Rendre un travail gratuit en process de recrutement : quels sont nos droits ?
31 janv. 2019
6min
Freelance Content Writer
Que ce soit pour les aider à faire le tri entre les nombreuses candidatures, suite à un entretien ou pour évaluer certaines compétences, il n’est pas rare qu’un recruteur demande au candidat de lui fournir une production lors du processus de recrutement. Selon le poste visé, on pourra vous demander de réaliser une grille éditoriale, un plan de communication, une courte vidéo, ou encore de développer un bout de code… Ces contributions peuvent être requises à divers stades du processus de recrutement. Le but ? Évaluer vos compétences sur une mission concrète. Le candidat est prêt à donner beaucoup pour se démarquer et apparaître sous son meilleur jour. Si l’intention est louable, ce type de contribution est bien souvent chronophage et peu parfois souffrir d’abus de la part de l’employeur.
Voici donc quelques conseils pour vous aider à réagir lorsqu’on vous demande d’accompagner votre candidature d’une telle production gratuite.
Des productions à géométrie variable
Une production pour démontrer ses compétences
Selon le poste visé, les contributions requises pour attester des talents du candidat pourront être de natures très différentes :
- Chez les développeurs, il est monnaie courante d’être invité à effectuer des “tests” qui vous permettront de montrer comment vous travaillez.
- Pour un poste de marketing, il n’est pas rare qu’on vous demande d’élaborer une campagne marketing.
- Pour un poste de social media manager, on vous demandera de fournir une grille des prochains visuels Instagram à poster par exemple.
- Pour les métiers sales, on pourra vous demander de fournir un profil de consommateur ou une proposition commerciale.
- Pour les métiers du management, un rapport, un plan RH, une analyse compétitive, un business plan… pourront faire l’affaire.
À l’aide du document fournit, le recruteur pourra évaluer l’aspect pratique des compétences annoncées par le candidat et en apprendre plus sur sa façon de travailler. Cet éclairage supplémentaire se révèle être un critère déterminant dans le choix du candidat.
L’écrit : la production la plus demandée
Pour la plupart des employeurs, les compétences rédactionnelles ont la barre haute. Ainsi de nombreux postes requièrent de soumettre des échantillons de textes lors du processus de recrutement à la place ou en renfort de la traditionnelle lettre de motivation.
On pense en premier lieu aux métiers nécessitant une écriture intensive comme ceux du journalisme et de la communication, du développement de contenu, de l’édition, des relations publiques… (À lire : Comment faire de sa plume son métier ?) En témoigne Anne Laure Civeyrac, Tech Editor chez Welcome to the Jungle. Lors de sa recherche d’un poste de Content Manager, on lui a souvent demandé de produire des articles pour attester de ses compétences rédactionnelles.
Mais cela peut également être le cas pour de nombreux métiers qui ne sont pas directement reliés à l’écriture. Pour un poste d’assistant d’un haut dirigeant par exemple, vous aurez sans aucun doute à rédiger ses correspondances.
Comment rédiger une bonne contribution ?
Rappelez-vous qu’avant de soumettre votre exemple écrit que le plus souvent l’employeur vous fournira des directives concernant le format et la longueur, et vous devrez :
- Choisir le sujet. Si pour Anne Laure, le sujet était parfois imposé, parfois libre, ce dernier était toujours en lien avec l’activité de la société.
- Trouver le bon style, ton. Pour cela, jetez un coup d’œil à leurs publications et renseignez-vous sur leur site Internet, blog, newsletter, réseaux sociaux… pour coller le plus possible à l’identité de la boîte.
- Analyser le marché, le produit, les clients de l’entreprise afin d’être le plus pertinent possible dans le contenu de votre production.
Si vous avez des doutes, n’hésitez pas à demander au recruteur des précisions. Cela montrera que vous êtes proactif et productif, que vous préférez rechercher des conseils avant d’approfondir une tâche donnée. Des qualités appréciées par les managers car elles permettent, en cas d’embauche, de gagner du temps, de l’argent et de l’énergie.
Conseils :
- Rappelez-vous que le but est d’être productif. Une page par exemple démontre votre capacité rédactionnelle et à synthétiser. En plus, vous ne perdrez pas trop de temps et serez donc moins déçu si jamais votre candidature n’aboutit pas.
- S’il peut être utile de faire relire votre travail pour obtenir une correction orthographique, grammaticale et un avis extérieur, ne vous faites pas trop aider non plus. Gardez en tête que votre futur employeur s’attendra à cette future qualité de travail.
Une production qui peut être demandée à tout moment
Que ce soit lors de l’envoi du CV et de la lettre de motivation, d’un entretien ou même post-entretien pour départager des candidats, gardez en tête qu’une production pourra vous être demandé à toute étape du processus de recrutement.
Pour Anne-Laure, « c’est durant le premier entretien qu’ils demandaient de produire un article. » Alors, comme pour votre CV, n’oubliez pas d’apporter des exemplaires en entretien !
