Changement d'entreprise : qu'est-ce qui nous retient de sauter le pas ?
26 sept. 2019
5min
Communications & content manager
Pas heureux au travail depuis un an et demi et pourtant toujours en poste ? Cela arrive à beaucoup plus d’entre nous qu’on ne le croit !
En 2017, HappyAtWork a sondé plus de 29 000 Français sur le sujet du bonheur au travail. Résulat de l’étude : seulement 52% des salariés avouaient être heureux au travail. Mais alors qu’en est-il des 48% restants ? Ce chiffre devrait d’abord préoccuper les entreprises, car selon une étude d’Harvard, un salarié heureux au travail est 31% plus productif, deux fois moins malade, six fois moins absent, neuf fois plus loyal et 55 % plus créatif. Mais évidemment il est aussi inquiétant pour les employés eux-mêmes, car qui a envie de passer les 2/3 de sa vie dans un emploi qui le barbe ? Personne, bien sûr. Et pourtant, notre peur du changement prend souvent le dessus sur notre malheur. Alors, on se le demande, pourquoi est-on toujours réticent à l’idée de changer d’entreprise ?
Une peur diffuse face aux bouleversements
Que l’on veuille changer de secteur, avoir des horaires différents ou encore se confronter à un nouveau style de management, aucun discours ne semble nous rassurer face à l’idée du changement. Alors quelles sont les raisons profondes qui nous empêchent de sauter le pas pour lâcher notre job et commencer une aventure dans une nouvelle entreprise ? Les neurosciences peuvent peut-être nous mettre sur la piste…
Fixed vs growth mindset
Carol Dweck, professeur de psychologie sociale à Stanford, a consacré une partie de ses travaux à comprendre les mécanismes qui nous poussent à prendre une décision et à agir. En 2014, elle donne une conférence pour clarifier les néologismes “growth mindset” et “fixed mindset”. Elle argue que certains d’entre nous ont un état d’esprit figé (les fixed mindset) et craignent le changement par peur de l’échec, alors que d’autres ont un esprit d’apprentissage (les growth mindset) et voient les nouveautés comme des opportunités de grandir. L’éducation et l’environnement jouent sur ces états d’esprit, et il est tout à fait possible d’en changer tout au long de la vie. En fonction de celui qui nous caractérise, les changements de poste peuvent paraître plus ou moins surmontables.
Passer d’un état de “fixed mindset” à un état de “growth mindset” se travaille : nous vous conseillons à ce sujet les épisodes du podcast Change ma vie :
Les tactiques sournoises de l’ego
Dans son ouvrage Le pouvoir de l’instant présent, l’écrivain allemand Eckhart Tolle met en exergue les stratégies de l’ego qui nous éloignent du moment présent. Sa thèse : pour transformer notre conscience, il faut vivre en se concentrant seulement sur l’instant présent, sans penser au passé ni se projeter dans le futur, pour transcender son ego et accéder au bien-être et à la connaissance de soi.
Nombre d’actifs se définissent par leur activité professionnelle. Elle leur donne un statut social qui satisfait pleinement leur ego. Pour eux, dans la crainte d’un changement pour un poste moins prestigieux, il est particulièrement effrayant de se retrouver “nu”, détaché de leur ex-“statut social”.
Dans le même ordre d’idées, la crainte d’une baisse de salaire ou d’une perte de responsabilités, peut nous freiner à sauter le pas. Pour ne pas froisser notre ego, on se trouve alors des excuses. Une petite voix dans notre tête se met à nous répéter : « Tu vas être en difficulté financière si ton salaire baisse, tu n’as pas fait toutes ces études pour redescendre en grade, que va penser ton entourage… »
Enfin, nombre de professionnels, bien que compétents, ont peur de ne pas être reconnus dans leur futur job. Changer, c’est s’exposer à l’avis d’un nouveau boss, d’une nouvelle équipe et faire ses preuves, à nouveau. Les personnes qui ont un “growth mindset” se diront qu’au pire, ils apprendront, curieux de découvrir ce qu’ils ne savent pas encore. Les autres seront plus réticents…
Attention donc, c’est une partie de nous-même, notre ego, qui peut nous éloigner des décisions saines qui nous permettraient d’être épanouis au travail.
