Manager : 5 techniques pour gérer votre boss imprévisible
28 juin 2021
4min
Rédactrice indépendante.
Toujours dans l’opposition, irascible ou changeant d’avis comme de chemise, un·e boss imprévisible voire caractériel·le peut vite devenir un enfer pour vous et votre équipe. Ici, les risques de burnout et de perte de productivité sont immenses pour l’entreprise. Il faut agir… Mais comment gérer cette instabilité permanente ? Quels processus imaginer pour protéger ses équipes et, surtout, se bâtir une carapace émotionnelle ? Entre agilité, décryptage psychologique et recadrage en mode communication non violente, on vous propose quelques conseils pour que votre quotidien ne vire ni au cauchemar ni au pétage de plombs !
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Faites le deuil de la relation professionnelle parfaite
Un·e boss ingérable, ça ressemble à quoi ? Romain N., manager au sein d’une entreprise à forte croissance dans le digital, doit opérer au quotidien avec un·e patron quelque peu déroutant·e. Il relève deux types de situation : « D’abord, côté pile : c’est une personne imprévisible dans ses réactions car elle n’obéit pas à la logique quand, par exemple, je la sollicite pour une validation. Puis, côté face : ses décisions sont souvent irrationnelles ». Selon Ludovic Girodon, consultant, conférencier et auteur spécialisé en management d’équipe, « absorber les tensions fait partie du job de manager. Les relations professionnelles sont imparfaites, surtout à ces positions ». C’est pourquoi il insiste sur une étape clé : l’acceptation ! « Il faut assumer le fait que le relationnel avec cette personne ne va pas être simple. Mais il faut le voir comme un challenge et non pas comme une galère. C’est une question de posture ». Il poursuit en invitant les managers à relativiser face à quelqu’un d’irascible car « il est rare qu’il / elle soit intentionnellement malveillant·e. Généralement, il / elle n’a pas conscience des effets qu’il / elle génère. Partir de ce postulat aide vraiment ».
Osez donner du feedback au manager instable
Il est souvent question de courage managérial, mais connaissez-vous le courage collaborateur ? Très utile dans les situations conflictuelles, cette approche est clé selon Ludovic Girodon. Une relation de travail saine fonctionne en effet dans les deux sens. Au lieu d’incriminer l’autre, « il faut commencer par faire sa propre introspection : suis-je moi-même un·e “bon·ne” collaborateur·rice pour ce manager ? Ai-je conscience de ce qui est important pour lui / elle et dans quelle mesure je m’y adapte ? ». Cette phase est un prérequis pour ensuite « avoir le courage d’aller lui parler en appliquant les bases de la communication non violente (CNV) : j’exprime la problématique par des faits concrets puis, j’explique ce que cela provoque en moi pour, ensuite, identifier des solutions communes. L’idée est de générer une discussion constructive qui n’aboutira peut-être pas… mais il faut passer par là ». Voilà qui permet d’éviter de s’enfermer dans une position victimaire. Ludovic Girodon souligne un point essentiel et libérateur : « On a beaucoup plus la main sur son destin professionnel que ce que l’on pense ». Pour cela, il ne faut pas hésiter à rééquilibrer la relation en posant, à plusieurs reprises, ses limites dans la relation manager-managé·e.
Identifiez les modes de communication possibles
Romain N. a adopté cette posture en essayant de cerner les mécanismes psychologiques de son patron. « Il existe forcément des leviers qui fonctionnent avec ce type de personnalité ! D’après mon expérience, c’est souvent l’approche business ou performance qui permet de remettre la discussion sur les rails. Ce sont d’excellents déclencheurs ». Le manager a détecté un autre point d’appui intéressant : « J’ai pu identifier quelques sources d’inspiration chez lui (marque, leaders inspirants…). Je pioche dans des exemples concrets qui lui parlent pour démontrer qu’il fait fausse route. La démonstration est infaillible ! ». Son travail intègre donc un volet psychologique… dont il se passerait bien.
Pour aller plus loin, Ludovic Girodon propose également d’utiliser des outils de développement personnel : « Une fois que l’on a pris conscience de ses différences et qu’elles ont été dites, il peut être utile de faire appel à des outils tels que le MBTI ou le DISC. Il s’agit surtout d’un prétexte pour établir un mode d’emploi commun. Ça aide à prendre de la hauteur, sinon cela vire au clash. Ce qui impacte négativement la performance ».
Faites tampon avec vos équipes
Romain N. joue aujourd’hui le rôle de « manager paratonnerre ». Il a fallu instaurer ce filtre entre le CEO et les équipes, qui n’existait pas avant son arrivée. « La mise en place de processus et d’un changement d’habitudes prend du temps car il faut que la confiance s’installe de la part du CEO. Mais cela fonctionne bien à terme ». Néanmoins, le court-circuitage n’est pas exclu, encore aujourd’hui ! Dans ces cas-là, Romain rappelle subtilement la marche à suivre en poussant l’argument business : « J’insiste sur le fait que la sérénité et la bienveillance des salarié·e·s servent la performance de la boîte. Puis, du côté de mes équipes, je leur rappelle de prendre du recul : on ne sauve pas des vies ! Je les encourage à déconnecter et mets tout en œuvre pour assurer un environnement de travail sain en absorbant moi-même les chocs ». Ludovic Girodon corrobore : « Il faut être cohérent dans l’incohérence. À savoir, assumer que certaines décisions ne nous appartiennent pas. On ne les partage peut-être pas, mais il faut savoir l’accepter et le transmettre, avec transparence, à ses collaborateur·rice·s. Cela fait partie du jeu : travailler en entreprise induit parfois le fait d’accepter des décisions que l’on ne partage pas à 100% ». D’ailleurs, les désaccords ne sont pas un problème majeur tant que la vision de l’entreprise, sa mission, ses valeurs et sa raison d’être sont bien partagées par le / la manager. C’est ainsi qu’il / elle protège vraiment ses équipes à long terme.
Désamorcez la spirale infernale du négatif
Le risque de ce type de situation est d’enclencher une spirale négative et de l’entretenir auprès de ses équipes. Ludovic Girodon confie un conseil clé : « Il faut formaliser les défauts, mais aussi les qualités de votre boss, même si c’est difficile. L’idée est d’éviter de se focaliser sur ses aspects négatifs car c’est le début de la fin dans une relation professionnelle. Cela nourrit des interactions non-vertueuses et pourrit le quotidien de tou·te·s ». Cette approche rationnelle permet d’éviter le syndrome du village gaulois : « Rien ne sert d’être contre ! Il faut rester factuel en assumant cet inconfort ». Romain N., lui, a réussi à juguler la spirale négative grâce à sa personnalité : « J’ai la chance d’être assez calme par nature. Je sais faire la part des choses en étant très orienté solution. Au lieu de prendre le problème ou la pression sans filtre, je réfléchis tout de suite aux solutions. Et puis, je me suis réconcilié avec le métier que j’ai choisi. Je suis là pour régler des problèmes : c’est le pari que tu fais lorsque tu rejoins une entreprise en forte croissance dans le digital en tant que manager. Sinon, il vaut mieux changer de voie ».
Photo par WTTJ
Article édité par Ariane Picoche
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