Désengagé au travail ? Voici les 8 profils et les manières de vous en sortir

Vos collègues qui parlent avec enthousiasme de leurs tâches au travail vous donnent de l’urticaire, vous avez du mal à comprendre la joie de vos amis qui obtiennent des promotions, et redoutez plus que tout les questionnements sur votre vie professionnelle lors des premières rencontres ? Vous n’êtes ni seul·e, ni irrationnel·le ; vous êtes seulement désengagé·e. Mais ce n’est pas une fatalité ! Si vous vous retrouvez dans un ou plusieurs des profils suivants, nos deux experts, Jean-Michel Philippon, conférencier et auteur de Quand le baby foot ne suffit plus et Aurore Le Bihan, co-autrice du Guide des paumé·es, vous aideront à naviguer dans cette période de turbulences existentielles. Ne perdez pas espoir, il y a bel et bien une place pour vous dans l’océan du monde professionnel.

1. Les dissonants cognitifs

Face à la multiplication des crises - géopolitique, sanitaire, climatique… -, vous vous interrogez sur le sens de votre travail, arrivant parfois à la conclusion qu’il n’en a pas vraiment, voire qu’il va à l’encontre du monde de demain. Torturés par l’impression que la planète sonne le tocsin, et que vous faites les sourdes oreilles, vos valeurs et vos croyances sont mises en contradiction dans votre quotidien professionnel. Deux sons de cloche, donc. Cette fameuse « dissonance cognitive » fait globalement état d’un système dans lequel vous ne vous retrouvez plus, et que vous aimeriez contribuer à changer, en en devenant acteur. Vous sentir utile et épanoui dans un travail qui a un impact positif sur le monde, voilà ce qu’il vous faudrait pour vous remotiver à vous lever le matin.

L’avis de nos experts :
Vous devez prendre conscience des valeurs profondes qui vous animent et pour lesquelles vous pourriez développer une réelle motivation professionnelle. Ensuite, si vous souhaitez contribuer à un monde qui vous semble meilleur, listez les compétences que vous avez déjà et celles que vous pourriez développer : j’aimerais améliorer ma capacité à fédérer, mon sens de la communication… Vous avez des rêves, voyez comment les transformer en actions. Demandez-vous également quels sont les gestes de votre quotidien qui vous semblent désalignés, et ce que vous pourriez mettre en place au cours des deux prochains mois pour être en meilleur accord avec vos valeurs : réduire votre consommation de viande, aller au travail en vélo, trier vos déchets… Fixez-vous des premiers objectifs simples.

Renseignez-vous sur les entreprises ayant une vraie politique de responsabilité environnementale et sociétale avec des actions visibles et impactantes. Le site jobthatmakesense, par exemple, recense des milliers de jobs à impact. Ayez un regard attentif sur les petites structures souvent plus agiles à faire bouger les choses rapidement et efficacement dans de plus petits périmètres. L’épisode du podcast paumé.e.s, « à écouter quand t’as envie de tout plaquer » avec Marc de Boni, co-auteur de la chaîne Youtube Et Tout le Monde s’en Fout pourrait également vous donner des clés. Pas de panique, vous n’êtes pas seul·es !

2. Les désillusionnés

Vous avez rêvé toute votre vie de devenir chirurgien, magistrat ou responsable marketing dans un groupe de luxe, et avez tout sacrifié pour étudier votre métier-passion. Aujourd’hui, vous occupez le poste « tant convoité », mais ne vous y épanouissez pas ; ou avez accepté des postes en-deçà de vos qualifications, dans lesquels vous ne vous voyez pas persister pour les 40 prochaines années. Après avoir survécu aux tumultes de la classe prépa et aux années d’études à rallonge, la désillusion est totale. La réalité du monde du travail, loin de celle que vous aviez ambitionné, ne correspond à aucune de vos attentes et vous avez perdu la foi…