La nature anxiogène de l’inconnu
Pourquoi pensez-vous que la plupart d’entre nous préfére aller en vacances au même endroit chaque année ? Parce qu’il n’y a pas plus confortable comme situation que de savoir où on met les pieds ! Le livre de Nicholas Carleton nous apprend que l’inconnu est la source de la plus fondamentale des peurs humaines. Le cerveau, toujours à l’affût d’informations, enregistre l’absence de ces dernières comme un danger.
« On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on va trouver. » Comme le suggère ce dicton populaire bien ancré dans les mentalités, nous sommes nombreux à préférer rester dans un environnement qu’on estime peu stimulant, voire toxique, mais qui nous est familier. Et ce par peur d’être confrontés à une situation de travail encore plus hostile. À ce titre, l’imagination peut être vraiment fertile…
Alors, comment mieux vivre ce changement de cap ?
1. Se poser la question centrale : pourquoi ?
Le point de départ pour réussir à partir : comprendre le “pourquoi”. Un bon exercice consiste à prendre une feuille et à dresser les pour et les contre. Vous pouvez aussi vous référer à cet article sur l’adéquation aux valeurs d’une boîte où vous trouverez un baromètre pour savoir si votre entreprise vous correspond toujours ou non.
De même, si on a un projet (travailler dans un secteur en particulier, changer de métier, monter sa boîte ou son activité de freelance), identifier les bonnes raisons de le faire est primordial pour se donner une impulsion.
Une fois les raisons établies, il est bon de se les rappeler encore et encore, par exemple avec des post-it. Car si on garde ses objectifs sans cesse à l’esprit, on ne les perd pas de vue et on est plus fort.
2. S’informer
L’inconnu est, on l’a vu, mal vécu car non maîtrisé. Or, il est très facile de s’informer sur un secteur, un métier ou une entreprise. Demander des renseignements à une entreprise qui nous plaît par mail ou par téléphone peut être efficace. Sonder le web peut aussi apporter des réponses : les profils d’entreprises sur Welcome to the Jungle, les articles de presse sur les pratiques internes, les réseaux sociaux ou le site Internet de la boîte… On se projette mieux quand on dispose déjà d’éléments de réponse.
3. S’entourer
Dans ces périodes peu évidentes, la famille, les amis et les mentors sont plus importants que jamais. Avant de se lancer, il peut être rassurant de demander l’avis de proches qui ont plus de recul que nous. On peut également demander conseil à quelqu’un de plus expérimenté pour nous aider à mieux nous ré-orienter et à faire un choix qui nous correspond.
4. Relativiser
Quand on change de boîte, on a un peu l’impression qu’on joue sa vie. Ou plutôt, son équilibre de vie. Or, on a une bonne raison de le faire : trouver mieux, ailleurs. Si la première boîte qu’on tente n’est pas la bonne, cela prendra peut-être quelques mois de plus, et ce n’est pas grave. En tous cas, il est important de de se faire confiance et de se dire qu’on retombera toujours sur nos pattes. Certains sont plus sereins en pratiquant le yoga, la méditation ou encore le reiki, pensez-y !
En fait, ce qui effraie, c’est de se lancer !
À l’issue de notre article, il nous faut apporter une précision de taille. Lorsque nous sommes en recherche d’emploi, le pic d’anxiété se manifeste généralement au début du processus de candidature.
Un sondage de Monster réalisé en 2018 aux États-Unis est révélateur sur le sujet : 13% des répondants avaient peur de ne pas être choisis, et donc d’être rejetés en fin de processus (personne n’aime ça), 15% craignaient de mal négocier leur salaire, 33% restaient bloqués sur l’idée que le CV se perde dans le vortex terrifiant du web, et la palme revenait aux 37% qui avaient peur de passer les entretiens d’embauche. Les phases les plus en amont du processus de recrutement sont donc, de loin, les plus bloquantes.
En somme, ce qui effraie, c’est de se lancer. Cela suppose de mener une sorte de double vie, à l’abri du regard de ses collègues et son boss durant des semaines voire des mois, pour finalement quitter le confort d’un poste que l’on maîtrise.
Changer d’entreprise est un bouleversement de vie, et il est difficile d’en prévoir les conséquences. Nouveau poste, nouvelle ville, nouvelles missions, nouveaux collègues. Tout un monde incertain et on ne sait jamais si la greffe prendra. Et pourtant, quand on interroge ceux qui ont eu ce courage, la réponse est quasiment unanime : « je ne sais vraiment pas pourquoi je ne l’ai pas fait plus tôt ». Preuve que, comme l’appétit vient en mangeant, la sérénité vient en bougeant.
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Photo d’illustration par WTTJ
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