10 formules passives-agressives entendues au boulot (et leur version douce)
12 oct. 2021
6min
Journaliste - Welcome to the Jungle
Cela fait six mois que vous bossez avec un client difficile sur un projet. Il était censé vous envoyer un document depuis quelques jours mais vous n’avez toujours rien reçu de sa part… La rage monte, monte, monte et vous finissez par faire partir un petit mail, poli mais bien salé : « Sauf erreur de ma part, je n’ai toujours pas reçu le document que vous deviez m’envoyer. Merci de faire le nécessaire. » Et toc.
Le problème, c’est que ces petites expressions passives-agressives peuvent avoir un impact très négatif sur notre interlocuteur, voire favoriser les conflits ou une ambiance de travail anxiogène. D’ailleurs, lorsque vous-même en recevez, vos poils se hérissent. Alors, quelles sont les formules qui peuvent agacer nos collègues, notre boss ou encore nos clients ? Et quelles sont les alternatives pour les remplacer ?
Tout le monde est passif-agressif !
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est bon de rappeler que nous utilisons tous ces formules “passives-agressives”, sans forcément avoir l’intention de blesser. Parfois, nous cherchons simplement à prendre des pincettes, à ne pas confronter la personne directement et nous pensons bien faire… D’après Norine Lorelli Rinckenberger, experte en communication non-violente, « le contexte joue pour beaucoup ! Une même phrase ne sera pas reçue de la même façon en fonction de la relation que nous avons avec la personne en face, de sa sensibilité, mais aussi de l’ensemble de la discussion qui a précédé ! Au fond, chacun est également responsable de la manière dont il interprète les choses. » Une même phrase adressée à un collègue avec lequel nous nous entendons très bien et à un prestataire que nous n’avons jamais rencontré en vrai n’aura pas le même impact.
Les expressions que nous allons vous présenter sont des exemples courants de formules passives-agressives, mais les utiliser ne fait pas de vous un être sans-cœur !
10 formules passives-agressives et comment les remplacer ?
Pour rendre votre communication plus agréable au quotidien, nous avons aussi réuni quelques alternatives aux phrases les plus agaçantes avec l’aide de Norine Lorelli Rinckenberger. Bien sûr, gardez en tête qu’il ne s’agit pas de voir le mal partout, et que certaines phrases ne vexeront personne et qu’on peut toujours les manier… avec précautions !
« Sauf erreur de ma part… »
Le message qu’on envoie : « Je sais déjà que tu t’es planté mais j’adore te le rappeler ! Surtout quand ton boss est en copie ! »
Pourquoi ça dérange ? Cette expression, grande classique des mails, peut paraître très procédurière et hypocrite. Le plus énervant pour la personne en face, c’est qu’elle se doute très bien que nous avons déjà vérifié et que l’erreur vient bel et bien d’elle. Si toutefois vous souhaitez l’utiliser car vous avez un réel doute et voulez simplement montrer que vous êtes capable de vous remettre en question, assurez-vous que la personne en face la prend comme une vraie capacité d’erreur (par exemple, si certains éléments manquent pour retracer l’origine de l’erreur…). Mais dans le doute, mieux vaut se tourner vers une formulation plus… soft !
Comment la remplacer ? Opter pour un peu moins de formalité peut être bénéfique : « Je me trompe peut-être mais… », « Je crois que tu as oublié de m’envoyer tel document », « Il y a peut-être eu un petit couac car… » N’oubliez pas qu’un smiley - si vous pouvez vous le permettre avec cet interlocuteur - peut également changer le sens de votre message.
« Je pense que tu peux faire encore mieux ! », « Je suis sûr·e que tu peux mieux faire »
Le message qu’on envoie : « Ce que tu as fait est totalement nul, mais je vais te faire croire que je veux juste te challenger pour que tu t’améliores ! »
Pourquoi ça dérange ? Il peut être intéressant d’inciter quelqu’un à se dépasser, mais au bout d’un certain temps, cette réflexion peut lui mettre beaucoup de pression, voire l’épuiser si on ne l’épaule pas dans cette tâche.
Comment la remplacer ? Vous pouvez par exemple ajouter des précisions sur ce que vous attendez : « Je pense que tu peux aller encore plus loin sur telle partie qui mériterait d’être développée ». Ou bien manifester votre disponibilité pour aider : « Comment puis-je t’aider pour perfectionner telle partie ? »
« Ça va le faire, comme d’hab’ ! »
Le message qu’on envoie : « TU vas te débrouiller pour le faire. De toute façon, tu n’as pas le choix ! »
Pourquoi ça dérange ? Quelqu’un se confie sur ses doutes à pouvoir rendre un travail à temps et vous tentez de le/la soutenir : « Ça va le faire, t’inquiète ! » Même si cette phrase se veut rassurante, elle n’aide en rien votre interlocuteur et peut même nier les difficultés qu’il pourrait rencontrer puisque vous ne lui donnez pas l’opportunité de vous expliquer ce qui le bloque.
Comment la remplacer ? Montrez-vous plus à l’écoute en posant des questions : « Quels sont les autres sujets sur lesquels tu travailles en ce moment ? », « Est-ce que tu as besoin d’aide pour prioriser ? », « Pourquoi crains-tu de ne pas réussir ? Manque d’effectif, de moyens, de temps ? »
« Je crois qu’on ne s’est pas compris… »
Le message qu’on envoie : « Tu ne comprends rien en fait… »
Pourquoi ça dérange ? Déjà, c’est un truc que nos parents auraient pu nous dire. Mais outre ce ton un brin paternaliste, cela ne sous-entend aucune remise en question de notre part. L’erreur vient forcément de l‘autre.
