Comment bien communiquer sur les réseaux sociaux en tant que CEO ?
06 avr. 2021
6min
Rédactrice indépendante.
La crise a-t-elle révélé les talents littéraires et de speakers des CEO ? Depuis un an, les prises de parole de dirigeant.e.s se multiplient sur les réseaux sociaux. Et c’est sur LinkedIn que la tendance est la plus marquée avec, pour indication, une augmentation de 55% entre mars et avril 2020. Mais pourquoi prendre la plume ou la parole en cette période ? Le baromètre Edelman de la confiance spécial Coronavirus indique que les citoyen·ne·s et les salarié·e·s font davantage confiance à leurs dirigeant.e.s qu’aux cheff.e.s d’État. La construction de sa marque personnelle en tant que CEO semble une nouvelle manne à exploiter pour faire rayonner son produit, mais aussi attirer et fidéliser ses futurs collaborateur·rice·s. Alors comment utiliser les réseaux sociaux à bon escient quand on est dirigeant.e ? Comment se lancer et se distinguer ? Quels sont les impairs à éviter ? Nous avons posé la question à Benjamin Perrin, créateur de la newsletter Plume With Attitude et concepteur-rédacteur freelance.
Pourquoi prendre la parole sur les réseaux sociaux en tant que CEO ?
Benjamin Perrin : C’est un atout de taille dans la création d’une marque et, de son pendant interne, la marque employeur. Les réseaux sociaux et plateformes de création (blog, podcast, newsletter) permettent à chacun de créer son propre média personnel. Un/une CEO doit comprendre qu’au-delà de son produit, il/elle peut créer une proximité émotionnelle grâce à sa propre personnalité. Cette relation de confiance se nourrit de sa position de détenteur·rice de la vision de l’entreprise, de sa philosophie et de ses valeurs. L’exemple de Stripe est particulièrement intéressant. Si la cible du produit est initialement composée de développeurs, la mission des frères Collison, « augmenter le PIB d’Internet », résonne bien au-delà des sphères techniques de l’entrepreneuriat.
Comment établir sa stratégie de communication personnelle ?
Il y a probablement autant de « niches » sur lesquelles communiquer que de start-ups. Reste qu’on peut en dégager plusieurs grandes tendances :
Le mouvement « Build In Public » : Le terme correspond à ces entreprises qui jouent la carte de la transparence dans l’évolution de leur start-up. Publication de ses processus de recrutement, création de roadmaps ouvertes et même partage de certains chiffres-clés sont monnaie courante dans ce mouvement entrepreneurial. Kyle Hall, Ghostwriter chez The Family, me confiait que les meilleurs contenus sont ceux qui contiennent des données exclusives. Si la transparence de la démarche n’est pas sans risques vis-à-vis de la concurrence, celle-ci est gage de crédibilité et de confiance.
La communication autour de la vision : Certains disent que les entrepreneurs savent quelque chose de l’avenir que les autres ignorent. Mais comment cette fameuse vision se nourrit-elle ? Jean-Charles Samuelian-Werve, CEO d’Alan, est probablement l’exemple français le plus parlant. La newsletter de sa start-up est à son nom et nous permet de découvrir ses lectures et inspirations. Celui-ci a même publié un livre, Healthy Business, sur la construction de la culture interne d’Alan qui se distingue notamment par l’absence de réunions. C’est un exemple parfait de création de marque personnelle distincte de celle de son entreprise.
L’approche éditoriale : C’est paradoxalement la voie que je trouve la plus accessible sur le volet création, mais aussi la plus difficile en termes de différenciation. Le podcast A-Players de Robin Choy, co-fondateur et CEO de Hiresweet, propose une série d’interviews autour de la construction d’équipe. Jusqu’ici rien de révolutionnaire. Sauf que le média est d’une qualité exceptionnelle, avec une sélection d’invités au rayonnement mondial comme Michael Seibel, dirigeant de Y Combinator ou Kim Scott, auteure du best-seller Radical Candor.
Quelle que soit la stratégie adoptée, priorité à la cohérence. Il est conseillé de travailler la marque personnelle du/ la CEO avec ses équipes marketing et/ou des spécialistes de la communication. Beaucoup d’entreprises font l’erreur de remettre à plus tard la création des fondamentaux de leur marque. Or, c’est une stratégie qui a souvent porté ses fruits pour des start-ups qui ont réussi par ce biais à créer une communauté et des effets de réseaux autour de leur produit. Et la communication autour du/ la CEO y contribue largement.
Comment choisir les bons réseaux et le rythme adéquat ?
