CV, lettre de motivation, entretien : comment faire mouche en reconversion pro ?
04 oct. 2022
7min
Journaliste web
« Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis », disait poétiquement ma grand-mère. Si cette affirmation semble un brin exagérée (et légèrement insultante), elle a le mérite d’être claire. Repartir de zéro demande du courage et rares sont les personnes qui regrettent d’avoir fait un tel choix. Mais dans le cadre du travail, retracer sa carrière en se lançant dans une reconversion professionnelle peut parfois se transformer en parcours du combattant. Surtout lorsqu’il s’agit de dénicher un emploi ! Car même si on a fait une formation pour apprendre un nouveau job, face à un recruteur, on a souvent tendance à manquer de confiance en raison de son manque d’expérience.
Votre vie professionnelle passée est un puit de richesses à mettre en lumière. Anne-Laure Gandara, coach en orientation professionnelle et accompagnement entrepreneurial, nous livre quelques conseils pour réussir sa candidature quand on est en reconversion professionnelle.
La reconversion professionnelle, un changement de parcours qui n’étonne plus les recruteurs
Si vous êtes en reconversion professionnelle (ou sur le point de l’être), sachez que vous êtes loin d’être un cas isolé. D’après un rapport de l’Observatoire des trajectoires professionnelles publié en 2019, près d’1 actif sur 3 aurait connu une transition professionnelle en 2018. Et selon une autre étude menée en ligne par nouvelleviepro.fr en 2019, plus de 9 actifs sur 10 souhaiteraient se reconvertir, sont en train de le faire ou l’ont déjà fait ! Une tendance qui touche toutes les générations, constate Anne-Laure Gandara au sein de son activité. « Il y a quelques années, la reconversion se faisait généralement aux alentours de 40 ans, et concernait majoritairement les personnes qui étaient arrivées à un certain niveau dans leur carrière. Désormais, elle touche aussi les plus jeunes, qui après 3-4 ans de vie professionnelle se rendent comptent que leur métier ne leur correspond pas. » Chacun a ses motivations pour effectuer un changement de trajectoire dans sa vie professionnelle. Obtenir un meilleur salaire, suivre sa passion, retomber sur ses pattes après un licenciement, s’adapter à la survenue d’une maladie ou d’un accident… sont autant de (bonnes) raisons pour que vous décidiez de changer de vie ! Mieux les identifier vous aidera aussi à mieux exposer ce projet professionnel à un recruteur.
Dans tous les cas, soyez rassuré, le recruteur ne va pas vous regarder avec des yeux ronds parce que vous avez décidé de changer de métier ! Ce qui était autrefois une exception devient aujourd’hui une pratique courante, vous avez donc peu de chances d’être considéré comme un “marginal” du monde professionnel.
Faites le choix de la transparence
Au moment de l’entretien, n’hésitez pas à expliquer clairement les raisons de votre reconversion professionnelle. Vous effectuez une réorientation car vous souhaitez consacrer davantage de temps à votre famille et votre ancien boulot était trop prenant ? Vous avez envie de changer de carrière pour découvrir quelque chose de nouveau ? Vous profitez d’un licenciement pour enfin suivre une voie qui vous a toujours attiré ? Dites-le au recruteur ! Non seulement il appréciera votre honnêteté, mais ces informations lui permettront également de mieux cerner vos attentes pour le poste. Veillez tout de même à démontrer que votre projet de reconversion ne s’est pas fait sur un coup de tête, qu’il a été mûrement préparé et que l’entreprise à laquelle vous postulez pourrait correspondre.
À l’inverse : « on ne ment jamais sur un CV ! » martèle Anne-Laure Gandara. Même si la tentation de gonfler les muscles est forte lorsqu’on est en reconversion professionnelle. Même si vous craignez que votre manque d’expérience relègue votre CV tout en bas de la pile, ou pire, que votre changement de carrière soit considéré avec méfiance par le recruteur, osez exposer les véritables raisons de votre reconversion, quitte à mentir par omission avec des arrangements alambiqués sur votre CV ou votre lettre de motivation.