L’avis de nos experts :
Il est urgent de renouer avec votre vraie personnalité, vos vraies passions, vos rêves d’enfants. Acceptez en toute sincérité et aussi en toute humilité que le chemin parcouru était beau, mais qu’il ne l’est plus. Acceptez d’intégrer que vous avez peut-être jusqu’à présent répondu à des attentes qui n’étaient pas vraiment les vôtres, et que votre rôle se joue certainement ailleurs. Faites le deuil d’une carrière à réussir pour « vivre bien », et osez entreprendre une aventure pour vivre vrai et fort. Il est certainement temps d’envisager une reconversion professionnelle vers un métier peut-être moins brillant aux yeux des autres, mais beaucoup plus enrichissant pour vous-même. Demandez-vous : quels sont les aspects de votre métier qui vous frustrent le plus ? A quoi voulez-vous contribuer par votre travail ? Quelle est votre vision de la réussite ? Si ce sont les conditions matérielles de votre métier qui ne vous satisfont plus par exemple (travailler en freelance, dans le public…), regardez les postes qui vous offrent une grande autonomie de décisions et d’actions, et envisagez, pourquoi pas, la création de votre propre entreprise. Pour mieux définir ce qu’est le sens du travail pour vous, vous pouvez faire l’exercice du « Workcoscope ».

3. Les idéalistes

Ayant toujours placé la barre haut en termes d’aspirations professionnelles, vous êtes convaincu que votre épanouissement doit passer avant tout par le travail. Mais à trop vouloir chercher l’idéal au boulot, vous prenez l’allure d’un·e parfait·e insatisfait·e. Faute d’avoir réussi à trouver le job qui vous accomplit à 100 %, vous sautez d’entreprise en entreprise, et de secteur en secteur, à la recherche du saint Graal. Sauf que, si cette chasse au trésor de longue haleine est certes motrice, vous commencez à fatiguer et à y laisser quelques plumes. La question qui commence à monter et vous décourager : et si le job parfait n’existait pas ?

L’avis de nos experts :
Vous êtes exigeant avec vous-même et vous avez cette même attente d’exigence avec les autres et avec votre entreprise. Mais d’où vient ce haut niveau d’exigence, que « cache»-t-il et surtout comment et pourquoi vous entraîne-t-il inéluctablement vers une frustration permanente ? Ce sont les questions auxquelles vous devez - avec honnêteté et avec l’aide d’un tiers si besoin - répondre. Notamment parce qu’il est possible que la satisfaction de vos besoins fondamentaux ne passe pas exclusivement par votre job, mais par l’exploitation d’autres espaces complémentaires : l’associatif, le milieu sportif ou autre. Faites la liste de toutes les raisons qui vous ont poussé à quitter vos jobs, et cherchez, s’il y en a, des points communs. Quels “défauts” d’un job seriez-vous prêt·es à accepter ? En contrepartie de quelles “qualités” ? Vous trouverez peut-être une piste à votre épanouissement. En complément, vous pouvez réaliser votre Ikigai, une méthode qui permet de se recentrer sur le sens et les motivations de vos actions sur le monde.

4. Les angoissés

Vos patrons sont absents ou tyranniques, vos collègues se tirent dans les pattes et vos tâches quotidiennes sont ennuyeuses au possible… Bel et bien découragé par ce cadre déprimant, vous vous refusez pourtant à quitter votre boîte, assailli par de nombreuses craintes : et si vous ne retrouviez pas de boulot derrière ? Et si c’était pire ailleurs ? Vous avez donc relégué vos aspirations au stade embryonnaire, et tentez de vous consoler avec la liste des “avantages” de votre PME : une paie plutôt confortable, 12 jours de RTT, quelques jours de télétravail… Résultat : vous faites tout pour ne pas faire de vagues, mais ne vous investissez pas davantage, et vivez pour vos week-ends et vacances. En tentant de ne pas trop déprimer la semaine…

