Test de langue "surprise" : comment le réussir en process de recrutement ?
09 nov. 2020
6min
Rédacteur & Photographe
« Hablas español ? Pues contame algo en español… » Silence. Vous voilà coincé. Mais qu’est-ce qui vous a pris de mentionner « espagnol niveau courant » sur votre CV, alors que vous ne l’avez pas pratiqué depuis votre LV3 au lycée ? Et pourquoi vous interroger sur cette langue pour un poste qui n’en a pas l’usage ?
C’est le fameux ‘’crash test’’ de langue étrangère que pratiquent souvent les recruteurs à l’international. De prime abord, cela peut sembler vicieux d’interroger le candidat sur une langue dont le poste n’en prévoit pas explicitement l’usage. On peut le voir comme un test imaginé pour vous piéger. Mais derrière cette apparence trompeuse, se cache généralement une explication rationnelle. Alors, comment réagir dans cette situation et s’en sortir dignement ? Explications et conseils avec Marie-Agnès Deharveng, Talent Manager chez Early Metrics.
Crash test de langue : pourquoi une telle pratique ?
À première vue, l’intérêt de cette langue ne vous paraît pas flagrant. Mais il en existe sans doute un pour le recruteur. « Il y a toujours un contexte qui justifie cette question, explique Marie-Agnès Deharveng, cela peut être un client important qui parle la langue couramment, ou la volonté de développer l’entreprise dans un nouveau secteur géographique. Ce test n’est pas fait au hasard ». Oubliez donc la théorie du complot, le job que vous visez peut en avoir tôt ou tard l’utilité.
Et puis, il y a aussi des candidats qui tendent une perche au recruteur. « Lorsque je vois la mention « espagnol courant » sur un CV, continue la DRH, étant donné que j’aime le parler, je vais naturellement surprendre la personne en l’interrogeant dans cette langue pour voir comment elle réagit. » Marie-Agnès observe globalement 3 types de réactions : celui qui répond de manière fluide, celui qui baragouine, et celui qui répond en français. « C’est un bon moyen de s’assurer de l’honnêteté d’un candidat, poursuit-elle. Mais surtout, dites-vous bien qu’au-delà de la véracité du CV, il y a souvent un enjeu au sein de l’entreprise. » Voici 5 conseils pour ne pas vous retrouver totalement désarmé face à un “crash test” de langue.
1. Surtout ne pas mentir
Marie-Agnès est catégorique, « mentir sur son CV est rédhibitoire. » C’est contre-productif. « Je me souviens d’un recrutement à l’international dans le biomédical avec un training obligatoire aux US, illustre-t-elle, un candidat avait écrit « bilingue en anglais » sur son CV. Mais, à peine l’avais-je interrogé en anglais, je me suis aperçue qu’il n’avait pas du tout le niveau. C’était catastrophique. Être en couple avec un Anglais, avoir suivi des cours d’école de commerce en anglais, ou avoir séjourné en Australie, ne fait pas de vous quelqu’un de bilingue. Seuls les natifs ou ceux dont les parents sont anglais peuvent prétendre à ce titre !
Pour résumer, « ce que tu mets sur ton CV doit refléter ce que tu fais ou sais faire », martèle Marie-Agnès. Car en réalité, si on vous interroge sur cette langue, c’est que l’entreprise recherche une véritable compétence. « Le risque de mentir sur son CV ou de se survaloriser dans une langue, c’est que vous créez un décalage entre votre CV et la réalité, continue-t-elle. Et un tel décalage va surprendre le recruteur et le décevoir. Montrez-vous donc le plus honnête possible, ainsi seulement il n’y aura pas de surprises des deux côtés. »
2. Bien évaluer son niveau
« On voit souvent cinq lignes de langues sur un CV, raconte Marie-Agnès, comme si tout le monde était polyglotte. Alors qu’en fait, ce type de profil ne court pas les rues. Oubliez donc les langues que vous ne parlez plus, elles ne seront pas utiles sur votre CV. » La DRH recommande de ne pas tenter le diable en mentionnant des langues que vous ne maîtrisez pas. Vous éviterez ainsi cet interrogatoire en allemand auquel vous ne savez pas répondre. N’indiquez que les langues que vous parlez véritablement.
