Démission, rupture co... Comment se faire aider (gratis) pour négocier son départ ?
25 avr. 2022
7min
Rédacteur & Photographe
Que l’on vous pousse gentiment vers d’autres rives, ou que vous ayez vous-même décidé de quitter le navire, larguer les amarres n’est pas chose facile. Démission, rupture conventionnelle ou licenciement, quelle que soit la route empruntée, la traversée peut secouer. Alors, n’allez pas jouer les héros à naviguer en solo… Vous n’êtes pas seul dans cette galère. Délégués du personnel, services publics, syndicats et avocats, appelez à l’aide : c’est gratuit !
Rupture conventionnelle & co : ne naviguez pas seul.e !
Un changement de cap dans un parcours professionnel n’est pas une manœuvre anodine. Abordé maladroitement, ce tournant pourrait bien vous faire chavirer. Il est préférable de négocier cette étape bien équipé.e et assuré.e.
N’avancez pas le nez au vent…
Démission ou licenciement, entre les deux mon cœur balance. Introduite par la loi portant modernisation du travail en 2008, la rupture conventionnelle du contrat de travail offre une troisième voie. Elle permet au salarié, avec l’accord de son employeur, de quitter l’entreprise tout en bénéficiant de l’indemnisation chômage. « La rupture conventionnelle est très souvent préférable à une démission », assure Élise Fabing, avocate associée, spécialiste en droit social au cabinet Alkemist Avocats et experte du Lab. Mais, dans les faits, les salariés ont tendance à l’ignorer ou à se faire manipuler. « Combien de fois ai-je vu des clients accepter trop rapidement une démission et s’en mordre les doigts, se souvient-elle. Je suis frappée par la méconnaissance qu’ont les salariés de leurs droits. Ils se retrouvent souvent contraints de survivre avec leurs économies pendant des mois avant de percevoir leurs indemnités Pôle Emploi ! »
Votre employeur vous refuse une rupture conventionnelle ? N’avancez pas le nez au vent, vous risquez d’écoper de gros problèmes financiers… « Devant un refus, conseille Elise Fabing, il faut envisager les différentes stratégies qui se présentent à vous. Étudiez votre contrat de prévoyance entreprise (ce contrat souscrit par l’employeur accorde aux salariés une meilleure couverture sociale en cas d’arrêt maladie ou invalidité). Selon ce qu’il stipule, l’arrêt maladie peut vous permettre de percevoir une meilleure indemnité que celle allouée par Pôle Emploi. Dans des situations de souffrance au travail par exemple, l’arrêt maladie et l’inaptitude à reprendre votre travail sont des portes de sortie bien plus intéressantes que la démission. » Des stratégies qui gagneraient à être connues, mais que l’on n’entend que rarement hors les murs d’un cabinet d’avocats…
Appelez au secours à temps…
« Un homme averti en vaut deux », dit le dicton. Mieux vaut donc connaître ses droits et être bien conseillé avant de virer de bord. Notre experte recommande même d’être assisté dans la négociation de son départ. « On est très mauvais lorsqu’on négocie pour nous-même, plaide-t-elle. Il y a de l’affect dans la relation de travail et la rupture a tendance à nous remettre en cause personnellement. Le conseil d’un tiers permet de prendre plus de recul. Ce dernier va se poser en intermédiaire et dépassionner la situation. Dans 85% des cas, avec cette personne, on arrive à trouver une issue amiable. »
Quel est le moment opportun pour demander de l’aide ? Le plus souvent, « on laisse couler », jusqu’à se laisser submerger par une vague d’émotions intenses. Là, non, c’est « la goutte de trop », celle qui fait tout déborder. Puis, vient le raz de marée : « trop c’est trop », on déverse le trop plein. À ce moment-là, on réplique, contre vents et marées, mais il est déjà trop tard. Le mal est fait. Pour éviter de devoir affronter ce genre de situation, « il faut faire appel à un conseil en amont, incite Elise Fabing. Cela permet de fixer sa stratégie, avant de discuter avec son employeur et de la dérouler. » Mais si cette stratégie est presque à tous les coups payante, elle a tout de même tendance à nous effrayer parce que l’on craint qu’elle soit trop coûteuse financièrement. Or, ce n’est pas toujours vrai. « *Il existe des solutions peu ou pas onéreuses ! Les services d’un avocat sont peut-être payants, mais ils rapportent gros. Il nous arrive de faire doubler, voire tripler l’indemnisation…* », ajoute l’[avocate] (https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/balance-agency-startup-elise-fabing-avocate).