L’avis de nos experts :
Cette forme de négociation avec vous-même peut devenir épuisante à la longue. Mais il est bien normal de ne pas vouloir “tout quitter” et risquer de mettre en péril vos finances, votre vie de famille, etc. ! Dans ce cas, il est cependant urgent de tout de même retrouver du plaisir et de l’épanouissement dans votre activité quotidienne. Demandez-vous ce qui vous fait peur dans le fait de changer de travail(l’aspect financier, la perte de reconnaissance…) ? Comment pourriez-vous vous rassurer sur chacune de ces peurs ? Faites la liste des solutions, actions qui pourraient exister. Regardez les offres d’emploi disponibles, pour voir si vous arrivez à vous projeter dans certaines d’entre elles - n’hésitez pas à vous intéresser aux offres au sein même de votre entreprise. Et si vraiment vous n’avez pas la force ou la possibilité de quitter votre entreprise pour le moment, tentez d’être force de proposition : vous avez peut-être plus la main sur votre bien-être que ce que vous pensez. Comme le dit Angelo Foley dans son podcast “Balance ta peur”, votre vulnérabilité peut être une force.

5. Les couteaux suisses

Contre la menace d’un marché du travail toujours “plus dur”, on vous a conseillé de vous diriger vers des études très généralistes pour ne pas “vous fermer de portes”. Vous avez deux masters, un doctorat, mais ne vous êtes jamais spécialisé.e, n’avez jamais réduit votre apprentissage à un métier. Résultat : vous vous sentez totalement inapte à travailler sur un poste précis et souffrez du syndrome de l’imposteur. Vous avez la sensation de pouvoir vous glisser dans la peau de plusieurs personnages, sans en incarner pleinement aucun. Vous peinez à savoir qui vous êtes vraiment ou ce que vous aspirez réellement à faire. Vous voguez au-dessus d’un monde du travail qui vous semble flou et impénétrable, en vous demandant si vous arriverez un jour à y trouver votre place et à vous y épanouir.

L’avis de nos experts :
Demandez-vous si vous avez réellement envie de vous engager plus fermement dans une voie, ou si la polyvalence vous convient. Si tel est le cas, dressez la liste des différentes casquettes que vous avez endossé, et de celle·s que vous avez préféré, cela peut être un bon indicateur. Vous risquez de vous ennuyer dans un poste aux tâches répétitives : orientez-vous plutôt vers un métier à challenges, à responsabilités, qui vous permet de vous réaliser dans une grande diversité de tâches. Vous pouvez par exemple faire la liste de vos dix jobs de rêves : quel est le point commun entre tous ces métiers ? Si certains postes très spécifiques demandent une hyper-spécialisation pointue, de nombreuses autres fonctions recherchent des « profils » plus que des compétences. Ce qui vous apparaît comme une faiblesse est certainement une force pour certains recruteurs et une belle opportunité d’élargir votre périmètre d’activité. La compétence qui va de plus en plus être recherchée sera celle de la capacité à apprendre et à désapprendre. Il ne vous reste plus qu’à vendre votre compétence à apprendre ! Si vous vous sentez toujours perdu, il existe des ateliers “paumé·es dans mon job” organisés par makesense régulièrement partout en France.

6. L’égaré

Contrairement aux passionnés transits, à qui l’on a offert le fil d’Ariane vers le sens de leur vie, vous, l’égaré, semblez privé de guide. N’ayant jamais su quelle était votre vocation, vous peinez à trouver votre place. Comme condamné à errer dans un labyrinthe existentiel, vous auriez aimé avoir une passion comme boussole.
L’avis de nos experts :
Tout le monde n’a pas une vocation ou une passion (la grande majorité des gens d’ailleurs), mais a au moins des envies et des centres d’intérêts. N’ayez pas peur de tous les questionnements qui vous traversent la tête, alimentez-les ! Demandez-vous quelles sont les activités qui vous procurent de la joie, ce à quoi vous avez envie de contribuer, ou encore ce qui vous fait vous sentir vivant.e ou en colère. Si vous rencontrez des difficultés à identifier ce que vous aimez, n’hésitez pas à demander à vos proches de vous partager les moments où ils vous voient prendre plaisir à faire des choses. Le guide des paumé.e.s (Ed. Marabout) donne également plein d’exercices et de ressources pour retrouver sa boussole.

