Les biais mnésiques : ne vous fiez pas à votre mémoire !
25 févr. 2020
2min
Autrice, consultante et conférencière sur le futur du travail, spécialiste de la productivité, de l’âge et du travail des femmes
NOUS SOMMES TOUS BIAISES - C'est un fait : nous sommes tous victimes des biais cognitifs. Vous savez ces raccourcis de pensée de notre cerveau, faussement logiques, qui nous induisent en erreur dans nos décisions quotidiennes, et notamment au travail. Dans cette série, notre experte du Lab Laetitia Vitaud identifie les biais à l'œuvre afin de mieux comprendre comment ils affectent votre manière de travailler, recruter, manager... et vous livre ses précieux conseils pour y remédier.
Explication
On connaît tous l’expression « ma mémoire me joue des tours ». Les biais mnésiques se réfèrent aux « tours » que nous joue notre mémoire. La mémoire est liée à la perception (elle-même biaisée) car on se souvient consciemment de ce qu’on a bien perçu. Elle ajoute des distorsions supplémentaires car quand on accède au souvenir, on le modifie. Les émotions que l’on éprouve au moment de se souvenir de quelque chose peuvent transformer le souvenir de cette chose. Les biais mnésiques sont donc multiples. Les souvenirs sont altérés par la manière dont on traite l’information et les émotions.
L’effet de récence désigne le fait qu’on se souvient mieux du dernier élément d’une liste de stimuli que l’on doit mémoriser. Dans les années 1960, plusieurs chercheurs ont fait des expériences en demandant à des individus de se rappeler des listes de mots. Ils ont conclu qu’il existait une mémoire de court-terme et une mémoire de long terme. L’effet de récence est le biais de court terme, mais il existe un biais de long terme : l’effet de primauté rend plus vivace le souvenir des premières impressions.
Également mis en lumière dans les années 1960, l’effet de simple exposition est bien connu des publicitaires. Plus on est exposé à un stimulus, plus il est probable qu’on se mette à l’aimer. On a plus de chance d’avoir un sentiment positif à l’égard de quelqu’un qu’on a déjà croisé une fois. Enfin, le biais rétrospectif est une erreur du jugement cognitif qui se produit parce qu’on a tendance à penser rétrospectivement qu’on aurait pu anticiper un événement avec plus de prévoyance. C’est un mécanisme de déni du hasard.
Conséquences pour les ressources humaines
Les biais mnésiques sont les ennemis des recruteurs / recruteuses, notamment quand le recrutement est étalé dans le temps et / ou quand ils / elles voient de nombreux candidat.e.s au cours d’une même journée. Ils / elles laissent trop souvent leur mémoire leur jouer des tours dans la sélection qu’ils / elles font des candidat.e.s.
On se souvient plus ou moins d’une personne selon qu’elle a été la première, la quatrième ou la dernière d’une longue liste de personnes interviewées. Par exemple, on préfère le / la dernier.e bon.ne candidat.e rencontré.e pour la seule raison que le dernier entretien est plus « frais » à l’esprit. Ou bien on accueille avec plus de bienveillance un.e candidat.e préalablement rencontré.e à un salon ou une conférence. Ou encore on laisse les premières impressions que l’on a d’un.e candidat.e prendre trop d’importance : si le / la candidat.e est en retard, forcément il / elle n’est pas sérieux / sérieuse.
Comment y remédier ?
Quand on connaît l’influence des biais mnésiques, on peut concevoir un processus de recrutement qui intègre certaines précautions. Quand on voit plusieurs candidat.e.s au cours de la journée, il est important de se reposer sur des entretiens structurés lors desquels les mêmes questions sont posées à tous / toutes les candidat.e.s.
Il est essentiel d’enregistrer toutes les informations pertinentes de manière systématique pendant et après chaque entretien. Surtout, n’attendez pas la fin pour vous fier à votre « impression globale » ! Si vous voyez 8 candidat.e.s au cours de la journée, portez une attention toute particulière à ceux qui sont « au milieu ». Puisque vous vous souviendrez mieux des deux premiers et des deux derniers, soyez plus attentif encore aux quatre du milieu !
Inspirez-vous davantage sur : Laetitia Vitaud
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