À l’aide ! Vers qui se tourner (gratis) ?
Lorsqu’on se retrouve pris dans le flot du changement, emporté au large par le courant, c’est la panique. On s’agite, on se débat, on rame vers la rive jusqu’à l’épuisement. Pourtant, c’est bien connu, mieux vaut rester stoïque, appeler à l’aide et déclencher calmement les balises de sauvetage. Ne rechignez pas à en faire usage de peur de vider la cale, beaucoup sont gratuites ! Petite virée du côté de ces aides qui ne coûtent rien…
Chercher une aide à bord : le représentant du personnel
Si vous travaillez dans une entreprise d’au moins onze salariés, vous avez la possibilité de vous faire conseiller par un représentant du personnel. C’est précisément sa mission : guider le salarié en vue de négociations avec l’employeur et l’informer de ses droits.
Concrètement, lors d’une première rencontre, vous allez préparer ensemble votre entretien avec votre employeur et fixer la stratégie à adopter. Cela vous évitera de vous noyer dans des détails et de vous laisser submerger par l’émotion.
Ensuite, en cas de souffrance au travail, le représentant du personnel pourra vous orienter vers une procédure de rupture conventionnelle. Si vous le souhaitez, il pourra vous assister au cours des entretiens. Vous n’avez qu’à le solliciter et en informer votre employeur. N’hésitez pas, c’est une ancre dans la tempête.
Enfin, à l’issue de l’entretien, il remet un compte-rendu qui sera annexé au formulaire d’homologation de la rupture conventionnelle. Ainsi, en cas de litige, impossible de couler, vos intérêts seront préservés.
Lancer un appel de détresse : les Dreets
Vous ne connaissez rien au droit du travail et n’avez pas l’intention de vous rendre à cet entretien avec votre employeur le nez au vent ? Rassurez-vous, depuis le 2 avril 2019, la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dreets) ont mis en place un service gratuit de renseignement sur le droit du travail.
Lancez un SOS en composant le 0 806 000 126 (coût d’un appel local). Vous serez mis en ligne avec le service de renseignement de votre région. Doté de compétences juridiques, votre interlocuteur pourra vous apporter un éclairage gratuit sur vos droits en vertu du code du travail, votre convention collective, la jurisprudence en vigueur…etc. Mieux qu’un gilet de sauvetage !
Tester d’autres canaux : les syndicats
Votre entreprise ne dispose pas de représentant du personnel ? Vous voyez que votre employeur vous mène en bateau et bafoue vos droits ? Vous avez la possibilité de vous tourner vers un syndicat de travailleurs. En effet, si vous êtes syndiqué, vous pouvez vous rapprocher de votre syndicat en cas de problème lié au droit du travail. Parfois, l’avocat du syndicat consent à vous prodiguer gratuitement des conseils et vous aider dans vos démarches.
Si vous n’êtes pas syndiqué, rien ne vous empêche de contacter un des grands syndicats de travailleurs pour bénéficier de leurs conseils et expertise. Ils pourront vous aider à aborder au mieux cette négociation et vous proposer l’assistance d’un conseiller du salarié.