Je conseille généralement de commencer avec le format avec lequel on se sent le plus à l’aise. Audio ou écrit, image ou vidéo : c’est à chacun de s’approprier le format qui reflète le mieux ses appétences et sa personnalité. Et pour les personnes qui n’ont pas de média de prédilection, le mieux reste de tester, d’itérer, et de retenir ce qui fonctionne le mieux. J’ai également tendance à recommander aux CEO et équipes marketing de ne pas trop se disperser. Commencez par choisir un canal d’expression majeur pour créer votre contenu (ex : la vidéo), puis diffusez-le via les réseaux sociaux. Pour ma part, mon média de prédilection est la newsletter, que je relaye ensuite sur les réseaux sociaux pour acquérir de nouveaux lecteurs. Enfin, je pense que la question du rythme de publication est souvent surestimée au détriment du contenu. Deux publications de newsletters par mois est largement suffisant pour un/une CEO si la qualité est au rendez-vous. Aujourd’hui, la construction d’une marque forte se fait dans la longévité et non dans le martèlement.
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Comment bâtir sa ligne éditoriale ?
Pour moi, la première question à se poser est celle de l’intention. Quel est le but de ma prise de parole : informer, rassurer, inspirer ? Ai-je envie d’un ton plutôt sérieux ou décalé ? Quelle valeur mon média peut-il apporter au-delà de ce que mon entreprise fait déjà ? Il me semble indispensable de s’exprimer naturellement, sans s’inventer un rôle dans le fond comme dans la forme. Par exemple, être introverti n’est pas un souci. Bien au contraire, il y a largement la place pour du contenu long format qui fait place à la réflexion profonde. Il y a donc un vrai travail d’introspection à faire pour éviter de tomber dans le piège du copier-coller.
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Les deux dirigeant·e·s les plus inspirant·e·s côté prise de parole ?
Ryan Hoover : Le fondateur et CEO de Product Hunt (jusqu’à fin 2020) a toujours été mon entrepreneur préféré. Par son enthousiasme et sa volonté de mettre en avant les réalisations de makers sur sa plateforme ou sur Twitter, il est devenu un véritable moteur de l’écosystème actuel. C’est l’exemple-type du Community Builder qui a su insuffler sa personnalité à son entreprise et à créer des effets de réseaux à grande échelle autour de son produit.
Mathilde Collin : La co-fondatrice et CEO de Front force l’admiration sur bien des aspects. C’est l’une des grandes pionnières du « Build in Public » et de la transparence sur le volet bien-être en entreprise. Celle-ci a d’ailleurs sa propre newsletter pour partager ses retours d’expérience à destination des entrepreneurs.
4 conseils pour bien démarrer :
Savoir (bien) s’entourer : Il va sans dire qu’un/une CEO est suffisamment occupé·e pour faire de sa stratégie de marque personnelle. D’où l’importance de pouvoir compter sur des experts dont c’est le métier — dans son équipe ou en externe. Pour de la communication écrite, le ghostwriting est une solution à envisager. Mais il est essentiel de trouver une personne capable de cerner parfaitement sa personnalité afin de réussir à « dupliquer » sa pensée. Enfin, privilégier la co-construction à la délégation de tâches.
Trouver des références originales : N’est pas Steve Jobs ou Elon Musk qui veut. De plus, comment se distinguer si on se calque sur les mêmes références que tout le monde ? Et puis, il y a tellement d’artistes, de créateurs et de personnalités dont vous pouvez vous inspirer…
Étudier d’autres organisations : Le métier de Chief of Staff de plus en plus présent en start-up vient de la politique, le métier de plume aussi. Si vous voulez devenir une personnalité publique, apprenez des organisations dont c’est la spécialité.
Jouer collectif : Créer une marque autour de son/sa CEO, c’est bien. Valoriser toute son équipe, c’est mieux. Lorsque j’étais chez Comet, les co-fondateurs, personnalités à des postes-clés et autres salarié·e·s étaient encouragé·e·s à s’exprimer sur leurs propres médias ou lors d’événements. Avoir une pluralité de voix au sein de son entreprise a de nombreux avantages en termes de perception du produit, de sa marque employeur ou même de visibilité vis-à-vis de potentiels investisseurs.
Lire aussi : La communication RH doit-elle être nécessairement humaine ?
Une recette accessible quand on n’a pas/peu de budget ?
Il y a énormément à gagner en collaborant sur de la création de contenus avec d’autres start-ups et créateurs présents dans son secteur. Par exemple, réaliser des interviews est toujours une bonne idée pour l’échange de visibilité. C’est aussi la meilleure stratégie pour être sollicité à son tour par d’autres acteurs. Cela permet de s’affirmer en tant que média et de créer de la visibilité pas seulement pour son entreprise mais pour tout son secteur. Il faut sortir de cette idée que la communication d’une start-up se résume à la promotion de nouvelles fonctionnalités ou l’annonce d’une levée de fonds.
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