« Recrutements ratés, argent perdu… Tout ce qu’il ne faut pas faire, je l’ai fait ! »
07 juin 2023
5min
De son enfance dans les montagnes du Jura à l’anniversaire privé de SnoopDog, Arthur Auboeuf, cofondateur de Team For The Planet, se confie sur son parcours haut en couleur, son retour à des valeurs essentielles et ses convictions teintées de vert.
« Je pense que j’ai toujours été un optimiste. J’ai ce trait de caractère “by design” », commence Arthur. Et de l’optimisme, il en fallait pour se lancer dans un projet comme TeamFor The Planet, dont l’objectif est de mobiliser une communauté mondiale pour lutter contre le changement climatique. Mais avant d’en arriver là, retournons dans les montagnes du Jura.
« Je me suis toujours dit que je vivrai plusieurs vies en une, et que rien n’était infaisable »
Enfant, Arthur occupait son temps libre à creuser des mares pour regarder la vie s’y installer. « Mes parents ont dû se demander si je n’étais pas un peu autiste. Je pouvais passer des heures à observer des libellules et à m’émerveiller devant des grenouilles », confie-t-il. À l’école, quand les autres enfants parlent de football et de marques de voiture, il reste à l’écart. « Je m’en tamponnais déjà à l’époque, et c’est pareil aujourd’hui. J’étais conscient d’avoir des centres d’intérêt différents des autres, mais je ne me sentais pas inadapté pour autant. En fait, je cultivais déjà cette différence car j’ai vite compris que c’était une force », ajoute-t-il.
Et de la force, il lui en faudra pour clouer le bec à toutes les personnes qui l’invitent à faire des choix et à cesser de multiplier les projets. « Rien ne m’énervait davantage que ça. Je me suis toujours dit que je vivrai plusieurs vies en une, et que rien n’était infaisable », revendique Arthur. Et à 28 ans, il a effectivement déjà vécu plusieurs vies.
Le faux hypersocial qui parle chaque semaine à des millions d’internautes
Celui qui reconnaît n’avoir jamais aimé la compétition et les rapports de force se retrouve davantage dans la co-construction et le partage. Dès ses premières années universitaires en fac de sport, il crée – presque par hasard – ses premières communautés Facebook. « Quand j’ai découvert internet, les réseaux sociaux, les communautés, j’ai trouvé ça fascinant. C’est incroyable de pouvoir s’adresser à n’importe qui ! », s’enthousiasme-t-il. Car il est loin d’être l’hypersocial que l’on imagine… « Je suis plus à l’aise à l’écrit, quand je peux dérouler ma pensée sans être interrompu. D’ailleurs, c’est pour cela que j’aime écrire : pour challenger ma pensée et pouvoir la retravailler », explique-t-il.
Remarqué par des entreprises françaises et américaines, il enchaîne les projets entrepreneuriaux… avec autant d’échecs que de succès. « Je n’ai jamais cherché à devenir un “entrepreneur”, confesse-t-il. J’ai grandi très loin de ce milieu et je l’ai découvert de façon très candide. Moi, j’aimais surtout créer de nouvelles choses. Et comme je n’avais aucune culture entrepreneuriale, j’ai fait de l’essai-erreur à haute fréquence : je me suis pris des couteaux dans le dos, j’ai fait de mauvais recrutements, j’ai perdu beaucoup d’argent bêtement… Tout ce qu’il ne faut pas faire, je l’ai fait ! »
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D’une vie de VIP… à un retour aux sources
Ses projets lui permettent d’accéder très tôt à une vie qui fait rêver beaucoup de jeunes de son âge : voyager, côtoyer des stars ou encore accéder à des soirées inaccessibles. « J’ai assisté à l’anniversaire privé de SnoopDog, j’ai pu voir de grands événements sportifs en loge VIP… mais j’ai vite compris que ça ne m’intéressait pas », partage-t-il. Les paillettes ? Ce n’est pas son truc.
En 2018, il refuse un poste ambitieux pour une start-up américaine et s’échappe, seul, dans le Jura. Sur ses skis de fond, au milieu de la forêt, il réfléchit à ce qu’il souhaite réellement. « Je voulais faire des choses qui me rendraient vraiment heureux, qui auraient de l’impact, qui me feraient vivre dans la réalité et pas dans l’illusion. Et j’ai toujours été convaincu que l’entrepreneuriat était un formidable véhicule pour ça », continue-t-il. Alors après plusieurs semaines de réflexion, il range ses skis et se lance un nouveau projet : la création d’un start-up studio dont l’objectif serait d’identifier des innovations viables et qui pourraient « changer la donne ». Cela vous dit quelque chose ?