Remonter à la source : podcast & open data
Une capsule de cinq minutes pour mieux comprendre « Vos droits au travail » ? C’est ce que propose gratuitement Élise Fabing dans un podcast qui a vocation à aider les salariés en détresse. Véritable bouffée d’oxygène lorsqu’on fait face à une vague de violence au travail, vous y trouverez de nombreuses solutions à vos questions. « Il existe aussi beaucoup d’open-data sur la négociation de son départ ou plus globalement sur les droits du salarié », précise-t-elle. Articles de blog, médias spécialisés, banques de données juridiques, « la digitalisation a grandement facilité l’accès gratuit au droit », conclut l’avocate. La toile foisonne d’informations précieuses, n’attendez pas d’avoir un problème pour vous y plonger !
Éviter la galère : la permanence des avocats
Le prestige de la robe, l’appellation ‘’Maître’’ ou encore le titre d’avocat… Les services d’un spécialiste de la justice ont la réputation de coûter cher. On frémit à l’idée d’une note salée, mais qu’en est-il en réalité ? « Beaucoup de confrères proposent un premier rendez-vous gratuit, affirme la spécialiste du droit du travail, d’autres travaillent « pro bono », c’est à dire de manière bénévole, ou encore à l’aide juridictionnelle. Et il existe bien sûr les permanences ! » Les permanences, ce sont des consultations gratuites d’avocats, notamment pour toutes les questions en droit du travail, proposées par plusieurs organismes et institutions.
Pour vous renseigner gratuitement sur vos droits ou vous orienter dans vos démarches juridiques, vous avez la possibilité de vous rendre d’abord dans un point de justice à proximité de votre domicile. Le plus souvent situé en mairie, au tribunal ou dans un centre d’action social, ce point de justice sert de relais entre les institutions judiciaires et le justiciable. Vous y rencontrerez un avocat ou tout autre professionnel du droit, travailleurs associatifs, conciliateurs de justice, ou délégués du Défenseur des droits, en mesure de répondre à vos questions.
Un autre moyen de consulter gratuitement un avocat est de vous rendre à une des permanences du barreau des avocats de votre ville. Le Conseil de l’Ordre ou les barreaux locaux organisent régulièrement des permanences pour répondre à vos questions, notamment en matière de droit social. L’avocat de permanence pourra entendre votre situation et vous orienter vers la marche à suivre pour défendre vos droits.
Vous êtes contraint de poursuivre votre employeur devant le conseil de prud’hommes (CPH) ? Si vos revenus sont faibles et que vous craignez de vous noyer sous d’importants frais de justice, vous pouvez être assisté et représenté par un avocat en bénéficiant de l’aide juridictionnelle. Accordée aux personnes aux revenus modestes, elle permet la prise en charge par l’État de vos frais de justice dans certaines procédures, notamment en cas de harcèlement.
Sautez à l’eau bien assuré : la protection juridique
Et votre assurance, vous y avez pensé ? A priori non puisque votre assurance auto ou habitation ne vous couvre pas en cas de litige avec votre employeur. Pour autant, cette protection juridique que proposent les assurances traditionnelles peut servir en cas de litige professionnel.
Pour savoir si vous êtes couvert, renseignez-vous auprès de votre assureur habituel sur la protection juridique dont vous bénéficiez. Et, si vous n’êtes pas protégé, songez peut-être à vous assurer pour l’avenir. Disposer d’une garantie protection juridique peut être utile. Cela permet, en cas de litige, d’obtenir des informations juridiques, d’être représenté et assisté par un avocat ou d’assigner votre employeur devant le tribunal, sans que votre compte en banque ne prenne l’eau…
Vous voyez, ça ne coûte pas toujours grand-chose de se faire aider ! Retenez qu’il existe quantité de services gratuits prêts à vous porter secours et assurer la défense de vos intérêts au travail. Vous êtes en litige contre votre employeur ? Ne vous jetez pas seul, le nez au vent, dans cette galère, vous risqueriez de ramer et vous essouffler. Appelez plutôt une aide gratuite à la rescousse ! Toutes écoutilles ouvertes, ces professionnels répondront à vos questions et fixeront le cap à suivre pour lever l’ancre en douceur.
Article édité par Romane Ganneval, Photo par Thomas Decamps
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