« Quant aux niveaux de langues, ne vous survalorisez pas … mais ne vous dévalorisez pas, suggère-t-elle. C’est frappant comme l’évaluation d’un niveau de langue par un candidat n’est jamais exacte ! », s’étonne la DRH. Pour juger avec précision de votre niveau, interrogez un natif de la langue, ou même votre ancien professeur. « Il n’y a rien de plus agaçant que de voir écrit « fluent » quand le niveau du candidat est en fait intermédiaire, assure-t-elle. Il faut correctement s’évaluer pour mettre le recruteur dans de bonnes conditions. »
3. Derrière la langue : comprendre la culture
Une expérience à l’étranger ne fait pas de vous un natif de ce pays. Si vous avez vécu en Chine pendant 2 ans, vous n’êtes probablement pas bilingue. En revanche, vous présentez un intérêt véritable pour les recruteurs. « Parfois, le niveau de langue n’est pas parfait, explique Marie-Agnès, mais ce qui est intéressant c’est que le candidat a pu observer et s’adapter aux mœurs et coutumes d’un pays. Il en connaît les codes. Dans certaines situations, cette intelligence émotionnelle, plus que le niveau de langue lui-même, doit être mis en valeur. Et c’est aussi au recruteur de faire preuve de souplesse. »
« J’ai passé moi-même un entretien dans lequel on m’a demandé d’appeler un membre de leur équipe qui était allemand d’origine, se souvient-elle. L’allemand avait été ma LV1, mais je ne l’avais pas franchement pratiquée ces derniers temps. J’ai baragouiné quelques mots, mais j’ai surtout insisté sur le fait que je connaissais bien la culture allemande. Arriver à l’heure à un rendez-vous, tenir un discours carré et faire preuve de rigueur le démontrait. »
4. Essayer de lâcher prise
Raphaël était en échange en Espagne lorsque la DRH d’un grand groupe l’a appelé en réponse à sa candidature de stage. Un stage en France, avec une équipe française, a priori pas de quoi s’inquiéter de son niveau d’espagnol… Mais c’était sans compter les projets à l’international de l’entreprise. « Rapidement, le recruteur a relevé ma présence à San Sebastian, se rappelle Raphaël, et il m’a demandé de raconter en espagnol ma vie sur place. Sur le moment, j’étais un peu surpris et pas très à l’aise. Mais j’ai vite compris que le vocabulaire que je pouvais employer était simplissime. J’ai évoqué les tapas, le surf, bref mon quotidien, avec mes mots. Et je suis passé entre les gouttes ! »
Pour Camille, avocate, la langue testée était plus originale. Au cours de ses études, elle a fait un stage au Cambodge dans une juridiction internationale. Une étape qu’elle mentionne sur son CV lorsqu’elle postule à un grand cabinet franco-français. « Le jour de l’entretien, l’associée du cabinet a relu mon CV sous mes yeux, raconte-t-elle. Et je l’ai vue s’enthousiasmer sur cette ligne en particulier. » Alors que le job proposé est en français, le recruteur lui demande si elle parle khmer. « Je lui ai répondu que j’avais quelques notions parce que j’avais pris des cours avec mon voisin de 12 ans, poursuit-elle. Elle s’en est amusée et j’ai dû m’exécuter. J’ai baragouiné deux, trois phrases en y mettant volontairement l’accent et elle a rigolé. L’entretien s’est terminé sur ce test. Et j’ai été embauchée ! Aussi étonnant que cela puisse paraître, je crois que ce moment de l’entretien a joué ! J’ai eu l’impression qu’elle testait ma capacité à lâcher prise et ma curiosité… »
Si vous n’avez pas indiqué être bilingue sur votre CV, le recruteur ne s’attendra pas à ce que vous le soyez. Pas de panique, restez détendu et assumez votre niveau de langue. Après tout, si l’employeur vous a contacté pour cet entretien, c’est sûrement que votre profil convient pour le poste.
5. Se faire confiance et sortir de sa zone de confort
Pour Pauline, le challenge, ce n’était pas tant la langue en elle-même, que de produire un travail de qualité dans une langue étrangère. Fluent en anglais, elle a postulé sans complexe au poste de rédacteur en chef France d’un grand magazine américain. Stratégie de rédaction, écriture, tout était en français dans un cadre anglophone. Easy peasy. Seulement voilà, lors du dernier entretien, on lui a demandé de rédiger un rapport de recommandations stratégiques ainsi qu’un article pour une rédaction éditoriale et tout ça dans la langue de Shakespeare ! Rien que ça ! « J’avais 21 ans à l’époque et, même si j’avais un bon niveau d’anglais, j’ai eu un pic de stress, raconte-t-elle. Les entretiens en anglais avec les boss étaient déjà stressants, mais rédiger un contenu si technique, avec un véritable enjeu de carrière, c’était autre chose. J’allais être évaluée sur tous les fronts. D’abord sur le fond, avec ce rapport de recommandations stratégiques en anglais, puis sur la forme avec la rédaction d’un article qui allait évaluer mon outil de travail le plus précieux : “ma plume”. » Pour autant, Pauline ne s’est pas laissée pas démonter. Elle a tout plaqué pour ce dossier. « J’ai répondu ‘’Great, ok’’ et j’ai bien précisé que l’anglais n’était pas ma langue natale, se souvient-elle. J’ai pris ça comme un challenge. Ensuite, j’ai identifié les mots clés qui traduisent au mieux ma vision. » Résultat ? Elle est embauchée ! « Avec le recul, je me dis que ce test était une bonne intro aux quatre années passées avec eux, conclut-elle. C’était challengeant, mais hyper positif de sortir de sa zone de confort… »
Sortir de votre zone de confort vous pousse à montrer tout votre potentiel dans la langue testée. Attention cependant, lorsque vous indiquez votre niveau de langue sur votre CV, prenez aussi en compte votre niveau en expression écrite. Car si, comme pour Pauline, on décide de tester vos capacités rédactionnelles et que vous n’avez pas le niveau attendu, vous risquez d’être pénalisé.
Si on récapitule les conseils de Marie-Agnès, la prudence doit vous conduire à ne pas mentionner une langue que vous ne parlez pas. Et, si spontanément en entretien on vous challenge sur une langue étrangère que vous n’aviez pas anticipée, ne mâchez pas vos mots. Si le niveau ne suit pas, donnez votre langue au chat ! Le tout est de ne pas rester bouche-bée… et donc ne pas mentir sur son niveau de langue !
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Photo d’illustration by WTTJ
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