Tony Lo, entrepreneur à 21 ans : « Au début, on ne se sent pas légitime »

16 mai 2024

4min

Tony Lo, entrepreneur à 21 ans : « Au début, on ne se sent pas légitime »
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Margot Baldassi

Rédactrice | Directrice de création et chargée d’études prospectives chez pop-up urbain

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Autoformé sur YouTube et sur le terrain, Tony Lo est le créateur de l’agence de marketing digital Esekai. À 23 ans, il nous raconte comment faire sa place rapidement dans un marché saturé.

Propulsé très jeune dans le grand bain de l’entrepreneuriat, Tony Lo a fondé l’agence de communication Esekai en 2021. Sa précocité ne l’empêche pas pour autant de garder la tête sur les épaules. « On m’a beaucoup aidé. Ce serait mentir de dire que je suis arrivé là tout seul. » À 23 ans, il dirige une agence dynamique qui compte près de 250 clients, une filiale à Lyon et une trentaine de collaboratrices et collaborateurs. Leur spécialité : la stratégie digitale, le branding et l’animation des réseaux sociaux pour des commerces de bouche asiatiques. La majorité des employés de l’entreprise parlent plusieurs langues – parmi lesquelles le chinois ou le japonais – a entre 20 et 27 ans.

Formation : fac de commerce, pizzeria et vidéos YouTube

« Mes études ne m’ont pas spécialement aidé dans la création de mon business. Ce qui m’a poussé à me lancer dans l’entrepreneuriat, c’est surtout l’envie de rassurer ma famille. » Né en France de parents Chinois, Tony rêvait de partir étudier à Londres après avoir obtenu son Bac dans un lycée de Cergy-Pontoise. Il reste 5 ans dans la capitale anglaise à étudier le commerce à l’université, aidé financièrement par sa famille. Après les cours, il travaille jusque tard dans une pizzeria. Mais au lieu de sortir et se faire plaisir avec cet argent de poche, il décide de « tout investir dans son business ». À côté de ses études, il s’offre des formations sur YouTube délivrées par des entrepreneurs à succès et fait ses armes dans le e-commerce.

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« Je n’ai pas sciemment choisi le marketing. Ça s’est fait comme ça car je cherchais une voie simple et tendance. » Mais en rentrant quelques mois en France pendant la pandémie de Covid-19, des nouvelles opportunités – notamment en communication digitale – lui sont offertes par des connaissances. Un ami lui demande de l’aide dans le développement de sa marque de bijoux haut de gamme. Les résultats sont tangibles et d’autres viennent faire appel à son œil neuf et ses talents en marketing et stratégie social media. « J’étais plus dans une optique d’apprentissage que de gain. J’ai eu la chance d’être bien entouré. On m’a fait confiance alors que j’étais hyper jeune. » De fil en aiguille, il gagne en compétences et élargit son réseau. Après une période de conseil à titre gracieux auprès de diverses marques et commerces, il décide de créer Esekai Agency. « Au début, on ne se sent pas légitime. Mais puisque les nouveaux clients parlaient de mes prestations autour d’eux, paraissaient satisfaits et revenaient… Ça m’a donné confiance. »

Après les confinements, la revanche des restaurants

La grande majorité (90 %) des clients d’Esekai sont des restaurants, salons de thé et autres pâtisseries aux codes esthétiques renouvelés. Les 10 % restants sont des start-ups, des lieux de coworking ou des marques de secteurs variables. Esekai produit ainsi les contenus des réseaux sociaux de centaines d’enseignes à Paris et en région.

« L’élément déclencheur a été le Covid. La pause imposée par les confinements a permis à certains restaurateurs de se réinventer, et à d’autres de se lancer. On a aussi vu les influenceurs food exploser à partir de 2021. » La pandémie a été une période charnière pour le milieu de la restauration. Les codes marketing se sont affirmés, des nouveaux visages d’entrepreneurs ont émergé, et la clientèle est devenue plus engagée. Comme si les restaus nous avaient manqués au point de devenir (encore plus) centraux dans nos modes de vie, une fois les restrictions gouvernementales levées. Tony Lo a saisi cette opportunité.

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En peu de temps, les « reels » (sur Instagram), vidéos TikTok ou shorts (sur YouTube) sont devenus les supports de communications privilégiés par les commerces de food souhaitant attirer du monde et créer de l’engagement en ligne. « Aujourd’hui, un restaurant ne peut pas fonctionner sans ces vidéos courtes. » Elles sont réalisées pour donner envie de venir sur place. Tony Lo fait partie des communicants nouvelle génération qui ont su tirer parti de leurs propres usages numériques pour toucher une cible jeune.

Esekai, une agence de com’ pas comme les autres

À Paris, les agences de marketing sont nombreuses, elles se comptent au moins par centaines. « Quand je me suis intéressé au secteur, j’aurais pu baisser les bras en me disant que la concurrence était trop rude. Sauf que j’ai réalisé qu’il n’existait aucune agence spécialisée pour accompagner les entreprises tenues par des Asiatiques. » C’est grâce à un bagage culturel fort et sa maîtrise du chinois et du japonais que Tony s’est démarqué du reste des agences de communication. « Le nombre de clients a rapidement explosé parce que dans les communautés asiatiques, la publicité n’existe pas. En revanche, le bouche-à-oreille fonctionne et se montre très efficace. » Un positionnement commercial « de niche » qui n’aura donc pas empêché la jeune agence de se développer rapidement.

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Derrière le bouche-à-oreille, se cache un autre atout non négligeable dans le fonctionnement d’Esekai : la relation de confiance que Tony a tissée avec ses clients. Il nous raconte : « La génération de restaurateurs qui a l’âge de mes parents ou de mes grands-parents est complètement perdue d’un point de vue marketing et communication digitale. Chez Esekai, on parle presque tous chinois, même les plus jeunes. Si on ne connaissait que le français, les échanges seraient superficiels. » C’est cette relation privilégiée et ce sentiment de répondre à un besoin spécifique qui nourrissent Tony. Sa philosophie : accompagner ses clients, leur donner des clés pour s’adapter au marché actuel et surtout, prendre le temps.

Prendre et donner le meilleur

Tony sait également bien choisir ses clients : « On cherche une clientèle qui a au minimum une vision. Si tous les traiteurs chinois ou restaurants de sushis venaient nous voir, on ne saurait pas quoi faire avec eux. On essaye d’être sélectifs car, quelque part, ils reflètent notre image de marque. Et on tient à garder l’aspect qualitatif de notre accompagnement ». Le lien de confiance qu’il a noué avec chacun est primordial à ses yeux, et s’alimente avec de l’écoute et un conseil premium, déroulés sur un temps long. « Certains veulent grossir trop vite, mais nous on veut faire les choses bien, petit à petit. C’est un peu notre mantra. »

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D’ailleurs, pour l’avenir de son entreprise, Tony est ambitieux et prêt à saisir les opportunités à venir. S’il souhaite recruter et envisage de s’installer dans d’autres villes de France, voire à l’étranger, il cherche avant tout à stabiliser ce qu’il a construit avec son équipe. Il est néanmoins conscient du travail et du challenge que ses clients actuels apportent à l’agence et ira à son rythme. « Je n’ai pas de syndrome de l’imposteur, mais je ne prétends pas pouvoir tout faire et j’ai encore beaucoup de choses à apprendre. »


Article écrit par Margot Baldassi, édité par Ariane Picoche, photos : Thomas Decamps pour WTTJ

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