Et c’est en scrollant sur Facebook qu’il tombe sur la vidéo d’une ancienne connaissance, Mehdi Coly, qui pitche un projet similaire. « Mehdi et Nicolas Sabatier avaient cette idée en tête depuis 10 ans. Ils étaient déjà en contact avec Laurent Morel (également cofondateur du projet, ndlr). On s’est tous retrouvés à Lyon et on a compris qu’on partageait la même vision, et que chacun avait quelque chose de différent à apporter à ce projet. Et à partir de là, tout s’est fait très vite », se remémore-t-il. Nous sommes en décembre 2019. Team For the Planet est né.
« Avec Team for the Planet, chaque petite victoire me surprend et me fait plaisir »
Pour Arthur, le début de l’aventure est à la fois intense et plein de doutes. « Je voulais être dans la cage aux lions, entouré de personnes qui sont meilleures que moi et qui me bousculent, et j’ai été servi. J’ai l’habitude de dire que si tu es le plus intelligent de la pièce, c’est qu’il faut changer de pièce ! », rapporte-t-il.
Mais cette philosophie est loin de lui rendre la vie facile. Ses débuts représentent une période d’inconfort permanent, difficile mais nécessaire. « J’étais dans un entre-deux, je ne savais pas exactement où on allait, mais je savais aussi que c’était exactement là qu’il fallait être pour réussir. Sans cet inconfort, c’est difficile de faire décoller un projet aussi ambitieux, de trouver le “truc”. Alors il faut serrer les dents et tenir* », analyse-t-il aujourd’hui.
Ce combat permanent pour lutter contre le changement climatique offrirait des nuits blanches à plus d’un écolo convaincu. Mais pas à Arthur. « Je ne me bats pas parce que je cherche à gagner. Je ne sais pas si on va réussir, alors chaque petite victoire me surprend et me fait plaisir », confie-t-il. S’il s’investit dans Team For The Planet aujourd’hui, c’est avant tout pour répondre à son propre besoin d’équilibre. « C’est une façon d’être la version la plus simple et la plus alignée de moi-même », précise-t-il.
Alors, Arthur continue à agir concrètement pour ses convictions, mais sans se faire d’illusions. « Je serai un grand-père heureux si je vois ce monde évoluer, mais je ne veux pas me torturer pour cela. Chaque jour, je vote en construisant le monde que je souhaite. Mais si la société choisit d’aller vers l’apocalypse, je sais que je ne pourrai rien y faire », ajoute-t-il.
Une quête permanente d’équilibre et d’émerveillement
Mais ce recul face aux enjeux planétaires ne le protège pas de tout. Son objectif ? Ralentir, et continuer à chercher l’équilibre, malgré un quotidien intense. Une quête qui ne se fait pas sans sacrifices. « Aujourd’hui, je vis dans une certaine dissonance : la nature est ma raison d’être… mais je passe trop de temps sur des écrans », reconnaît-il. Alors, chaque jour, il apprend à dire non. « Je dois refuser des dizaines de sollicitations, de conférences et de rencontres pour continuer à améliorer mon équilibre de vie. Et c’est difficile quand on est dans la team des gentils », continue-t-il. Et si l’entrepreneuriat lui offre cette indépendance qui lui permet de créer, de faire naître de nouvelles idées, il ne sera jamais un entrepreneur « à tout prix ». « Je ne suis pas attaché à ce statut, je veux juste être heureux. Si ça devient une contrainte, j’arrêterai sans état d’âme », affirme-t-il.
Alors, quelle est la suite ? « Le plus vite je serai inutile à Team For The Planet, le mieux ! », rigole-t-il. Et dans ce futur dans lequel il n’aurait plus autant à apporter au projet, il imagine déjà bâtir un lieu en pleine nature, qui pourrait accueillir des leaders d’opinions, des entrepreneurs et des politiques pour les aider à se poser des questions et prendre du recul sur les enjeux climatiques et sociétaux. « J’aimerais pouvoir aider des gens à mettre le pied à l’étrier », explique-t-il simplement.
C’est sur une note presque philosophique que se conclut ce portrait. « Un jour, en me baladant dans la nature, j’ai compris un truc : le bonheur est toujours là. C’est juste un état de conscience qui est présent, et que l’on doit activer », observe-t-il. Et pour y accéder, il nous confie son secret : l’émerveillement. « C’est dur de ne pas perdre l’émerveillement aujourd’hui. Et pourtant, je suis convaincu que c’est le chemin vers le bonheur le plus rapide. Ma quête de vie, c’est simplement de revenir à une capacité d’émerveillement maximal », conclut-il. Plus facile à dire qu’à faire, sans aucun doute. Mais comme pour les projets de Team For The Planet, cela vaut le coup d’essayer.
Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ
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