La politique : un monde du travail comme les autres ? Interview Léa Chamboncel

Je pense que finalement les travers que l’on retrouve en entreprise, sont les mêmes que dans le monde politique.

Sexisme, manque de parité, faux-semblants, guerre d’ego… La politique est-elle un monde du travail comme un autre ? Analyse comparée avec Léa Chamboncel, créatrice du podcast “Popol” et autrice de Plus de femmes en politique(Éd Belfond, 2022).

1. Un monde où la parité est toujours un défi

Plus on essaie de monter dans la hiérarchie, de gagner en compétence, plus c’est difficile d’y croiser des femmes. Et ça, c’est une réalité dans tous les partis politiques. Il suffit de regarder une photographie de l’Assemblée nationale : les députés sont majoritairement des hommes, blancs, de plus de 60 ans.

Lorsque les femmes sont arrivées en politique de manière un peu plus affirmée grâce aux lois sur la parité, elles ont constitué une menace pour certains hommes. Quelques-uns disaient qu’ils allaient être sacrifiés au profit de certaines femmes. Donc, oui, on peut imaginer beaucoup de cas où on a des personnes qui arrivent avec beaucoup de volonté et qui se font écarter du jeu politique pour des raisons souvent malveillantes.

2. Un monde où le doute n’est pas permis

Une personnalité politique qui ose dire qu’elle doute, c’est souvent assimilé à de la fragilité. Malheureusement, la fragilité dans le monde politique qui est un monde excessivement viriliste, est très mal perçue. Dans une interview donnée en plein confinement, Emmanuel Macron a dit : « Je ne prendrais pas ce chiffre pour dire que c’est un échec, ça n’a pas marché. » C’est typique de la personnalité politique qui n’a pas envie de se remettre en question et qui écarte le doute. Or, le doute, c’est quelque chose qui permet d’avancer, qui permet de se remettre en question pour prendre des décisions peut-être plus éclairées.

3. Un monde où le sexisme est roi

La politique est un monde où le sexisme est très présent : on attend d’une femme qu’elle fasse dix fois plus ses preuves qu’un homme tout en subissant des comportements, insultes et violences sexistes.

Lorsque j’ai interviewé Manon Aubry, qui est eurodéputée La France insoumise (LFI), elle m’a dit : « Souvent les hommes vont avoir cette tendance à prendre la lumière en politique, tandis que les femmes se concentrent sur les tâches de fond. Ce sont elles, les vraies bosseuses. » Ici, on se rend compte que les femmes travaillent beaucoup, d’arrache-pied, sans toujours chercher la lumière, contrairement aux hommes qui essayent toujours d’être devant, de jouer des coudes pour la petite photo de famille, d’être à côté du maire, du député, du président de la République. C’est beaucoup moins vrai pour les femmes qui ont vraisemblablement une envie de vraiment changer les choses.

4. Un monde de faux-semblants

J’ai vu des personnes qui intégraient le monde politique avec plein de bonne volonté en se disant qu’ils ou elles allaient changer les choses. Pourtant, très vite, ces nouveaux arrivants se rendaient compte que c’était très compliqué de faire bouger les lignes. On sera forcément dans un monde où on croisera des stratèges plus intelligent.e.s que soi, qui font véritablement de la « popol », de la politique politicienne et qui vont tout faire pour vous écarter du pouvoir. Comment y faire face ? Soit tu continues et tu dis : « Ok, j’y vais à fond », et c’est très difficile ; soit tu jettes l’éponge ; soit tu te compromets et tu te dis : « Bon bah finalement, je vais peut-être laisser mes convictions côté parce que ça vaut le coup. » Les deux camps cohabitent, alors j’ai croisé beaucoup de personnes prétentieuses, mais aussi d’autres très sincères dans leur engagement et qui étaient vraiment là pour changer les choses.

Crédits vidéo :
Journaliste : Laura Cabrelli
Cadreur : Sébastien Rippon
Monteur : Célia Tomasso

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