Et sachez que les entreprises n’embauchent pas des robots, mais des êtres humains aux parcours variés et aux personnalités uniques. N’ayez donc pas peur d’être différent, car cela peut constituer une force ! Parmi les nombreux candidats qui sont allés dans les mêmes écoles de commerce et ont fait les mêmes stages dans les mêmes entreprises, votre reconversion peut constituer une singularité susceptible d’attirer l’œil de l’employeur.
La clé, c’est la “préparation” selon Anne-Laure Gandara. « On ne ment jamais sur son CV, mais en revanche on sait tout défendre et tout argumenter, explique la coach. Lorsque je fais un bilan de compétences pour une reconversion professionnelle, j’insiste sur le fait qu’à la fin, le CV, l’entretien ou la lettre de motivation doivent être à la fois simples et pertinents, parce qu’on les aura travaillé ». Autrement dit, le plus important n’est pas tant de vous demander si votre reconversion professionnelle est un atout ou un handicap, mais plutôt de préparer un argumentaire solide pour être capable d’expliquer avec précision pourquoi vous avez fait le choix de cette réorientation.
À quoi doivent ressembler le CV et la lettre de motivation lors d’une reconversion professionnelle ?
C’est la question que tout le monde se pose : comment parler de sa reconversion professionnelle dans son CV et dans sa lettre de motivation ? Ces premières étapes d’une candidature peuvent être un excellent moyen d’expliquer clairement ce changement de parcours et convaincre les entreprises de vous laisser une chance.
CV : l’importance de la phrase d’accroche
Sur un CV, la phrase d’accroche permet, en quelques phrases, de résumer votre parcours et susciter la curiosité du recruteur, mais aussi de donner un sens à votre liste d’expériences professionnelles. Dans le cadre d’une reconversion professionnelle, la phrase d’accroche CV est d’autant plus importante qu’elle vous laisse un espace d’expression pour justifier de la cohérence de votre virage pro.
Inutile de trop vous étaler. La phrase d’accroche sur le CV doit être concise, mais claire et pertinente : « Après plusieurs années passées dans l’enseignement, pendant lesquelles j’ai eu l’occasion de développer mon sens de l’écoute, de la pédagogie et mes capacités oratoires, j’ai décidé de me tourner vers la vente afin de mettre à profit mon goût pour le contact humain et les défis »
Lettre de motivation : ne sautez pas cette étape !
L’importance de la lettre de motivation lors d’une candidature est sujet à débat. Si certains crient à la mort de cet exercice de style, vous avez néanmoins tout à gagner à rédiger une lettre de motivation si vous êtes en reconversion professionnelle. En effet, c’est l’occasion de détailler au recruteur les raisons de votre reconversion, et de lui expliquer en quoi les compétences développées dans votre ancien travail peuvent être mises à profit pour ce poste.
Profitez de la longueur permise sur une lettre de motivation pour insister sur la cohérence de votre projet et l’aboutissement des réflexions qui vous ont poussées à effectuer cette reconversion. N’hésitez pas à citer des exemples très concrets, tels que « Grâce au bilan de compétences effectué avec le cabinet X pendant près de 6 mois, associé aux visites en entreprises et aux échanges que j’ai eu avec plusieurs professionnels, j’ai pris le temps de dessiner un projet professionnel sérieux sur le long-terme. »
Misez sur vos compétences transversales…
Quand on effectue une reconversion professionnelle, on a tendance à penser qu’on repart de zéro, mais pas du tout ! Grâce aux compétences transversales, il est possible de transférer votre savoir et savoir-faire acquis tout au long de votre carrière professionnelle pour les mettre à profit dans votre nouveau métier.
Qu’entend-on par “compétences transversales” ? C’est l’ensemble des compétences que vous avez accumulées au cours de votre vie professionnelle et qui peuvent être mises à profit dans votre nouveau métier…. Contrairement au savoir-faire technique, qui est souvent spécifique à un seul corps de métier, les compétences transversales sont plus génériques et sont donc plus facilement “transférables” d’un poste à un autre. On y retrouve par exemple le travail en équipe, le contact avec le public ou encore la gestion du stress.
