Psycho Boulot : pourquoi la pensée binaire vous freine au travail ?

Publié dans Psycho Boulot

02 nov. 2022

auteur.e
Soline Cuilliere

Journaliste vidéo - Welcome to the Jungle

contributeur.e

PSYCHO BOULOT - Pourquoi procrastine-t-on parfois au travail alors qu'on est "sous l'eau" ? Pourquoi imagine-t-on toujours le pire au boulot comme dans la vie ? Pourquoi travaille-t-on 5 jours par semaine et pas 3, 4 ou 6 ? Ou encore, pourquoi a-t-on décidé que les week-ends étaient une bonne idée ? Découvrez Psycho Boulot, la série qui vous offre un divan confortable où aborder les questions existentielles du monde du travail, et prendre (enfin) un coup d'avance sur votre cher cerveau grâce à notre expert du Lab Albert Moukheiber.

Etes-vous cerveau gauche ou cerveau droit ? Ou pour le dire autrement, êtes-vous plutôt scientifique ou littéraire, créatif ou analytique ? Cette manière de diviser le monde en deux catégories est communément considérée comme l’erreur de la pensée binaire. Et le fonctionnement de notre cerveau n’y échappe pas !

Cerveau droit/cerveau gauche, ce neuromythe

La notion de « cerveau gauche/cerveau droit » fait partie de ce qu’on appelle les neuromythes, ces fausses croyances communes qui existent autour du cerveau. Celle-ci en particulier voudrait que la personnalité d’un individu dépende de la région du cerveau qu’il utilise le plus : ainsi, un artiste serait plutôt « cerveau droit », tandis qu’un scientifique davantage « cerveau gauche ». Or, les « cerveau gauche » et « cerveau droit » n’existent pas, le cerveau étant divisé en deux parties baptisées « hémisphères ».
Certaines de nos fonctions se trouvent effectivement dans l’hémisphère gauche ou l’hémisphère droit du cerveau. C’est le cas, par exemple, des centres primaires de traitement de l’information du langage qui sont latéralisés pour une majorité des personnes dans l’hémisphère gauche. Mais, on ne dispose pas pour autant de capacités séparées à faire des tâches plutôt littéraires ou scientifiques, plutôt créatives ou analytiques.

En réalité, on sollicite très souvent plusieurs compétences pour faire quelque chose. Si je veux faire un solo de jazz, cela nécessite de passer des heures et des heures à répéter de manière très méthodique, et ce même si je suis un grand virtuose. Il est nécessaire de comprendre comment fonctionne quelque chose pour pouvoir devenir créatif.
Et, à l’inverse, pratiquer une méthode scientifique impose d’avoir un imaginaire très développé pour pouvoir penser un protocole expérimental. Prenons l’exemple de Benjamin Franklin qui s’est intéressé à la foudre de manière tellement passionnée qu’il a attendu un soir d’orage pour tenter de capturer la foudre à l’aide d’un cerf-volant, d’une bouteille et d’une clé. Rien de bien rationnel non ?

Artiste et scientifique, même combat ?

Aujourd’hui, travail créatif et travail analytique sont souvent séparés à cause de notre système d’éducation, qui distinguent les matières scientifiques des matières littéraires. Mais cette séparation n’a pas toujours existé. Pendant longtemps, les mêmes personnes étaient à la fois des artistes et des scientifiques, comme Léonard de Vinci ou encore Michel-Ange. Et au final, un poète et un scientifique font un peu le même boulot. Les deux sont fascinés par ce qu’on appelle le monde naturel, c’est-à-dire le monde qui nous entoure, celui dont on fait partie.

Est-ce que j’ai besoin d’un poète pour qu’il m’explique l’émotion que je ressens face à un coucher du soleil ? Pas vraiment. Mais le poète veut l’exprimer d’une manière tellement absolue qu’on ne peut plus nier la beauté de la nature. Et est-ce que j’ai besoin d’un scientifique pour m’expliquer ce qu’est la gravité ? C’est un principe que nous comprenons tous : si je jette quelque chose, il retombe à terre. Mais le scientifique, grâce à ces formules, veut exprimer la gravité d’une manière tellement absolue qu’on ne peut qu’accepter cet effet magique de la nature. Poète comme scientifique vont ainsi exprimer leur fascination émotionnelle, rationnelle, affective, analytique et créative face à la beauté du monde.

Venez comme vous êtes, vraiment

Ces divisions ne sont pas seulement fallacieuses, elles sont aussi parfois délétères. Si je suis très intéressé par le design graphique, mais que je considère être quelqu’un de scientifique et pas d’artistique, je vais peut-être me priver de certaines carrières où je pourrais m’épanouir juste à cause de cette case dans laquelle on m’a mis. Cela s’applique aussi bien du côté de l’employé, celui qui cherche un boulot, que de l’employeur, celui qui cherche à recruter. De plus en plus d’entreprises mettent en avant dans leurs offres d’emplois : « Cherchent profils créatifs. » Or, cela risque d’envoyer une sorte de signal social qui dit : « Si vous êtes issu d’une filière scientifique, ne postulez pas chez moi. »

Cette pensée binaire peut donc avoir des conséquences négatives en mettant les individus dans des cases prédéfinies, qui les empêchent d’envisager tout le champ des possibles. « Si tu aimes les maths, c’est que tu ne peux pas être bon en poésie » ou « Si tu aimes le dessin, c’est que tu ne peux pas être bon en ingénierie » sont des visions simplistes et mensongères qui nous font perdre ce qui nous rend intéressants. Ce qui fait notre complexité et notre singularité.

Article édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.

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