Les managers de séries que l'on aimerait avoir : les choix de la rédaction
25 oct. 2023
8min
Tout est parti d’un débat au sein de la rédaction. « Mais non, personne ne rêve d’être managé par Michael Scott, tu es dingue ! », « Ah si, il a plein de défauts, mais au moins il est humain »… Alors, on a commencé à détailler quel manager de série on aimerait avoir et pourquoi. Et puis, quitte à perdre du temps dans des débats inutiles en réunion, on a pensé qu’on avait plutôt intérêt à mettre ça sur papier. Voici donc la liste au Père Noël des managers rêvés de la rédaction, une sélection qui saura vous prouver qu’il y a autant d’attentes que de personnalités différentes.
Le choix de Romane : la dévouée Marie-Jeanne Duthilleul du Bureau des légendes
Quelles sont les caractéristiques d’un bon manager ? Pour moi, il a toujours été indispensable que la personne qui me donne des directions m’inspire du respect et c’est justement ce que je ressens pour le personnage de Marie-Jeanne Duthilleul tout au long de la série du Bureau des légendes. Pour quelles raisons ? Eh oui, il y en a plusieurs. D’abord, comme veilleuse puis formatrice, elle montre qu’elle connaît et comprend parfaitement la complexité des missions qu’elle donne à ses agents envoyés sur le terrain. Selon mon expérience, un manager parachuté à un poste hiérarchique qui ne connaît pas les possibilités ni les limites opérationnelles aura plus tendance à se reposer sur les chiffres que les actions menées par son équipe. Il aura également du mal à connaître la valeur de chacun et ses feedbacks seront biaisés, car uniquement basés sur des indicateurs de performance. Et dans certains secteurs, comme la création artistique, ces critères n’ont aucun sens.
Après, ce que j’aime chez un manager, c’est son dévouement pour son équipe. Là encore, Marie-Jeanne montre une confiance hors de commun pour Malotru en prenant systématiquement sa défense, alors que certains, en hauts lieux, l’accusent d’avoir trahi en se vendant aux renseignements américains. Elle ne juge pas, elle veut comprendre et c’est tout à son honneur. Si l’on transpose cette situation dans un cadre de travail plus ordinaire, un manager doit pouvoir laisser son équipe avancer librement sur un dossier sans forcément suivre les process quand c’est nécessaire. Et encore plus, lorsqu’ils ralentissent le travail. Pour moi, il y a des règles qui permettent de structurer le travail d’équipe et c’est important, mais il y a en d’autres dont on doit pouvoir s’affranchir dans un souci d’efficacité. En d’autres termes, le micro-management, c’est non !
Enfin, Marie-Jeanne excelle aussi dans son rôle parce qu’elle n’a pas peur de montrer ses failles et ses limites. Son excès d’humanité dans un milieu où les sentiments sont proscrits dénotent et renforce l’adhésion de ses agents. D’ailleurs, entre nous, qui voudrait d’un chef qui est tout le temps persuadé qu’il a raison ? Ce qui distingue l’homme de la machine, c’est justement sa propension à se tromper et à reconnaître ses erreurs pour mieux reconstruire et s’améliorer.
Le choix de Thomas : l’intransigeante Emi Maruyama de Tokyo Vice
Au travail, les débuts d’une collaboration peuvent être difficiles, puis la situation peut s’arranger par la suite. Lorsque Jake arrive au Meicho Shimbun Newspaper, il est le premier journaliste étranger à travailler pour un journal japonais. Dans une société profondément raciste, la rédactrice en chef ne laisse rien passer. Ça peut sembler injuste, mais le jeune américain ne laisse pas tomber et gagne peu à peu sa confiance. C’est là que le véritable visage d’Emi Maruyama se révèle. En plus de connaître la charge de travail de tous les journalistes qui travaillent sous ses ordres et leur engagement, elle n’hésite pas à faire des retours très importants sur leur travail. Finalement, elle pousse chacun à aller toujours plus loin et aide Jake à prendre la place qu’il mérite.
Personnellement, je n’ai jamais attendu d’un manager que tout soit acquis ou qu’il passe son temps à me féliciter pour un travail qui aurait pu être meilleur. Il doit être juste et c’est en cela qu’Emi est inspirante. Bien sûr, lorsqu’on évoque ce terme, on attend que la personne qui nous dirige le soit par ce qu’elle incarne ou par sa personnalité, mais pour moi, c’est surtout une question de feedback. On doit pouvoir poser tout le négatif sur la table pour avancer et construire ensemble un avenir meilleur. Et même si on peut avoir de vrais liens affectifs avec son manager, il faut pouvoir mettre les sentiments hors du contexte professionnel. Au bureau, un manager n’est pas un ami. C’est une personne qui t’apprend des choses et te pousse dans tes retranchements.
