Intelligence émotionnelle : 5 conseils pour bien communiquer avec vos équipes
04 déc. 2023
5min
Autrice, consultante et conférencière sur le futur du travail, spécialiste de la productivité, de l’âge et du travail des femmes
L'intelligence émotionnelle (IE) révolutionne le monde du travail en mettant l'accent sur la gestion des émotions. Mais comment l’intégrer dans le management et l’articuler autour d’une bonne communication ?
Né dans les années 60, le concept d’intelligence émotionnelle (IE) a été popularisé en 1990 par les psychologues John Mayer et Peter Salovey, puis par le livre à succès de Daniel Goleman en 1996. Il est défini comme la capacité à reconnaître, comprendre et gérer ses émotions… et celles des autres. Contrairement aux conceptions traditionnelles de l’intelligence, l’IE souligne l’importance des émotions dans la prise de décision et la réussite. Elle trouve une application particulière dans le monde du travail et les pratiques de management, aidant à appréhender des situations comme le partage de feedback, la gestion des conflits et de l’échec, ou encore les périodes de changement. Surtout, l’intelligence émotionnelle ne fonctionne pas sans une bonne communication. Alors comment s’appuyer sur l’une et l’autre pour bien manager vos équipes ? Voici nos 5 conseils.
1. Faites en sorte que votre feedback soit spécifique et actionnable
Le feedback a pour objet d’aider les individus à progresser. Mais dans bien des cas, au lieu d’aider, il blesse. Il existe trois règles essentielles pour rendre le feedback efficace :
- il faut se focaliser sur des éléments précis,
- contribuer à trouver des voies d’amélioration (ou proposer une autre approche),
- et toujours avoir en tête que la façon dont on exprime du feedback importe autant que le fond. Par exemple, « Ton message aurait pu être mieux » n’est pas assez précis et ne permet pas concrètement d’améliorer les choses. Une meilleure approche, plus précise et qui inclut une solution, serait par exemple d’indiquer que « La deuxième phrase dans ton message répète la première ; je crois que tu peux la supprimer ».
Par ailleurs, les employés devraient avoir la possibilité de choisir la manière dont ils reçoivent du feedback. Certains préfèrent en recevoir au fil de l’eau, de façon à pouvoir améliorer les choses au moment même où ils exécutent une tâche donnée. D’autres préfèrent du feedback écrit, ce qui leur ménage du temps pour l’intégrer et réfléchir. D’autres encore, notamment les plus introvertis, sont mal à l’aise avec les louanges exprimées en public, alors que d’autres y sont très sensibles. Si vous êtes manager, il y a beaucoup à gagner à demander aux nouvelles recrues comment elles veulent avoir du feedback. Vous rendrez ainsi vos collaborateurs plus productifs et éviterez de les frustrer ou de les offenser.
2. Admettez vos erreurs et présentez des excuses
Les managers pensent parfois qu’admettre leurs erreurs leur fera perdre toute crédibilité, voire le respect de leurs collaborateurs. C’est en réalité l’inverse qui se passe. Reconnaître ses erreurs aide à créer la confiance et à inspirer le respect. Attention toutefois à ne pas exprimer des excuses non sincères. Tout comme pour le feedback, il existe un certain nombre de règles sur la bonne façon de s’exprimer :
- endossez la responsabilité de vos actes ;
- présentez vos excuses de façon spécifique (ne dites pas « Pardon pour tout ») ;
- prenez acte des sentiments des autres ;
- dites que vous « êtes désolé » sans rajouter des nuances comme « si je t’ai fait te sentir mal » (ce qui sonne faux ou implique que l’autre personne est trop sensible et qu’au fond, tout est de sa faute) ;
- enfin, précisez que cela ne se reproduira plus.
Faites confiance à vos émotions !
Guide d’usage de l’intelligence émotionnelle en entreprise
3. Développez la diversité des cultures et des personnalités
L’expression des émotions dépend beaucoup de la culture de l’entreprise, qui est elle-même influencée par les cultures nationales ou régionales. Par exemple, en général, les Français partagent leurs désaccords en public, mais pas les Japonais. Les Américains peuvent manifester un enthousiasme semblant démesuré, mais pas les Allemands. « La culture détermine les émotions que nous sommes prêts à exprimer. Les Américains, par exemple, s’efforcent d’exprimer de l’euphorie et de l’excitation. Ils se sentent obligés de dire qu’ils vont EXTRAORDINAIREMENT BIEN ! Si vous allez juste à peu près bien, les gens pensent que vous êtes déprimé », expliquent Fosslien et West Duffy dans No Hard Feelings.
