Effet Hawthorne : quand les relations humaines boostent la productivité des équipes

15 janv. 2020 - mis à jour le 30 juil. 2024

3min

Effet Hawthorne : quand les relations humaines boostent la productivité des équipes
auteur.e
Laetitia VitaudExpert du Lab

Autrice, consultante et conférencière sur le futur du travail, spécialiste de la productivité, de l’âge et du travail des femmes

Dans tous les secteurs, l’optimisation de la productivité est le nerf de la guerre, la préoccupation principale des dirigeants. Et s’il suffisait d’écouter vos employés pour être plus performant ? Explications avec l’experte du Lab Laetitia Vitaud.

Une meilleure luminosité, une hausse de salaire, des horaires plus souples… Autant d’éléments qui, bien qu’appréciés des salariés, ne suffiraient pas à améliorer durablement leur productivité. À l’inverse, la considération des dirigeants et la cohésion d’équipe boosteraient les performances des travailleurs. C’est ce qu’on appelle « l’effet Hawthorne » : en se sachant observés et écoutés dans le cadre d’une étude, ces derniers feraient preuve de davantage de motivation dans leur travail et seraient donc plus productifs. Un biais cognitif qui peut s’avérer très utile pour les managers ! Alors d’où vient l’effet Hawthorne ? Et quels sont ses avantages pour l’entreprise ?

Qu’est-ce que l’effet Hawthorne ?

Les physiciens l’ont constaté depuis longtemps : le simple fait d’observer un phénomène change le phénomène en question, ne serait-ce que parce que les instruments de mesure peuvent altérer ce qui est observé. Mais ce qu’on appelle en physique « l’effet de l’observateur » est également vrai en sciences sociales et en psychologie. Ainsi, l’effet Hawthorne désigne le fait que les résultats d’une expérience ne soient pas dus aux facteurs expérimentaux, mais à la conscience qu’ont les acteurs concernés d’être observés, de faire partie d’une expérience dans laquelle ils sont mis à l’épreuve.

L’effet Hawthorne tient son nom des études menées par Elton Mayo (1880-1949), un psychologue et sociologue australien à l’origine du mouvement des relations humaines en management. Avec ses comparses Fritz Roethlisberger et William Dickson, Mayo a mené des enquêtes à l’usine Western Electric de Cicero, la Hawthorne Works, près de Chicago, de 1924 à 1932.

L’expérience a débuté autour de la question de l’influence de l’environnement (en particulier de l’éclairage) sur la performance des travailleuses. Le contexte est celui de la montée en puissance de l’organisation scientifique du travail (OST), promue par Frederick Taylor, et du développement de la discipline reine de l’OST : l’ergonomie.

Au début de l’expérience, en 1923, des chercheurs se sont aperçus qu’en faisant varier l’éclairage de l’usine, la productivité augmentait. Ils ont ensuite multiplié les paramètres à modifier – pauses, durées de travail, prix des repas, etc. Étrangement, ils ont enregistré une hausse de la productivité même quand les conditions n’étaient pas plus favorables aux ouvrières. C’est alors que Mayo et son équipe de psychologues ont tenté de percer le mystère. Pourquoi la productivité augmentait-elle quoi que fassent les chercheurs ? C’est en observant plusieurs groupes de travailleuses dans des conditions différentes et en menant des entretiens qualitatifs qu’ils ont mis en évidence l’effet Hawthorne.

Salariés considérés, performance boostée

Le simple fait de participer à une expérience ou une étude peut être un facteur qui a une influence sur la motivation au travail. En psychologie, on sait que les gens sont capables de mieux faire quand on s’intéresse à eux. Tout ce qui permet une augmentation de l’estime de soi permet d’améliorer la performance.

Quand les travailleurs sont associés aux objectifs d’une étude, qu’ils peuvent prendre des initiatives et se sentent solidaires d’un groupe, il y a une saine émulation qui rend tout le monde plus productif. À certains égards, le rôle positif joué par le chercheur est l’un de ceux que l’on pourrait attendre du leader d’un groupe.

La leçon la plus essentielle de Mayo, c’est que le plus important dans la productivité au travail, ce n’est pas la lumière, la hauteur du plafond ou le logiciel utilisé, mais les relations humaines qui forment le « tissu » professionnel avec lequel on travaille.

Faut-il chercher à remédier à l’effet Hawthorne ?

En physique comme en sciences sociales, les chercheurs tiennent aujourd’hui l’effet Hawthorne pour certain et ont les méthodologies pour le contrôler. Pour les entreprises et les professionnels des ressources humaines, il ne s’agit pas tant de « remédier » à un effet qui est plus bénéfique que pervers, mais d’en avoir conscience pour en tirer tous les bienfaits.

Les études ergonomiques sur la productivité sont caractéristiques du travail à l’usine, quand des masses de travailleurs faisaient la même chose à la chaîne. Aujourd’hui, on s’intéresse davantage à ce qui produit les relations humaines positives qui vont nourrir la motivation professionnelle. Le plus souvent, on appelle cela la « culture ».

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Article écrit par Laetitia Vitaud et édité par Mélissa Darré photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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