Le choix d’Aurélie : le malaisant Michael Scott de The Office
Qui voudrait d’un supérieur feignant, à l’ego surdimensionné qui fait régulièrement preuve de mauvaise foi ? Eh bien moi. Enfin uniquement s’il dispose des nombreuses autres qualités de ce grand enfant coincé dans un corps d’adulte qu’est Michael Scott. Dans la série, il est directeur régional de la succursale de l’entreprise Dunder Mifflin, une PME poussiéreuse qui vend du papier. Ancien commercial de haut niveau, il semble avoir été parachuté à un poste de management sans en avoir les compétences. Ses journées parlent d’elles-mêmes, comme décrites dans la série : « Michael passe 80% de son temps à distraire les autres, 19% à procrastiner, et à peine 1% à utiliser son esprit critique. » Un descriptif peu reluisant qui pourrait laisser penser qu’il est tout bonnement idiot, et pourtant il est aussi intelligent, sensible et empathique. Il se pourrait bien qu’il soit le meilleur des managers.
Premièrement, sa priorité est son équipe. Certes, le rapport est déséquilibré pour ne pas dire pathologique (il essaie de se recréer une famille au sein de son entreprise en surinvestissant ses relations). Mais son attitude n’a qu’un seul objectif : être aimé. Dévoué et loyal, il soutient tour à tour chacun de ses salariés, devenant un père de substitution pour l’orpheline Erin, le meilleur ami de l’étrange Dwight et le manager le plus inspirant que Jim, l’étoile montante de la boîte, ait connu. Surtout, il partage ses émotions et ses failles, le rendant profondément humain. Bien sûr, on n’a pas tous besoin de devenir ami avec son manager, mais entretenir une relation de confiance et de complicité avec son N+1 change la carrière… et la vie.
Deuxièmement : il n’est pas porté sur les process et les chiffres et laisse ses équipes bosser en autonomie. Et ça marche ! Les commerciaux carburent et lui, malgré son attitude peu conventionnelle, décrochent les plus gros contrats (parfois à coup de tequila) qui permettent à la boîte de se maintenir à flots. C’est réjouissant de l’observer driver son business en faisant fi des conventions. Un esprit libre, créatif, inspirant, comme on aimerait en croiser davantage au bureau.
Enfin, il est fun. Souvent à ses dépens, n’empêche qu’il se donne un mal fou pour amuser ses pairs. Fantasque, il est un rayon de soleil dans ce décor gris que sont les bureaux de Dunder Mifflin, soit la (seule) raison qui donne envie de venir y travailler. Chaque fête calendaire, - halloween, noël, anniversaire -, devient une grande aventure. Et si un manager n’a pas vocation à nous distraire, sa mission est de renforcer les liens au sein d’une équipe grâce à des moments de cohésion. Là-dessus, déso mais Michaël Scott plie le game avec sa soirée « Des dundees », une remise de prix improbable pour chacun de ses salariés. Parce qu’il est comme ça Michael, il ne laisse personne sur le côté et il semblerait qu’on ait beaucoup à apprendre de cet outsider du management.
Le choix de Manuel : l’anti-modèle Don Draper de Mad Men
On connaît tous Mad Men pour son esthétique calfeutrée mêlant volutes de fumée et élégance d’une agence de publicité dans le New York des années 1960. Côté management, le personnage central Don Draper est un exemple de manager aussi complexe que controversé. Modèle sur des compétences clés dans son domaine, il est un créatif reconnu et respecté, capable de campagnes et slogans à impact qui permettent à son agence de prospérer. Sur le plan humain, il est doué d’un leadership charismatique qui sied naturellement à son interprète Jon Hamm et que viennent renforcer un costume cintré et des cheveux gominés. La classe américaine, impeccable.
Rassurant pour ses équipes, il est aussi capable d’adaptabilité face à des situations évolutives. Un atout décisif pour gérer la crise de l’un de ses principaux clients, un célèbre industriel du tabac, confronté aux révélations publiques des effets néfastes de la cigarette sur la santé. Sans pour autant que cela ne lui pose un problème éthique… Pragmatique, il donne le meilleur pour sa carrière et pour son agence. Mais Don Draper est aussi impitoyable que talentueux. Et s’il reste un modèle d’ascension de carrière pour ses employés, le personnage a sa part sombre qui le rend complexe : alcoolique, autodestructeur, égoïste, il n’est pas non plus un champion de la communication et manipule au besoin ses équipes. Ce qui laisse de grandes failles dans sa gestion humaine et un environnement professionnel instable. Un management paternaliste d’une Amérique business, qui passerait mal à notre époque… De là à le ranger dans la catégorie manager toxique ? C’est plus compliqué que ça…
Le choix de Gabrielle : le déjanté Cori Ellison de The Morning Show
« Chaos is the new cocaïne » : c’est cette phrase prononcée par Cori Ellison qui m’a définitivement séduite pour sa folie (et non pour la référence à la drogue) dans The Morning Show. Dans les deux premières saisons de cette série américaine qui suit toute une équipe de production télé en pleine crise médiatique (#metoo), Cory Ellison a un rôle de directeur des programmes, puis accède dans la dernière saison au poste de CEO. Pour moi, il incarne ce qu’il y a de plus important chez un manager : il est humain, intelligent et complètement dingue.