Dans son livre The Culture Map, Erin Meyer explique que certaines cultures sont plus favorables à l’expression des émotions. Par exemple, les Brésiliens, les Mexicains, les Français, les Italiens et les personnes du Moyen-Orient expriment volontiers leurs émotions. En revanche, les Néerlandais, les Allemands, les Danois, les Suédois, les Coréens, les Britanniques et les Japonais sont a priori moins expressifs. Et ce n’est pas la seule différence. Certaines cultures promeuvent la confrontation alors que d’autres préconisent de l’éviter à tout prix. Les Français, les Israéliens, les Russes, les Allemands, les Néerlandais et les Danois n’hésitent pas face à la confrontation alors que les Britanniques, les Suédois, les Japonais, les Brésiliens et les Indiens auront plutôt tendance à la fuir.
Être conscient des différences culturelles est un atout considérable, dans le cas d’un management interculturel, mais pas que. Cela facilite la communication et améliore la productivité. Cela contribue aussi à plus d’empathie et d’intelligence émotionnelle. Et ce qui est vrai pour les différences culturelles l’est aussi pour les différences de personnalité. « Sur le lieu de travail, les introvertis essaient souvent de cacher leurs qualités d’introvertis pour mieux pouvoir s’intégrer. Le problème, c’est que s’ils n’affrontent pas la question de leurs personnalités différentes, les extravertis et les introvertis n’arrivent pas à travailler ensemble. »
4. Lancez un programme de mentorat intergénérationnel
La communication, l’empathie et l’intelligence émotionnelle peuvent être améliorées grâce aux échanges entre les générations. Plus il y a de générations et de communication entre elles, plus l’intelligence émotionnelle se développe. C’est la raison pour laquelle le mentorat intergénérationnel permet de faire la différence. Pourquoi ? Parce que la relation n’est pas à sens unique. Les participants peuvent être mentor et mentoré simultanément. S’ils apprennent l’un de l’autre, alors la relation est mutuellement avantageuse. Avoir des expériences et points de vue différents, c’est a priori une base intéressante. À l’échelle de l’organisation, le mentorat intergénérationnel, comme toutes les formes de mentorat qui cultivent la différence et la diversité (entre personnes d’origines et de cultures différentes), est un excellent moyen d’augmenter la diversité tout en valorisant l’existante.
« Le coaching et le mentorat entre personnes de classes d’âge différentes sont intéressants », révèle une étude de la Harvard Business Review, parce que les personnes d’âges différents ont beaucoup à apprendre les unes des autres. Les stéréotypes veulent que les jeunes enseignent aux plus vieux à se servir des ordinateurs tandis que les plus vieux leur apprennent à être plus sages. Mais au-delà des clichés, beaucoup d’apprentissages sont vraiment possibles. Cette même étude HBR montre que les personnes de classes d’âge différentes se ressemblent bien plus qu’on ne l’imagine, mais il existe tout de même quelques différences notoires. « Ce sont à la fois les similitudes et les différences qui rendent la possibilité du mentorat intergénérationnel si intéressante. »
5. Soignez la communication dématérialisée
Une bonne part de notre communication est non verbale. Le langage du corps et le ton que nous employons constituent une part essentielle des messages que nous envoyons aux autres. De ce fait, la communication en ligne est forcément imparfaite lorsqu’il s’agit d’exprimer des émotions. Les emails et les messages instantanés peuvent être (et seront souvent) mal compris. Voici les éléments auxquels il faut prêter attention, de façon à éviter les erreurs dans les échanges par Internet…
- Faites en sorte de rencontrer les gens d’abord, en personne ou lors d’un appel vidéo. Faites de même pour donner du feedback ou échanger des informations essentielles. Les emails et les messages instantanés conviennent pour les échanges moins propices aux émotions.
- Sachez que vos messages écrits seront interprétés dans un contexte émotionnel : par exemple, trop de points d’exclamation renverront une impression d’hystérie.
- Utilisez les emojis, mais avec modération. Les emojis ont été inventés pour nous aider à laisser des indices émotionnels en l’absence de langage corporel. Ils sont parfois d’une grande aide. Par exemple, ils peuvent aider à signifier que vous exprimez une idée sur le ton de la blague. Toutefois, un excès d’emojis peut vous faire apparaître comme peu professionnel. Il est plus prudent de les utiliser avec les gens que vous connaissez déjà.
- Écrivez avec soin : les fautes de frappe et erreurs d’orthographe ou de grammaire suggèrent au destinataire du message que vous n’avez pas eu beaucoup de temps à leur consacrer ou que vous êtes trop émotionnel pour prendre le temps de vous exprimer. Les fautes de frappe, en particulier, peuvent dénoter de la colère.
- N’envoyez pas de messages en dehors des horaires de travail (à moins qu’il ne s’agisse d’une véritable urgence) : les emails transmis pendant la nuit ou le week-end ne seront jamais reçus avec bienveillance. Ils ont plutôt tendance à inspirer la colère et le ressentiment – surtout qu’il existe maintenant le fameux droit à la déconnexion, hein. Une solution est d’écrire vos messages hors ligne et de les envoyer quand l’horaire est convenable : plusieurs outils permettent d’ailleurs de programmer cet envoi.
Photo : Thomas Decamps pour WTTJ
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