Le cas de la contribution spontanée
Certains candidats, pour sortir du lot et faire preuve de leurs talents et de leurs motivations procurent d’eux même une contribution. Dans ce cas-là, les mêmes conseils s’appliquent. Créez quelque chose de spécial pour ce job. Et si vous sortez d’école, pourquoi pas vous inspirer d’une étude de cas ou d’un projet réalisé à l’école ?
Des productions susceptibles d’abus
Des productions généralement non rémunérées
« Une fois on m’a proposé soit de faire un article assez long (de 1000 mots) et d’être rémunéré soit de faire un article plus court et de ne pas être rémunéré. Pour toutes mes autres candidatures, on ne m’a pas proposé de rémunération. » Cet exercice a fini par être payant pour Anne Laure, lors de sa candidature au poste de Tech Editor. Si cette dernière n’a pas fait la vérification après coup, c’est certain qu’elle s’est demandé si ses productions avaient été réutilisées alors même qu’elle n’avait pas été embauchée, ni forcément rémunérée pour le travail fourni.
En effet, lorsque ces contributions sont rémunérées, on comprend aisément que l’employeur poste sur son blog l’article rédigé ou s’inspire d’une campagne marketing ou d’un business plan… Mais lorsqu’elles sont réalisées à titre gratuit, un peu moins. D’un point de vue contractuel, en l’absence de rédaction de contrat à titre gratuit, le candidat reste propriétaire de sa production. Ce qu’on appelle dans le jargon juridique “l’intention libérale” ne sera pas caractérisé. En cas de contentieux, ce sera à la personne qui fait valoir la gratuité de l’échange, ici à l’employeur, d’en apporter la preuve.
En l’absence de cadre contractuel, cela sera cependant très compliqué de prouver que c’est votre travail qui a été reproduit par l’employeur qui ne vous a pas embauché, ou encore que ce dernier se soit inspiré d’une de vos idées. En effet, seule la forme sous laquelle les idées sont exprimées peut faire l’objet d’une protection en droit de la propriété intellectuelle.
Ainsi, seul leur mode de réalisation peut être protégé :
- Les solutions techniques sont protégées par des brevets,
- Le nom d’un produit ou un logo par le dépôt d’une marque,
- La forme d’un produit par le dépôt d’un design,
- Les œuvres littéraires et artistiques, ainsi que les programmes d’ordinateurs par le droit d’auteur.
Or il semble très peu probable qu’un candidat passe par de telles formalités qui peuvent être lourdes et onéreuses pour ce type de productions gratuites…
Des productions chronophages
« Je n’ai particulièrement pas apprécié la fois où j’ai réalisé un article gratuitement et que l’entreprise n’a même pas pris le temps de me faire un retour. J’avais passé du temps dessus et eux ne se donnaient pas la peine de décrocher leur téléphone ou de m’envoyer un e-mail pour me donner un feedback. Du coup, je conseillerai aux candidats de passer le moins de temps possible sur ces articles de test. » La rédaction prenait à Anne-Laure, à chaque fois deux heures voire une demi-journée, le plus souvent à la place de la lettre de motivation.
Pour éviter trop de déception, ne consacrez en effet pas trop de temps à ces productions et tests qui ne sont pas rémunérés.
« Je n’ai particulièrement pas apprécié la fois où j’ai réalisé un article gratuitement et que l’entreprise n’a même pas pris le temps de me faire un retour. je conseillerai aux candidats de passer le moins de temps possible sur ces articles de test. » - Anne Laure
Se prévenir des abus
Le meilleur moyen de se prévenir d’éventuels abus reste d’adopter une attitude prévoyante. Pour qu’une production ne soit pas utilisée par l’employeur contre votre gré :
- Misez sur votre portfolio (que ce soit des bouts de codes, des articles précédemment rédigés…) pour attester de la qualité de votre travail et ainsi passer le moins de temps possible sur la contribution demandée. Vous avez le droit de refuser d’effectuer la production gratuite. À vos risques et périls.
- Vous pouvez également attester de vos compétences avec une certification spécifique. Par exemple, la certification Voltaire confirmera vos compétences rédactionnelles.
- Arrangez-vous pour faire signer un document à l’employeur attestant qu’il n’utilisera pas votre travail. Ou précisez en toute lettre dans un email votre souhait de ne pas voir votre production réutilisée. Si ce dernier accepte, ce mail sert de preuve en cas de conflit. Cependant, faites-le uniquement si vous êtes 100% sûr de ne pas vouloir contribuer sans crédit ou rémunération, car votre potentiel employeur pourrait préférer quelqu’un de moins tatillon.
Dans tous les cas, il est préférable de rappeler à un potentiel employeur qui ne comprendrait pas votre réticence qu’elle n’est pas dû à un manque de motivation ou de sérieux et qu’une fois embauché, vous aurez une période d’essai qui servira à tester vos compétences.
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