Entretien d'embauche : comment parler de ses succès en toute humilité ?
11 févr. 2020
4min
Journaliste indépendante.
Dès votre stage de troisième, on a décelé en vous une future pépite. Personne ne tarissait d’éloges sur vos photocopies (jamais une coulée d’encre) et vos cafés (quel nuage de lait parfait !) Aujourd’hui, ce sont vos idées novatrices, votre esprit d’équipe et votre rigueur que l’on salue. Mais alors, comment parler de vos qualités et réussites professionnelles sans passer pour un prétentieux ? Dans cet exercice difficile qu’est l’entretien d’embauche, évoquer ses succès tout en restant modeste relève d’un véritable exercice d’équilibriste. Quelques conseils pour gérer au mieux ce détail qui a, hélas, toute son importance.
Racontez aussi les échecs
Chaque projet et chaque réussite s’accompagne de difficultés, voire d’échecs. Les évoquer montre votre capacité à vous challenger - si vous ne faites pas d’erreurs, c’est peut-être que le défi n’était pas assez ambitieux - et à prendre du recul sur votre propre travail. Surtout, c’est une vraie preuve de maturité et d’humilité. Pour les recruteurs, les candidats authentiques et prêts à montrer leur vulnérabilité seront potentiellement plus à l’écoute des conseils qui leur permettront de s’intégrer à la culture d’entreprise et de s’améliorer.
Parlez des autres
La première impression est capitale lors d’un entretien, d’autant que le recruteur peut rapidement se faire une idée de votre capacité à travailler en équipe lorsque vous évoquez vos expériences passées. Pour éviter d’avoir l’air présomptueux dans les discussions, il est fondamental d’amener d’autres protagonistes dans son histoire professionnelle. Par exemple, en mentionnant « les conseils habiles de votre boss qui vous ont aidé à développer vos capacités managériales » ou encore « le talent de négociation de votre collègue commercial, qui vous a permis de développer votre capacité de persuasion. » Vous montrerez une certaine empathie sans paraître totalement « autocentré ».
Du concret et des chiffres !
Les chiffres pour les recruteurs, c’est comme les frites pour les Tuches, c’est sacré. Un « projet exceptionnel » et une « croissance jamais vue », c’est bien, mais cela reste très subjectif, en plus d’être imprécis. Si les résultats sont aussi exceptionnels que vous le prétendez, le recruteur s’en rendra compte lui-même. À défaut, n’hésitez pas à l’aider à trouver une échelle de mesure : « La mise en place de cette nouvelle stratégie a permis de faire baisser le nombre de retours produits de 15% à 9%. À titre de comparaison, la moyenne du secteur est d’environ 13% ces 5 dernières années. » Restez factuel.
Pas de fausse modestie
« J’ai évidemment connu des moments difficiles. J’ai été teeeellement sollicité suite au succès de mon dernier projet que je ne parvenais plus à répondre à toutes les demandes de conseils de mes collègues. » Cette pratique qui consiste à se vanter sous forme de fausse plainte ou d’auto-dénigrement, appelée le “humblebrag” en anglais, a tendance à se retourner contre le candidat. Selon de récentes études de l’Université d’Harvard, elle fait passer son auteur pour une personne exécrable, mais surtout artificielle. La fausse modestie serait même moins appréciée qu’une franche fanfaronnade.
Ne vous comparez pas
Pour mettre en avant leurs propres réalisations il arrive que des candidats choisissent de les comparer à celles des autres. Le risque ? Laisser une mauvaise impression. Concrètement, cela suppose de rabaisser, plus ou moins volontairement, vos anciens collègues. Ce n’est sûrement pas votre intention, mais c’est comme ça que cela sera interprété. Dans une série d’expériences réalisées en 2012, des psychologues ont montré que des affirmations “de supériorité” (de type, « je suis le meilleur commercial de mon entreprise ») laissaient des impressions très négatives tandis que les affirmations “d’amélioration” (« je suis bien meilleur que je l’étais il y a seulement 1 an ») sont perçues de manière bien plus positive. À retenir : évitez à tout prix de vous comparer, et formulez vos réussites en mettant en avant votre progression personnelle.
Choisissez le bon moment
Chaque culture met plus ou moins l’accent sur l’humilité et la modestie. Si les Etats-Unis adhèrent largement à l’auto-promotion, les pays asiatiques en sont beaucoup moins friands. En France, les recruteurs préfèrent généralement la modestie. Ne faites pas votre auto-promotion spontanément, attendez que votre interlocuteur vous invite à parler de vos précédentes missions et des projets dont vous êtes fiers. A priori, c’est son job de vous poser la question, alors il y viendra tout naturellement. Vous pouvez malgré tout tendre quelques perches sur votre CV, votre profil LinkedIn ou votre lettre de motivation - qui ne sont finalement que des teasings pour un futur entretien - afin de guider les questions du recruteur sur des sujets qui vous mettent en valeur.
… Le tout, avec les yeux qui brillent
Dans un entretien d’embauche, les recruteurs aiment l’authenticité. Alors plutôt que de parler de vos innombrables qualités professionnelles, adoptez une posture enthousiaste. Expliquez pourquoi telle initiative ou tel projet professionnel ou personnel vous transporte ! Vos réalisations arriveront naturellement au premier plan sans que vous donniez le sentiment de vous vendre ou pire encore… de vous vanter. Évitez d’annoncer que vous êtes capitaine de l’équipe de France de curling amateur à vos heures perdues, racontez plutôt votre dernier match et le sentiment de cohésion et de joie que vous avez ressenti avec votre équipe. Il y a de grandes chances que votre interlocuteur finisse par vous demander depuis combien de temps vous jouez : alors, un « Je joue depuis une dizaine d’années, et je suis capitaine de l’équipe depuis 2 ans » sera d’autant plus apprécié et sonnera bien plus naturel.
S’il est délicat de parler de ses réussites sans en faire trop, l’exercice est loin d’être impossible. La clé se trouve dans votre capacité à adopter une posture authentique et en même temps à prendre du recul sur les éléments et/ou événements qui ont contribué à votre succès. Et si malgré tout vous dérapez, pas de panique. Pris en flagrant délit de vantardise ? Pour vous en sortir, tentez l’auto-dérision ! « Oups, je vais finir par vous assommer avec ma grosse tête ! Pardonnez-moi, je suis si fier de ce projet que je ne sais pas toujours quand m’arrêter. » C’est parfois le meilleur moyen de désamorcer la charge négative que génère votre sursaut d’ego.
Photo by WTTJ
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