Les femmes sont des managers comme les autres... et il en faut plus !
15 juil. 2019
4min
Rédactrice
Plus à l’écoute, sensibles, diplomates… On a parfois tendance à attribuer aux leaders femmes des qualités prétendument inhérentes à leur sexe. Mais au-delà de cette approche essentialiste, de nombreuses études chiffrées le prouvent : il existe une forte corrélation entre la présence de femmes dans les organisations, notamment à des postes de direction, et la bonne santé d’une entreprise.
Si les causes sont encore difficiles à déterminer, les bénéfices d’une plus grande féminisation du leadership et du management sont de plus en plus tangibles. Or dans un contexte où les groupes du CAC 40 ne comptent encore que 13,6% de femmes au sein de leurs comités exécutifs, nous avançons 5 arguments chocs pour faire bouger les lignes !
Plus de mixité pour une meilleure gouvernance
Si la banque américaine « Lehman Brothers » s’était appelée « Lehman Brothers and Sisters », est-ce que la crise financière de 2008 aurait quand même eu lieu ? Des travaux se sont penchés sur cette question et ont conclu qu’une plus grande mixité sexuelle au niveau de la gouvernance de cette banque aurait sans doute pu prévenir sa faillite ainsi que la crise économique qui s’ensuivit (Cairn, 2010).
Et si cela est vrai, ce n’est pas parce que les femmes ont des qualités de leadership différentes voire meilleures que les hommes. D’après Sarah Saint-Michelle, chercheuse à l’université Toulouse-I : « les femmes restent des managers comme les autres » (Source :Le Monde, 2018). Le genre n’a aucune incidence sur le style de management selon elle. Les causes d’une meilleure prise de décision sont plutôt à chercher du côté des bénéfices structurels que les entreprises tirent de leur féminisation. Qui dit mixité dit diversité des points de vue et des styles de décisions - ce qui entraîne très souvent une gouvernance plus clairvoyante et éthique sur le long terme.
« Les femmes restent des managers comme les autres »
Féminisation du leadership, un argument financier
Non seulement les femmes participent à une gestion plus saine de l’entreprise, mais elles contribuent aussi à doper ses performances financières.
Selon une étude publiée par la banque helvétique Crédit Suisse, parmi les sociétés côtées en bourse, celles qui comptent le plus de femmes au sein de leur conseil d’administration ou de leurs instances de direction, affichent une progression plus rapide de leur rentabilité financière que celles dirigées exclusivement par des hommes. « Entre la fin de l’année 2013 et mi-2016, les entreprises dans lesquelles 25% des cadres dirigeants étaient des femmes ont surperformé, avec un taux moyen de croissance annuelle de 2,8%. Ce chiffre est de 4,7% dans les entreprises où 33% des cadres dirigeants étaient des femmes, et même de 10,3% lorsque les femmes représentaient plus de 50% des cadres dirigeants » précise l’étude.
Les observations de Michel Ferrary, professeur de management des ressources humaines à HEC, à l’Université de Genève et chercheur-affilié à SKEMA Business School, vont dans le même sens. En scrutant l’évolution du nombre de femmes dans 62 des plus grandes entreprises privées françaises, il remarque que les entreprises qui dépassent la moyenne du nombre de femmes cadres (qui se situe à 30,34%) ont une rentabilité opérationnelle bien supérieure à celles qui s’éloignent de cette moyenne. C’est le cas, par exemple, d’Hermès ou de BNP Paribas, dont la masse salariale est composée de plus de 45% de femmes cadres (Le Figaro, 2016).
Même constat du côté des PME : une étude Women Equity a montré que les PME dirigées par des femmes étaient plus nombreuses à avoir connu une croissance de leur chiffre d’affaires sur l’année 2013 (70 % contre 67 % pour celles dirigées par des hommes, pour des PME de tailles semblables).
Les dirigeantes encouragent l’excellence organisationnelle
D’un point de vue de l’organisation, il semblerait que les femmes contribuent efficacement à ordonner, répartir, planifier et adapter les ressources disponibles au sein de l’entreprise. C’est effectivement ce que révèle l’étude « Women Matter », menée par le cabinet de conseil Mc Kinsey, auprès d’une centaine d’entreprises mondiales.
Les réponses de près de 60 000 employés, concernant les performances de leur entreprise sur neuf dimensions clés de l’organisation, ont permis d’établir un parallèle frappant entre excellence organisationnelle et la présence de femmes dans les instances de direction. Les résultats démontrent que davantage d’employés ont répondu positivement sur des critères comme le leadership, l’innovation, la coordination ou l’ouverture sur l’extérieur, lorsque l’entreprise comportait trois femmes dirigeantes ou plus.
Les femmes, un atout en matière de satisfaction client et d’image
Il est évident que, pour mieux comprendre et s’adapter aux nouvelles tendances de société et de consommation, les entreprises ne peuvent plus se passer des femmes.
La raison est simple : les femmes pèsent fortement dans les décisions d’achat des consommateurs. En Europe, par exemple, les femmes seraient à l’origine de 70% des décisions d’achat des foyers, alors qu’elles représentent 51% de la population. Même les industries traditionnellement masculines voient la part des femmes croître parmi les consommateurs. Par exemple, les femmes influencent 60% des achats de voitures neuves au Japon (Source : McKinsey).
La mixité constitue donc un facteur de convergence entre l’entreprise et ses clients… Mais aussi entre l’entreprise et ses employés, partenaires et actionnaires - qui comptent aussi de plus en plus de femmes dans leurs rangs ! Ainsi, une plus grande part de femmes leaders peut avoir des répercussions globales positives sur l’image de marque. Une étude, réalisée par la Commission européenne, a révélé que 69% des entreprises ayant mis en place des programmes de diversité, ont constaté une amélioration de leur image. (Source :McKinsey).
Recruter des leaders femmes pour élargir son vivier de talents
Avec l’accélération technologique et l’émergence de nouveaux métiers, surtout dans le secteur du numérique, une forte pénurie de main d’oeuvre qualifiée se prépare… En effet, selon une étude du cabinet de recrutement américain Korn Ferry, la France pourrait manquer de 1,5 million de salariés hautement qualifiés d’ici 2030. Pour rester compétitives, les entreprises devront se tourner de plus en plus vers les femmes, qui représentent un réservoir de talents sous-exploité.
Les chiffres parlent d’eux-même : si le taux d’emploi des femmes reste constant, une pénurie de 24 millions de personnes actives est à prévoir d’ici 2040 en Europe. En revanche, s’il atteint celui des hommes, cette pénurie est ramenée à 3 millions (Source : McKinsey).
Ainsi, pour ne pas perdre en compétitivité et risquer de passer à côté des futurs leaders et managers de demain, les entreprises ont intérêt à s’intéresser dès à présent au potentiel inexploité des femmes. Reste encore à les attirer et à les former aux métiers du numérique - car même si elles sont majoritaires dans l’enseignement supérieur, elles demeurent sous-représentées dans les formations scientifiques et technologiques (Observatoire des Inégalités, 2018).
Comme on vient de le voir, une plus forte mixité au sein des postes de management et de direction d’une entreprise est un gage de meilleures performances. Mais pour encourager les femmes à accéder à des postes à responsabilité, notamment dans des domaines scientifiques et technologiques, il est indispensable que les entreprises, et la société en général, continuent à investir dans la formation professionnelle, à encourager les femmes à prendre confiance en elles et à lutter contre toutes les formes d’inégalités et de discriminations. Nous avons tous et toutes à y gagner…
Photos : WTTJ
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