France Stratégie et Pôle emploi, dans un dossier consacré à la mobilité entre les métiers et les situations de travail transversales, ont listé ces 16 compétences transversales :
- Compréhension et rédaction de documents écrits ;
- Utilisation d’outils informatiques ;
- Contact avec le public ;
- Réponse immédiate à une demande (réactivité) ;
- Travail en équipe ;
- Encadrement, supervision des personnes (compétences managériales) ;
- Organisation du travail (respect des délais, autonomie, coopérativité, etc.) ;
- Procédures de qualité et la prise en charge des risques (capacité à respecter les normes et éviter les risques) ;
- Efforts physiques ;
- Environnement physique contraint (humidité, courant d’air et température basse ou élevée) ;
- Conduite d’un véhicule ;
- Manipulation ou examen de petits objets (dextérité) ;
- Attention visuelle ou sonore (capacités de concentration) ;
- Travail sous pression ;
- Charge émotionnelle (maîtrise de ses émotions) ;
- Changements organisationnels (capacité d’adaptation).
Rassurez-vous, vous n’avez pas besoin de maîtriser l’ensemble de ces compétences transversales pour réussir à décrocher un emploi après une reconversion professionnelle. Faites plutôt une liste des compétences que vous maîtrisez, ainsi que celles qui pourraient être demandées dans votre nouveau métier, et voyez si certaines coïncident. Si c’est le cas, mettez-le en avant dans votre CV, dans votre lettre de motivation et pendant l’entretien !
Néanmoins, il faut toujours veiller à faire preuve de réalisme. « On ne peut pas se réveiller un matin et décider qu’on sera dentiste, rappelle Anne-Laure Gandara. Il y a parfois des compétences techniques qu’il faut impérativement acquérir ». Il est donc normal, lors d’une reconversion professionnelle, que votre manque d’expérience vous ferme les portes à certains postes. Et alors ? Rome ne s’est pas faite en un jour !
… Et sur vos soft skills !
Bonne nouvelle pour ceux qui sont en reconversion professionnelle et qui manquent encore d’expérience pro dans leur nouveau métier : selon une enquête réalisée par Robert Half en 2016 auprès de 200 Directeurs des Ressources Humaines en France, 52% des DRH interrogés accordent autant d’importance, voire davantage, aux « soft skills » qu’aux « hard skills ».
Savoir mettre en avant vos soft skills peut donc être déterminant dans la réussite de votre reconversion professionnelle. Contrairement aux compétences transversales, qui constituent un savoir-faire générique, les soft skills sont à classer du côté du savoir-être et sont souvent inhérentes à votre personnalité. Parmi les 28 soft skills essentielles à la réussite professionnelle, on retrouve notamment la confiance en soi, la persévérance, la créativité, l’ouverture d’esprit…
L’étape la plus importante est de commencer par identifier vos soft skills. Une bonne dose d’introspection est nécessaire pour réaliser cet exercice correctement. Si cela vous paraît difficile et que vous envisagez d’aller vivre dans un monastère bouddhiste afin de travailler sur votre “ moi “ intérieur, n’hésitez pas à vous tourner d’abord vers votre entourage. Votre famille, vos amis et même vos anciens collègues vous connaissent parfois mieux que vous-même ! Demandez-leur de vous aider à identifier les points forts de votre personnalité.
Une fois que vous avez une idée précise de vos soft skills, il ne reste plus qu’à vous vendre au recruteur. Pour cela, la lettre de motivation et l’entretien sont les étapes qui laissent le plus d’espace à l’évocation de votre personnalité, mais vous pouvez aussi ajouter une partie « Objectifs & Personnalité » dans votre CV. Montrez en quoi vos soft skills peuvent constituer un atout pour le poste que vous convoitez. Et n’hésitez pas à mettre le recruteur en situation en citant des exemples où vous les avez mis en pratique, que ce soit dans un cadre professionnel, associatif ou personnel.
Et surtout n’oubliez pas : une reconversion professionnelle est une opportunité, pas un handicap ! Si elle s’apparente à un saut dans le vide, elle est aussi le signe que vous êtes capable de sortir de votre zone de confort, que vous n’avez pas peur d’apprendre ou de réapprendre et que vous avez une motivation de fer. Et tout cela, aucun recruteur n’y est indifférent.
Article édité par Gabrielle Predko
Photo par Thomas Decamps
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