Au-delà de ce cheminement très personnel, vous pouvez décider d’aller plus loin en effectuant un bilan de compétence afin d’analyser et évaluer vos compétences professionnelles et personnelles, ainsi que vos aptitudes et vos motivations. Ce bilan vous permettra de définir un projet professionnel réaliste et adapté au marché de l’emploi, ou alors de vous orienter vers un projet de formation et/ou un nouveau métier. Il y a une place pour vous dans ce monde du travail aux multiples opportunités et aux grandes variétés de jobs et d’entreprises. Pour la trouver, prenez-vous en main, soyez curieux du monde comme de vous-même. Pour vous aider en ce sens, quelques séances de coaching professionnel vous seront certainement utiles.

7. Le hors-piste

Que vous ayez été arrêté pour des gros problèmes de santé provoquant des arrêts maladie longue durée, des périodes de chômage prolongé, des congés maternité, ou que vous vous ré-installiez en métropole après plusieurs années de vie d’expatrié, vous avez peur de ne plus jamais pouvoir pleinement vous investir dans votre travail. Alors comment remonter à bord du navire, lorsqu’on en a été éloigné parfois un peu trop longtemps ?

L’avis de nos experts :
Vous savez combien les évolutions dans tous les domaines sont nombreuses et rapides, et vous pensez que vos compétences ne sont plus d’actualité. Sachez tout d’abord que cela n’est qu’une perception subjective de la réalité, et que cette peur n’est peut-être pas fondée. L’un des enjeux de cette étape est pour vous de reprendre confiance en vous et en votre parcours. Bien que vous ayez l’impression d’avoir été “hors-circuit”, il est fort probable que votre expérience vous ait permis de tirer des enseignements précieux, que vous pouvez tout à fait valoriser dans votre vie professionnelle : de la persévérance, de la patience, de l’empathie… Les podcasts “Change ma vie” de Clotilde Dusoulier peuvent être un premier bon terrain pour vous donner des outils concrets pour restaurer votre confiance en vous. Si vous souhaitez vous alléger davantage de vos peurs, rien de tel que de les partager à votre employeur ou votre manager. Ils sauront être compréhensifs, ils sont peut-être eux aussi passés par là. S’ils vous ont engagé·es, c’est qu’ils ont foi en vos capacités ! Partagez également cette appréhension avec vos collègues de travail, de cette manière vous serez moins craintif à leur demander du soutien quand nécessaire. Vous passerez ainsi de la peur d’être « en dehors » au plaisir de « faire partie ».

8. Le déserteur

Métro, boulot, (un minimum de) dodo : vous en avez assez. Après avoir donné votre vie pour votre travail, vous avez réalisé que vous aimeriez ralentir le rythme. Exit les semaines de 50 heures et l’agitation de la ville, vous sentez qu’il est temps pour vous de tout envoyer valser pour vous installer “en province” (comme disent les parigots). Sauf que le saut est haut… Véritable changement de trajectoire - tant professionnel que personnel -, franchir le pas de quitter la ville pour vous installer à la campagne vous impressionne beaucoup : et si travailler moins pour vivre mieux n’était qu’une lubie passagère ?

L’avis de nos experts :
Pour vous la réussite n’est plus celle de la performance mais celle de la sérénité et du bien-être. Partir ailleurs vivre une autre vie est toujours possible à partir du moment où vous ne vous mentez pas à vous-même sur vos réelles motivations. Vous semblez être en pleine conscience de ce que vous ne souhaitez plus subir, mais ne vous laissez pas aveugler par les fantasmes de liberté véhiculés par certains médias non plus. Prenez le temps d’imaginer au quotidien votre vie future là où vous souhaitez vous installer, avec tous les avantages et aussi les inconvénients (il y en a aussi en province !) Le livre “L’exode urbain” de Claire Desmares-Poirrier pourrait notamment vous aider à porter un regard nouveau sur les campagnes. Un conseil, avant toute décision, allez rencontrer des amis ou des connaissances qui ont fait le pas depuis plusieurs mois. Leur lanterne pourra certainement éclairer votre chemin !

Article édité par Clémence Lesacq ; Photo de Thomas Decamps