Personnellement, j’ai un certain attrait pour les personnalités classes, solaires, mais un brin décalées. Au travail, j’ai besoin d’être accompagnée par quelqu’un qui me dit : « Regarde, tout part en vrille, mais j’ai eu une idée GÉ-NI-ALE qui pourrait nous tirer d’affaire. » Je veux des frissons, c’est justement ce qui caractérise Cory Ellison. Le co-animateur de son émission est en train de se faire Cancel sur Twitter ? Pour Cory Ellison, il ne faut pas simplement le remplacer, mais créer « un nouveau mariage entre deux animateurs dont l’Amérique pourra tomber amoureuse ». Il n’a pas peur des imprévus ou de prendre des risques, au contraire, ça le stimule. S’il doit placer en co-animation à l’émission phare de la chaîne une journaliste inconnue au bataillon, mais à l’immense potentiel que seul lui perçoit, il le fera. Il aime déceler les talents et les faire monter au sommet, il aime innover. Jamais frileux, il opte toujours pour les gestes audacieux plutôt que la sécurité, avec une curiosité presque malsaine pour l’inconnu, le chaos, le hasard. Dans le monde inflexible de l’entreprise, je trouve ça très inspirant de voir des personnalités aussi punk.
Cory a aussi une grande prestance. Il a compris qu’un beau discours pouvait convaincre n’importe qui de n’importe quoi. Au lieu de dire explicitement ce qu’il attend de son équipe, le directeur des programmes préfère raconter une histoire. Il choisit toujours une attaque qui va toucher émotionnellement son interlocuteur, ce qui démontre aussi une grande connaissance de ses équipes. Pour convaincre Alex Levy, animatrice star de l’émission de revenir après avoir démissionné, il ne lui dit pas : « Nos chiffres se cassent la figure, reviens. » Non, il lui parle d’un poème qui le touche, d’un vers en particulier : « La renommée n’est pas une plante qui pousse dans une terre stérile. Or, tu n’es pas une terre stérile et tu ne peux pas jeter de la terre féconde, c’est un péché. » Certains appellent ça de la manipulation, mais de mon point de vue, si mon boss peut remettre un peu de romance dans ma vie ennuyeuse et s’écarter du lexique froid et inhumain de l’entreprise, qu’il y aille !
Alors oui, Cory Ellison a évidemment sa part de défaut et le pouvoir finit par lui monter à la tête dans la dernière saison, mais je crois qu’il trouve le juste milieu entre la folie et l’humanité et que la vie sous son management n’aurait rien de banal. Ça me tente.
Le choix de David : l’intrépide Harvey Specter de Suits
On ne va pas se mentir, les managers dans les séries incarnent généralement des stéréotypes et l’avocat Harvey Specter ne fait pas exception. Mais s’il a une réputation de gagnant grâce à ses talents de négociation et de persuasion hors du commun, il est aussi très protecteur envers son équipe. À ce propos, il pousse le curseur très loin. Lorsque ce dernier apprend que son subalterne Mike Ross a menti sur le fait d’avoir été à Harvard et avoir obtenu son diplôme d’avocat, il décide de ne pas le renvoyer. Et pour que ce secret en reste un, il va ériger autour de son protégé un mur de mensonges allant jusqu’à s’assurer qu’absolument personne ne s’approche trop près de la vérité.
Dans la vraie vie, je n’attends pas d’un manager qu’il prenne des risques pour moi, surtout si on peut passer par la case prison par ma faute. En revanche, il faut qu’il puisse déceler en moi et dans mon travail de la valeur. Aussi, il doit pouvoir me protéger de l’extérieur et des échelons hiérarchiques supérieurs. Le manager est un rempart qui doit toujours aller dans mon sens et me faire confiance.
Autre point important : si Harvey Specter appartient à une élite new-yorkaise bien née, il n’a pas peur de se battre pour une personne qui ne fait pas partie du sérail si le travail est bien fait. Par sa confiance et son dévouement envers Mike, il montre que les diplômes ne font pas tout et qu’il est important de pouvoir voir plus loin. Un profil atypique a tout autant à apporter à l’entreprise qu’un autre plus classique.
Articlé édité par Romane Ganneval
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