Comment la remplacer ? Évidemment, le “on” est à bannir (tout comme dans des expressions du type « On est d’accord que… » !) Préférez plutôt : « Mince, je me suis peut-être mal exprimé·e ! », « Si je me suis mal exprimé·e, j’en suis désolé·e ! »
« Pour mémoire », « Est-il nécessaire de rappeler que… », « Pour rappel »
Le message qu’on envoie : « Je vais te la rafraîchir la mémoire, moi ! »
Pourquoi ça dérange ? Encore une fois, l’expression peut donner l’impression de jouer au maître d’école : « Je te l’ai déjà dit 2 fois, à la troisième, puni ! » Attention, ici, il y a une subtilité, si vous répétez les choses en boucle et que personne ne vous écoute, il faut parfois franchir le pas et se montrer plus ferme.
Comment la remplacer ? Avant d’en arriver là, mieux vaut vérifier que tout est clair pour les personnes auxquelles vous vous adressez : « On a déjà abordé ce sujet à telle réunion », « Comme je vous le disais à telle réunion », « Je vois qu’il y a des manquements depuis quelques temps, n’hésitez pas à me dire si certaines choses ne sont pas claires pour vous… »
« Je te/vous remercie d’avance… » « Merci de… »
Le message qu’on envoie : « Grouille-toi de faire le nécessaire, sinon je vais péter un câble ! »
Pourquoi ça dérange ? Cet ordre indirect peut mettre un peu trop de pression à la personne qui reçoit le message. Encore une fois, même si l’intention est bienveillante, veillez à affirmer pourquoi ce que vous attendez de l’autre est important à vos yeux.
Comment la remplacer ? Un « Merci par avance pour votre contribution » ou un simple « Je vous remercie. », devrait faire l’affaire !
« Bravo à toi ! Ça n’a pas été facile… »
Le message qu’on envoie : « Bah dis-donc, on a fini par y arriver même si tu viens de très loin tant tu es crétin·nne ! »
Pourquoi ça dérange ? Si cette phrase peut, à l’origine, sortir comme un compliment, attention à la formulation maladroite qui peut donner l’impression à votre interlocuteur qu’avec son potentiel… ce n’était pas gagné !
Comment la remplacer ? Mettez du contexte ! « Bravo car le cadre dans lequel tu as agi était vraiment contraignant ! », « Tu peux être fier·ère de ta progression sur cette mission pas évidente ! »
« Ok, c’est pas grave… », « Ok, tant pis… »
Le message qu’on envoie : « Je n’ai juste plus aucune estime pour toi mais je te pardonne ! »
Pourquoi ça dérange ? Ici, vous donnez l’impression de cacher vos réels sentiments et de faire mariner la personne. Vous lui en voulez peut-être, mais elle ne sait pas pourquoi et cela ne lui donne pas non plus l’opportunité d’éclaircir les choses.
Comment la remplacer ? Soyez tout simplement plus sincère et plus transparent. Si vous animez une réunion à laquelle une personne clé ne peut pas participer, vous pouvez lui dire : « C’est dommage car ta participation était précieuse, mais je te transmettrai les informations. » Si quelqu’un n’a pas pu exécuter une tâche importante : « C’est dommage car nous avions vraiment besoin de faire cela pour pouvoir boucler ce dossier. Peux-tu m’en dire plus sur ce qui t’a retardé pour que nous puissions nous organiser au mieux une prochaine fois ? » Et puis ôtez ces points de suspension qu’on ne saurait voir !
« Quand tu auras deux minutes… »
Le message qu’on envoie : « On pourra se parler quand tu auras deux minutes dans ton agenda de ministre ? En fait je m’en fiche, je vais quand même t’interrompre. »
Pourquoi ça dérange ? Déjà, on sait tous que ça prendra plus de deux minutes. En plus, c’est stressant car on ne sait pas de quel sujet on va parler. Enfin, c’est un peu manipulateur car on sait que tout le monde peut prendre deux minutes chrono pour discuter.
Comment la remplacer ? Encore une fois, la solution est de donner plus d’informations : « Est-ce que tu pourras me consacrer un moment aujourd’hui pour qu’on discute de tel sujet ? »
« OK. »
Le message qu’on envoie : « Va brûler en enfer. »
Pourquoi ça dérange ? Que ce soit avec votre moitié ou avec vos collègues, mieux vaut éviter le “OK.” à l’écrit. C’est glaçant et ça donne l’impression qu’on cache nos réels sentiments.
Comment la remplacer ? Si vous n’êtes pas énervé : « Pas de souci ! », ou « OK ! », avec éventuellement un petit smiley en prime. Et si vous êtes réellement sur les nerfs, alors soulagez votre conscience et exprimez-vous !
Finalement, quelques tips suffisent pour sortir du passif-agressif : préférez toujours poser des questions, ajouter des smileys, donnez des informations pour montrer votre sincérité, ne lésinez pas sur les interjections (“mince”, “euh”, “ah!”, etc.) Mais rappelez-vous qu’en communication, l’effort de flexibilité est à faire des deux côtés. Vous pourrez mettre toutes les formes du monde, face à certaines personnes, cela ne sera jamais suffisant. Sauf erreur de notre part, cela ne fait pas de vous quelqu’un de mauvais pour autant !
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Article édité par Elea Foucher-Créteau ; Photos Thomas Decamps pour WTTJ
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