentorat peut servir de boussole et aider chaque personne à vivre le succès professionnel et la carrière à laquelle elle aspire.

Jusqu’où parler de soi en entretien ?

Intégrer une entreprise pour qui le terme « diversité » n’est pas qu’un vague concept est un premier pas important pour se sentir à l’aise au bureau. Selon David Rosenstein, parler de votre homosexualité (ou de la situation personnelle qui est la vôtre) en entretien peut malgré tout avoir un impact sur votre candidature. Mais il existe des moyens d’aborder le sujet de façon plus indirecte pour tâter le terrain et voir quel type d’entreprise vous avez en face de vous.

L’important est de vous écouter. Si vous ne souhaitez pas en dire trop, vous pouvez évoquer les activités dans lesquelles vous êtes impliqué.e en dehors du travail, les causes qui vous tiennent à cœur. Si vous avez envie d’en dire davantage, plusieurs options s’offrent à vous. Selon David Rosenstein, indiquer les pronoms qui vous concernent sur votre CV et parler de vous (de façon construite) durant l’entretien peut déjà vous permettre de filtrer les entreprises et de mieux cerner l’environnement pro qui vous attend peut-être.

Mais c’est une approche à double tranchant, prévient B. Pagels-Minor, qui travaille dans l’accompagnement au leadership. Tout dépend de là où vous en êtes dans votre carrière. Avez-vous le temps de faire le choix de trouver une entreprise dans laquelle vous pouvez être vous-même à 100 % ? Ce n’est malheureusement pas toujours le cas…

3 conseils pour tirer parti du mentorat pendant votre recherche d’emploi

Aller à un entretien d’embauche nous soumet à un tas d’émotions diverses. Quand est LGBTQ+, ces émotions peuvent être multipliées par dix en raison de notre peur ou de nos inquiétudes quant à l’ouverture d’esprit et à l’inclusion dans l’entreprise. Pour vous sentir mieux préparé.e et plus à l’aise pendant l’entretien, adoptez une stratégie gagnante avant de vous mettre dans les starting-blocks. David Rosenstein cite trois réflexes à avoir :

1. Trouvez des personnes qui ont le même parcours que vous

Entretenir son réseau est vital quand on cherche un travail – et c’est encore plus vrai pour les membres de la communauté LGBTI+. Échangez avec des personnes qui ont connu les mêmes expériences que vous : recueillir leurs conseils et leur regard peut vous être très utile. Ces mêmes contacts peuvent aussi vous apporter de l’encouragement et mieux vous comprendre. Rapprochez-vous par exemple de pros LGBTI+ dans le secteur que vous visez, par le biais de réseaux sociaux, de soirées networking LGBTI+, en vous tournant vers les référents diversité et inclusion des entreprises qui vous intéressent… Bénéficier d’un vrai soutien autour de vous, d’un réseau de personnes qui vous comprennent, peut vous donner beaucoup de force. Leur retour d’expérience vous sera aussi précieux dans le cadre de votre recherche d’emploi.

2. Tournez-vous vers des ressources et groupes dédiés

La communauté LGBTI+ le sait bien : l’union fait la force. Rejoindre des groupes de soutien LGBTI+ (sur Internet ou autour de vous) peut vous sortir d’un certain sentiment d’isolement et vous aider à faire preuve de résilience quand vous en aurez besoin durant votre recherche d’emploi. Renseignez-vous sur les relais LGBTI+ dans votre région. En ligne, consultez les sites et forums dédiés. Des associations et organisations existent, comme L’Autre Cercle réseau très actif tourné vers le monde professionnel, le Centre LGBTQI+ de Paris et d’Île-de-France ou encore L’Inter LGBT.

3. Identifiez vos priorités

La satisfaction et la réussite dans votre carrière nécessitent de prendre un peu de temps pour identifier ce qui est important pour vous. En tant que candidat.e LGBTI+, vous privilégiez peut-être les entreprises avec une politique volontariste en matière de diversité et d’inclusion, qui proposent les mêmes avantages aux conjoints, quel que soit leur genre, ou soutiennent activement les causes LGBTI+ ? Avant de lancer votre recherche d’emploi, réfléchissez à vos priorités : cette étape préalable vous aidera à cibler des entreprises alignées avec vos valeurs, impliquées dans la création de lieux de travail plus sains et gratifiants pour tous et toutes. Fouillez sur le site de l’entreprise, sa page LinkedIn ou son profil Welcome to the Jungle pour savoir si le poste que vous briguez offre un environnement inclusif.

Le mentorat ne se résume pas à du conseil professionnel : c’est un vrai outil de connaissance de soi et de développement personnel. Les mentors LGBTI+ offrent de précieuses clés aux mentoré.es, en les aidant à rédiger leur CV, à affiner leurs compétences en entretien et à construire leur carrière. Une fois en poste, on peut se tourner vers cette même personne pour mieux gérer les dynamiques relationnelles, négocier son contrat et établir une stratégie professionnelle sur le plus long terme.

Que vous choisissiez ou non de vous tourner vers le mentorat, il est important de vous sentir à l’aise dans l’entreprise où vous travaillerez. C’est une première étape vers une vie professionnelle épanouissante, une première brique pour construire votre carrière.

Article traduit par Sophie Lecoq et édité par Gabrielle Predko ; Photographie de Thomas Decamps